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Actualités - REPORTAGE

REPORTAGE À Gaza, des bijoux contre de la nourriture

Raëd al-Dib, un policier de 26 ans, tend les bracelets et les boucles d’oreilles en or de son épouse, assise à ses côtés, à un bijoutier de Gaza. « Ce sont les bijoux de notre mariage », soupire-t-il. Raëd, comme les 160 000 fonctionnaires et membres des services de sécurité palestiniens, n’a pas reçu sa paie depuis deux mois. Et comme nombre d’entre eux, il s’est résigné à se séparer des seuls objets de valeur qu’il possédait encore pour pouvoir subvenir aux besoins de sa famille. « J’ai déjà vendu ma voiture et maintenant je suis obligé de vendre l’or de ma femme pour acheter de quoi manger et vivre », dit-il, vêtu de son uniforme bleu et noir. « Beaucoup de mes collègues font la même chose. Je suis depuis huit ans dans la police et c’est la première fois que l’on vit une situation aussi difficile », poursuit le jeune homme. Dans la petite ruelle grouillante du « marché de l’or », situé dans le vieux Gaza, les familles palestiniennes sont de plus en plus nombreuses à venir dans les échoppes colorées pour troquer l’or contre de l’argent liquide. « Les gens n’ont plus d’argent. Ils n’ont d’autre choix que de vendre leurs bijoux. Particulièrement les fonctionnaires et les ouvriers qui travaillaient en Israël », explique Abou Fayez, le propriétaire d’une des joailleries. Dans une autre boutique, Hasna Moughani, une mère de famille de 55 ans, range soigneusement une petite liasse de billets dans son sac à main. « Tous les 10, 15 jours environ, je viens et je vends une partie de mes bijoux », murmure-t-elle, le visage ceint d’un foulard blanc immaculé. Deux de ses 15 enfants sont aussi policiers. Et sans revenu. « Avec cet argent, j’achète à peine un peu de farine, du gaz, des tomates et des olives. Tout est devenu tellement cher », continue Hasna. Mais tout le monde n’a pas la chance de posséder un pécule en or, une valeur refuge traditionnelle pour les Palestiniens. Certains se tournent vers le recyclage de la ferraille, récupérée dans les anciennes colonies israéliennes évacuées, dans les terrains vagues ou les immeubles détruits. Sous un chaud soleil de printemps, Moussa Nadjar et son fils frappent à grands coups de masse sur le mur, à terre, d’une ancienne maison de colons de Gadid, dans le sud de la bande de Gaza. Ils en extrairont des tiges de fer qu’ils vendront un demi-shekel le kilo (un euro = 5,6 shekels). L’homme, âgé de 56 ans, a travaillé la moitié de sa vie en Israël, gagnant sa vie en réparant des voitures. Mais depuis plusieurs mois, l’État hébreu lui interdit de pénétrer sur son territoire, comme à des milliers d’ouvriers palestiniens. « Ceux qui nous vendent du fer, du plastique ou de l’aluminium n’ont rien d’autre pour survivre », assure Mohammad Sawaf, un ferrailleur de Gaza de 27 ans, juché sur son chariot élévateur. Mohammad Moussabeh, un adolescent de 15 ans, est dans ce cas. Avec son cousin Maher, il est venu vendre sa cargaison rouillée, récoltée toute la matinée avec sa charrette bringuebalante. « J’ai cinq frères et six sœurs. Mon père est au chômage et je dois les aider », explique-t-il timidement, soulignant qu’il est l’aîné de la famille. « Du matin au soir, c’est la même chose : on cherche la ferraille », poursuit-il. Avec à la clé à peine 300 à 400 shekels (53 à 70 euros) par mois. Mehdi LEBOUACHERA (AFP)
Raëd al-Dib, un policier de 26 ans, tend les bracelets et les boucles d’oreilles en or de son épouse, assise à ses côtés, à un bijoutier de Gaza. « Ce sont les bijoux de notre mariage », soupire-t-il. Raëd, comme les 160 000 fonctionnaires et membres des services de sécurité palestiniens, n’a pas reçu sa paie depuis deux mois. Et comme nombre d’entre eux, il s’est...