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BALKANS En Bosnie, les ennemis d’hier se retrouvent autour du tatami

« Concentrez-vous ! » ordonne Zoran Mijic, un Serbe bosniaque expert en arts martiaux. Les élèves qui lui obéissent sont d’anciens ennemis de la guerre de Bosnie (1992-1995), soldats de pays membres de l’OTAN, aujourd’hui en mission de maintien de la paix sous drapeau européen. Zoran Mijic, ancien militaire au sein des forces serbes bosniaques et maître de « ninjutsu », s’approche d’un de ses élèves puis, avec aisance, il le met à terre avec des mouvements rapides mais d’une simplicité trompeuse. L’entraînement se poursuit par des exercices de protection contre des attaques au couteau, à l’épée voire au « shuriken », des lances en forme d’étoile qui figurent dans l’arsenal d’un « ninja ». La scène se déroule dans un camp militaire de la Force de l’Union européenne (Eufor) à Banja Luka, dans le nord de la Bosnie, où Zoran se rend trois fois par semaine pour donner des cours aux soldats. Elle ne serait en rien particulière si le maître et ses élèves n’avaient pas servi, il y a plus de 10 ans, dans des camps ennemis. Avant la fin de la guerre interethnique de Bosnie, les avions de l’OTAN avaient bombardé des positions des forces serbes bosniaques pour obliger leurs dirigeants politiques à négocier un accord de paix. Depuis, ce souvenir pèse fortement sur les relations entre les Serbes et les militaires occidentaux déployés en Bosnie, actuellement 6 300 hommes. Mais la présence de Zoran dans la base de l’Eufor témoigne d’une volonté d’apaiser les antipathies. « Un officier de l’Eufor cherchait une solution pour entraîner ses soldats aux arts martiaux et il a été surpris de découvrir l’existence de mon club de “ninjutsu” », explique Zoran. Il avoue qu’il a fallu un certain temps avant que la confiance ne s’installe. « J’avais un groupe de militaires occidentaux qui avaient peur d’être entraînés par un Serbe bosniaque. Au début, certains sont incrédules, mais avec le temps tout se passe bien », ajoute-t-il. Bishnu Gurung, un caporal d’origine népalaise dans l’armée britannique qui pratique déjà taekwondo et kendo, dit avoir été surpris par les techniques du « ninjutsu ». « Tout art martial est très bon, mais “ninjutsu” est peut-être le meilleur », estime-t-il. Pour l’officier britannique, Michael Durrant, les entraînements de ses troupes avec le maître serbe bosniaque ne sont qu’un exemple de l’amélioration de la situation en Bosnie. « Dix ans avant, il y avait une certaine animosité, mais les habitants sont maintenant plus amicaux et nous sommes mieux intégrés au sein de la société », dit-il. Dans la salle d’entraînement, pendant un moment de repos, le maître bosniaque explique que les secrets de cet art ne peuvent pas être partagés à qui que ce soit. « Les personnes ayant un casier judiciaire ainsi que celles qui souffrent de problèmes psychiques ne sont pas acceptées », assure-t-il. À Banja Luka, dans l’unique club de « ninjutsu » en Bosnie, 20 garçons et trois filles sont entraînés par le maître Mijic. « Les filles sont souvent plus habiles à se servir des techniques d’un “ninja” grâce à la subtilité de leurs mouvements. Elle sont des combattantes bien plus efficaces, affirme-t-il. Mais, contrairement à ce que vous pouvez voir dans des films hollywoodiens, l’objectif d’un “ninja” est la voie de la paix. Pratiquer le “ninjutsu” aide à mieux se sentir et à trouver la perfection spirituelle. »
« Concentrez-vous ! » ordonne Zoran Mijic, un Serbe bosniaque expert en arts martiaux. Les élèves qui lui obéissent sont d’anciens ennemis de la guerre de Bosnie (1992-1995), soldats de pays membres de l’OTAN, aujourd’hui en mission de maintien de la paix sous drapeau européen.
Zoran Mijic, ancien militaire au sein des forces serbes bosniaques et maître de « ninjutsu »,...