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L’odyssée tragique des chrétiens de Marjeyoun

Fuyant sa ville natale de Marjeyoun, Violette Ablah a été grièvement blessée vendredi soir dans l’attaque israélienne qui a fait sept morts dans son convoi, pourtant dûment signalé par l’ONU et le gouvernement libanais, raconte le journaliste de l’AFP Sammy Ketz. Dans la Mercedes au toit aplati et maculée de sang, sont abandonnés quatre bocaux de fromages à l’huile d’olive et une dizaine de boîtes éventrées de crème de sésame. En bonne cuisinière, Violette ne se sépare jamais de ses produits. Elle-même, sa fille et son beau-frère comptent parmi les 35 blessés de l’attaque israélienne d’un convoi de 4 000 déplacés, des civils, en grande majorité chrétiens, qui avaient quitté Marjeyoun avec 350 soldats et gendarmes libanais pour se rendre, à bord de 1 300 voitures, à Beyrouth à travers la plaine de la Békaa. Au milieu des vignobles qui font la réputation du Liban depuis l’Antiquité, à l’intersection des localités de Jeb Jennine et Kefraya, deux drones ont tiré huit roquettes, vers 21h30. Samedi, les rescapés sont abasourdis. « Je n’ai pas d’explication. C’est totalement incompréhensible, c’est tout », confie à l’AFP le général Adnane Daoud, qui commandait les 350 soldats et policiers libanais de la caserne de Marjeyoun, occupée jeudi par les soldats israéliens. C’est ce général de gendarmerie qui a négocié toute la journée de vendredi le départ du convoi. Tôt le matin, un détachement de la Finul est arrivé pour escorter la colonne de véhicules vers Hasbaya. Puis la Finul a demandé au convoi d’attendre en raison d’un bombardement sur la route. Vers 15h, les hommes de l’ONU ont prévenu le général qu’ils avaient reçu l’ordre de partir et ont disparu. Une heure plus tard, au terme de négociations via l’ONU, le ministère de l’Intérieur a annoncé au général Daoud que l’armée israélienne était d’accord sur l’itinéraire et qu’elle avait assuré qu’il n’arriverait rien au convoi. « Le ministère m’a dit de prendre la route et je suis parti à la tête de la colonne de 1 300 voitures. À notre arrivée à l’intersection de Kefraya-Jeb Jennine, un drone a tiré quatre roquettes. Il y avait des morts et des blessés partout, c’était la panique », a expliqué le général. Des voitures ont alors tenté de rebrousser chemin, mais un deuxième drone a pulvérisé plusieurs véhicules qui gisent encore sur la chaussée, face au domaine viticole du Château Kefraya. « Nous avons suivi l’itinéraire qu’ils (les Israéliens) avaient fixé. Nous n’avons pas dévié d’un iota. Nous avions l’autorisation. Personne n’était armé, puisqu’ils nous avaient confisqué toutes nos armes avant de quitter la caserne. Je ne comprends pas, mais des innocents sont morts », souligne le général. « J’ai eu le sentiment d’être broyée, puis d’être projetée en l’air et brisée par une onde magnétique », raconte la fille de Violette, Abir, 29 ans, alitée avec sa mère à l’hôpital Farhat de Jeb Jennine. Toutes deux, la mâchoire brisée, peinent à s’exprimer. Samedi, des rescapés reprenaient leur odyssée vers la capitale. « Nous avons passé la nuit à la belle étoile, mais de toute façon, après ce cauchemar, nous ne pouvions pas dormir. Que Dieu nous prête vie jusqu’à Beyrouth », lâche un vieil homme. Derrière lui, les autres voitures s’impatientent : la route n’est pas sûre. « Ils ont quitté Marjeyoun en laissant tout derrière eux pour sauver leur vie. Ils l’ont perdue. Cela est un crime, les Israéliens l’ont commis au moment où l’ONU votait la fin des hostilités. C’est un défi à l’humanité », gronde l’archevêque grec-orthodoxe du Liban-Sud, Mgr Élias Kfouri.
Fuyant sa ville natale de Marjeyoun, Violette Ablah a été grièvement blessée vendredi soir dans l’attaque israélienne qui a fait sept morts dans son convoi, pourtant dûment signalé par l’ONU et le gouvernement libanais, raconte le journaliste de l’AFP Sammy Ketz.
Dans la Mercedes au toit aplati et maculée de sang, sont abandonnés quatre bocaux de fromages à l’huile...