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Actualités - CHRONOLOGIE

SEPTIÈME ART - Clôture du Festival du court-métrage méditerranéen Des films «coup de gueule», graves ou poignants récompensés à Tanger TANGER – de Zéna ZALZAL

Au-delà de toute polémique sur la divergence de qualité des films présentés au cours de la petite semaine de projection, le Festival du court-métrage méditerranéen de Tanger (qui s’est tenu du 11 au 16 septembre) aura donné un aperçu de l’état de la production dans les pays – globalement appelés – du Sud, ainsi qu’un intéressant panorama des thématiques et des préoccupations propres à chaque pays du pourtour de la grande bleue. Comme l’a fait remarquer le réalisateur suisse Jean-François Amiguet, qui présidait cette 4e édition du festival, «la disparité des moyens mais aussi de la culture cinématographique entre les différents pays participants est évidente. Les références pluriculturelles sont bien plus perceptibles par exemple dans les films espagnols ou albanais que dans ceux des Égyptiens, malgré l’importance de l’industrie cinématographique en Égypte. Ce qui compte, finalement, spécialement dans le registre du court-métrage, c’est l’expression d’un univers personnel. Aujourd’hui, avec les nouvelles technologies, même sans argent, on peut faire des films. Il suffit juste d’en avoir le désir et de bien travailler le scénario.» Désir d’expression Un désir d’expression qui tire visiblement ses racines de la société dans laquelle vit et évolue le cinéaste. Une constatation, relevée au cours de ces journées de projection à Tanger, qui confirme la thèse du «cinéma miroir d’une société». En effet, la «nationalité» des 37 courts-métrages en lice, ou leur provenance de la rive nord ou sud de la Méditerranée, était aisément identifiable de par leurs thèmes, même et surtout dans les films sans paroles. Ainsi, les Marocains – qui présentaient outre trois films en compétition officielle, un panorama de soixante courts-métrages réalisés au cours de l’année – ont abordé, de différentes manières, la grande thématique des bouleversements intérieurs induits par les changements sociétaux, comme dans Casa de Ali Benkirane, qui suit le parcours d’un jeune du «rif» vers la grande cité de Casablanca à la recherche d’un avenir meilleur, ou Tes cheveux noirs Ihsan, le film – doublement récompensé du prix spécial du jury et du prix de la meilleure interprétation féminine – de Tala Hadid. Une émouvante histoire de retour vers ses racines d’un jeune Marocain, exilé en Europe, et qui avait été séparé tout jeune de sa mère. Cinéma d’après-guerre (si l’on peut parler d’un «après»), les réalisations des Libanais se sont focalisées sur l’état de la jeunesse du pays du Cèdre. Déchirée entre deux identités (A Plus, de Fouad Alywan), désorientée par l’instabilité chronique du pays (Badkoun Shi…t, de Badih Massaad) ou en peine de communication et en pleine mutation sociale (Le premier étage à droite, de Rana Salem)... Pour le cinéma palestinien, c’est toujours l’attachement à la terre qui prédomine: malgré l’exil, comme dans Diaspora de Ula Tabari, ou en dépit des vexations, comme dans La chanson de Yasmine de Najwa Najjar. Du collectif à l’individuel Traitant de sujets moins collectivement engagés, plus personnels et intimistes, les œuvres des réalisateurs du bord «européen» de la grande bleue (France, Espagne, Italie, Grèce, etc.) restent cependant dans une note pessimiste, engendrée par l’état du monde: solitude, divorce, drogue, «incommunicabilité», délitements des liens familiaux, folie... Dans ce registre, Devoir en classe, de l’Italien Daniele Cascella, a obtenu le prix du meilleur scénario. Un prix largement mérité pour la virtuosité avec laquelle il a traité d’un sujet lourd, en l’occurrence l’inceste. Tandis que le prix de la meilleure interprétation masculine est revenu à Edmond Budina, l’acteur du film Flocons de neige, de l’Albanais Robert Budina. Une interprétation d’une belle subtilité d’un homme d’une cinquantaine d’années submergé par le chagrin de voir sa femme gravement malade s’éteindre sous ses yeux faute d’avoir la possibilité d’obtenir un visa pour se faire opérer à l’étranger. À Tirana, parfois le temps ne vaut pas seulement de l’argent, mais la vie. Véritable «coup de gueule» de deux toutes jeunes réalisatrices, Aile soixante 6, d’Angélique Muller et Gatheleen Tanti, donne une vision intérieure de l’univers de la folie, étiquette qualifiant toute différence qui n’entre pas dans les carcans de la société. Scénario et mise en scène soignés, pour des images en noir et blanc et une voix off qui expriment les pensées et sentiments d’une jeune femme accusée de folie. Une œuvre réalisée, dans le cadre du projet de diplôme des deux réalisatrices débutantes, «avec très peu d’argent et les contributions gratuites des acteurs», ont précisé les lauréates. Problèmes de diffusion Le Festival du court-métrage méditerranéen de Tanger est encore jeune. Et, à ce titre, il ne faut pas le comparer à celui de Clermont-Ferrand (l’équivalent pour le court du Festival de Cannes). Mais, outre le fait que de telles rencontres nourrissent l’expérience des jeunes cinéastes par la pluralité des horizons qu’elles confrontent, cette manifestation aura apporté aux participants, à travers débats et discussions, une vision d’ensemble des perspectives et problèmes du septième art, et en particulier du film court (de moins de 30 minutes), dans les pays du nord africain et moyen-orientaux. Ainsi, par exemple, le Maroc qui est le plus grand producteur de courts-métrages (avec près d’une centaine d’œuvres réalisées par an et qui bénéficient d’une aide à la production du Centre du cinéma marocain) n’a pas pour autant encore mis sur pied une politique de diffusion via la télévision ou les avant-séances de cinéma. Le court reste dès lors – comme partout ailleurs, à de rares exceptions près – restreint aux seuls circuits des festivals. Ce qui est vraiment dommage, car le court est visiblement loin d’être à court d’idées!
Au-delà de toute polémique sur la divergence de qualité des films présentés au cours de la petite semaine de projection, le Festival du court-métrage méditerranéen de Tanger (qui s’est tenu du 11 au 16 septembre) aura donné un aperçu de l’état de la production dans les pays – globalement appelés – du Sud, ainsi qu’un intéressant panorama des thématiques et des...