Rechercher
Rechercher

Actualités

TRIBUNE «Maaarch», de Issam Abou Khaled, au Tarmac de la Villette

Quelques jours après la représentation de Qu’elle aille au diable, Meryl Streep au théâtre du Rond-Point, c’est au tour de la troupe de Issam Abou Khaled avec «Maaarch» d’être chaleureusement accueillie par le public parisien au Tarmac de la Villette. Serait-ce les prémices d’une renaissance du théâtre libanais? «Maaarch.» Le cri assourdissant sonne comme une mise à mort. Un bataillon entre solennellement et effectue ses exercices d’entraînement en chœur, au rythme d’une musique guerrière agressive. Leur chef les surveille, imperturbable derrière sa cagoule qu’il ne retirera à aucun moment. Le spectateur a le sang glacé. Mais c’est sur le bataillon ubuesque que les regards sont rivés. Ils sont neuf. Il y a le gros – la poule mouillée –, le barbu, le costaud, le maigre, le tambour, les deux ouds et, bien sûr, deux femmes – et pas les moins cruelles – dont la chevelure dépasse le casque. Des mimiques exagérées. Des grimaces grotesques. Un langage sibyllin, mélange lointain d’hébreu, d’arabe, d’espagnol et de français; un sabir sur le mode «borborygmique». Le choix est judicieux. Car rien de mieux pour exprimer l’absurdité et l’universalité de cette guerre en… Maaarch. Les scènes se succèdent. Et le spectateur vacille entre rire et angoisse. Du quotidien de la vie de ces soldats en guerre. Entraînements. Relâche: pause cigarette. Alerte. Combat : culbutes au ralenti dignes des films asiatiques. Le spectateur rit. Mais le chef remet de l’ordre dans sa division…et dans la salle. C’est l’heure des comptes. La femme soldat doit être punie. Et le dispositif ingénieux de la caméra, qui fait aussi office de mitraillette, avec laquelle le chef balaie l’assemblée et le plateau en vue de repérer l’ennemi, permet au public de suivre en direct le dos ensanglanté de la jeune femme. Pause. Retour d’un soldat…torturé? La pièce avance inexorablement. Les corps entrent en transe. Et soudain, le décor avance; la scène, qui diminue de volume, est proche de disparaître. Le public retient son souffle. Va-t-il lui aussi être englouti par cette vague dévastatrice? Et le décor s’arrête d’avancer in extremis. Respiration. La machine de guerre continue son cours. Elle atteint le summum de l’absurdité au dernier tableau où le bataillon finit par s’entretuer sous le regard impassible du chef. Le dernier soldat, resté seul, se suicide. Et la pièce se termine comme elle avait commencé sur le «Maaarch» qui ressuscite le bataillon en loques disloqué. Et «Maaarch». Silence. Une pièce prenante qui oscille entre légèreté et violence oppressante. Un travail de mise en scène particulier et judicieux: travail de chœur, de gestuelle, de création d’un nouveau langage. Car chez Issam Abou Khaled, ce ne sont pas les mots, mais les gestes, le rythme, le corps et l’énergie qui font avancer l’histoire. Des décors et costumes multifonctionnels, originaux, et une musique excessivement étourdissante accompagnent cette démarche. Un petit bémol toutefois : le jeu des comédiens n’est pas toujours tenu. Du 18 au 28 juillet, la troupe présentera Impossible amour possible au théâtre des Carmes en Avignon. En septembre, elle sera en tournée à Beyrouth avec Alam bala sott, travail réalisé avec une troupe de sourds-muets, la première dans le monde arabe. Sarah HATEM (Paris)

Quelques jours après la représentation de Qu’elle aille au diable, Meryl Streep au théâtre du Rond-Point, c’est au tour de la troupe de Issam Abou Khaled avec «Maaarch» d’être chaleureusement accueillie par le public parisien au Tarmac de la Villette. Serait-ce les prémices d’une renaissance du théâtre libanais?
«Maaarch.» Le cri assourdissant sonne comme une mise à mort....