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Actualités - CHRONOLOGIE

CONCERT Mozart, Béchara el-Khoury et Bernstein interprétés à l’église Saint-Joseph (USJ) Les multiples facettes de la musique avec l’Orchestre symphonique national libanais

Trois compositeurs, trois siècles, trois inspirations, trois styles, trois sensibilités, trois tempéraments, trois continents, trois horizons, mais une seule et même passion pour la musique. Passion totale et absolue. Passion pour tout dire en tonalités douces, graves, ludiques, lyriques ou agressives. De l’Europe aux Amériques en passant par l’Orient, les multiples facettes de la musique, aux expressions innombrables, ont été visitées, avec bonheur, par l’Orchestre symphonique national libanais à l’église Saint-Joseph (USJ) placé sous la houlette de Wojieh Czepiel. Avec une invitée de marque, Nina Drath, arrivant en droite ligne de Corpus Christi au Texas et qui a fait une éblouissante prestation au clavier pour une partition d’exception de Leonard Bernstein. Des pages de Mozart, de Béchara el-Khoury (en présence de sa mère assise au premier rang ainsi que son premier professeur, Hagop Arslanian) et de Leonard Bernstein ont résonné sous les voûtes illuminées et par une chaleur étouffante. De la clémence aux temps de l’anxiété, en passant par les farouches élans de la liberté, la musique avait un pouvoir à la fois impérieux et insidieux, celui de souffler à l’oreille les doux sortilèges des turbulences et des passions heureuses… Premières mesures orchestrales avec l’ouverture de l’opéra La clémence de Titus du génie de Salzbourg. Œuvre de commande pour le couronnement de Léopold II, elle fut un peu boudée par les scènes et les musiciens à travers le temps pour revenir en force et être appréciée à sa juste valeur comme toutes les partitions du génial Mozart. Introduction lente avec des phrases majestueuses pour un cérémonial en grande pompe qui se marie harmonieusement avec un événement royal de circonstance. Et bien sûr cet air éminemment séduisant, si particulièrement mozartien que les oreilles se dressent toutes seules comme sous l’incroyable et magique appel d’une flûte enchantée… Révélation de la musique de Béchara el-Khoury Plus graves et majestueux dans leur narration grandiloquente sont Les fleuves engloutis de Béchara el-Khoury qui vient de faire récemment un triomphe avec son concert parisien au théâtre des Champs-Élysées, sous la baguette de Kurt Masur. Découverte des mélomanes libanais d’un compositeur du pays du Cèdre qui use avec subtilité et une belle emphase des images sonores nimbées d’une poésie ardente. Cinq mouvements, courts et d’un lyrisme intense pour traduire le désarroi, les errements, les égarements des êtres et les ballottements de la vie qui est loin d’être un sécurisant fleuve tranquille… Au contraire, c’est un fleuve mugissant, menaçant, à la reptation inquiétante. Un fleuve qui se ramifie en mille rivières, comme toutes les vies naissantes ou perdues dans une traversée humaine, mais où la lueur de l’espoir demeure malgré tout un chant profond et salutaire. Un chant dominé par l’amour et la liberté tel un phare balayant les brumes dangereuses. Des thèmes d’une grande noblesse sont abordés dans ces eaux tumultueuses qu’accompagnent des mesures ondulantes, sinueuses, d’une fluidité insaisissable et d’une vigueur étonnamment féline… Les fleuves engloutis est une œuvre à la fois méditative et agressive où les rugissantes ou plaintives beautés sonores ont des incandescences brûlantes et touchent les profondeurs les plus secrètes car les plus abyssales. Un langage moderne Petit entracte et arrive sur scène Nina Drath, souriante, toute menue. Une pianiste hors pair qui écoute, les yeux fermés, les premières phrases orchestrales d’Age of Anxiety (Le temps de l’anxiété) de Leonard Bernstein. Brillant morceau symphonique où le clavier et l’orchestre ont de pétillants dialogues et des apartés d’une grande finesse imaginative. Finesse d’un langage moderne défenseur de toutes les libertés individuelles où rythmes, couleurs, atmosphères et stridences reflètent admirablement les préoccupations contemporaines. Inspiré d’un poème de W.H. Auden et écrit entre 1944 et 46, cet opus illustre avec éclat le talent d’écriture du compositeur de West Side Story. Force éruptive d’une partition faisant feu de tout bois où le clavier a des soliloques inspirés tandis que cuivres, instruments à vent et à cordes se taisent sagement pour ressurgir à leur tour en vagues coléreuses, tendres ou caressantes… Et puis, de ces rythmes syncopés, inquiets ou haletants, émerge cet air de jazz ou de swing qui ouvre toutes grandes les fenêtres d’une lumière vive, gaie, éblouissante…Véritable feu d’artifice que ce luxuriant bouquet de notes dansantes comme des lucioles dans le velours de la nuit. Sans que le clavier ne cesse pour autant de s’ingénier à offrir ses charmants assauts d’arpèges et ses chromatismes en longues grappes légères accrochées aux humeurs du vent… Les percussions, le xylophone, les cymbales, les tambours, le métal tintinnabulant ou un second piano en coulisse font les beaux et les belles comme pour rappeler à un ordre dionysiaque cette baroque sarabande où sensualité et chaos sont bien le lot naturel de la vie. Ovation debout d’un public médusé pour une performance spectaculaire. En bis et en solo, Nina Drath a offert les fuyantes et rapides coulées au piano du Runner de Petroff, un compositeur texan. Musique emportée et « virtuose », comme un magique prolongement de l’univers de Bernstein… Edgar DAVIDIAN
Trois compositeurs, trois siècles, trois inspirations, trois styles, trois sensibilités, trois tempéraments, trois continents, trois horizons, mais une seule et même passion pour la musique. Passion totale et absolue. Passion pour tout dire en tonalités douces, graves, ludiques, lyriques ou agressives. De l’Europe aux Amériques en passant par l’Orient, les multiples facettes...