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Actualités - RENCONTRE

RENCONTRE - Droit, poésie, musique et cinéma Pour Nadim Bou Khalil, «un poète, c’est quelqu’un qui monopolise le réel»

Vingt-huit ans et toute la fougue de la terre. Cheveux noirs drus, polo moulant à ras le cou, voix argentée, sourcils à la tartare pour un regard bridé, épaules de rugbyman (et pourtant c’est d’un footballeur chevronné qu’il s’agit), silhouette de sportif accompli, «lap-top» glissé en bandoulière dans sa housse, bras chargés de plaquettes de poésie et de CD dans sa pochette, voilà un citoyen pressé de quitter la ville… Quitter Beyrouth pour Paris où la vie culturelle, on le convient et pour le moins qu’on puisse dire, est différente! Qui aurait cru que ce jeune homme dans le vent, parfaitement enfant de son siècle, est un avocat doublé d’un poète et d’un compositeur? Un jeune homme pour qui le verbe est «essentiel», qui rêve de voir ses partitions en tête d’affiche et qui, de surcroît, est déjà nanti d’un beau petit parcours. C’est ainsi que se présente Nadim Bou Khalil, qui éclate littéralement de joie et ne tient plus sur place car son visa pour la France vient de lui être délivré. Il a hâte de rejoindre les bancs de l’École Alfred Cortot, où l’on enseigne la musique pour films. Lui qui a déjà pourtant à son actif plus d’une narration musicale qui accompagne la pellicule du septième art… Flash sur ce jeune homme pressé de vivre et de créer. Au cours de la rencontre, les mots et les confidences cernent en douce des ambitions littéraires, artistiques et des projets d’avenir. Un avenir où musique et poésie sont omniprésentes. Exit le barreau donc! Dans une famille où tout le monde fait de la musique, chante et écrit, il était presque normal que Nadim Bou Khalil aborde sérieusement la musique à l’âge de cinq ans. Solfège et puis piano, guitare, saxo. «Mais le rythme d’une classe est trop lent pour moi, explique-t-il. C’est pour cela qu’après le Conservatoire, j’ai suivi des cours de fugue, contrepointe et harmonie avec Toufic Succar. Je suis non conventionnel en tout et polyvalent: la preuve, mes nombreux choix! Transparent et franc, je me considère comme une ligne droite… Je ne veux pas faire de concession. Je veux consacrer ma vie à l’art.» Des mots aux notes, du Parnasse aux partitions Voilà, les mots sont lâchés. Poésie d’abord et avant toute chose, comme dirait Verlaine de la musique. Nadim Bou Khalil, «fanatique de la poésie, féru de Paul Eluard et des surréalistes en général», comme il se définit volontiers, vient de signer sa quatrième plaquette de poésie, Mal de terre, au dernier Salon du livre à Beyrouth. Il est l’invité du Salon du livre à Paris pour cette année. Côté cinéma, on énumère sa musique qu’on écoute déjà dans les salles obscures: Maid in Lebanon de Corinne Chaoui (récente projection au Madina), Leila’s Picture de Pierre Salloum, Nour, produit par la communauté Sainte-Famille, Hi de Joe Safi. Last but not least, si vous tombez sur votre petit écran sur les génériques de présentations et nouvelles de la chaîne irakienne al-Sumaria, c’est encore lui! Par ailleurs, tous les téléspectateurs qui ont aimé la sympathique et farfelue «Iso la blonde» de Bass Matt Watan (désopilante émission du petit écran sur les inqualifiables et caricaturales mœurs politiques du pays et de la région, signée Charbel Khalil) seront étonnés de découvrir que Zeina Daccache, alias Iso, est une piquante brune qui chante les textes et la musique, en arabe dialectal, de Nadim Bou Khalil, qui taquine les muses en notes et rimes populaires orientales. Pour preuve, ce CD, Zeina min Wakta (Zeina depuis ce temps), déjà dans les bacs des cédèthèques. Et tant pis si l’on est plus amusé par les mimiques de la comédienne que par ses modulations hasardeuses dans le chant. Aujourd’hui, à la veille de partir pour la Ville lumière, Nadim Bou Khalil prépare son porte-folio musical, avec différents thèmes qui seront joués par l’Orchestre symphonique national de l’Ukraine, dirigé par Sirenko. «Mon but, dit il, est de frapper aux portes des pays de l’Ouest pour qu’on joue ma musique. En préparation aussi des génériques pour TV étrangères et arabes.» «Ma musique, comme ma poésie, confie-t-il, se résume en quelques ingrédients: de la frivolité, de l’humour noir, du lyrisme, de la sensibilité. Ce que j’aime en musique? Le jazz!» «J’ai une oreille dissonante, souligne-t-il en rigolant. Il y a du beau dans la dissonance… dont j’aime la “mélodicité”, si l’on peut s’exprimer ainsi. Mais par-dessus tout, j’aime Mozart et Chopin pour le piano.» Et la poésie continuera-t-elle à fleurir dans le cœur de ce trouvère des temps modernes? «Bien sûr, je ne conçois pas ma vie sans poésie. Ma poésie est liée au factuel. Un poète, c’est quelqu’un qui monopolise le réel et la poésie, c’est une sorte de lentille de caméra…» Edgar DAVIDIAN

Vingt-huit ans et toute la fougue de la terre. Cheveux noirs drus, polo moulant à ras le cou, voix argentée, sourcils à la tartare pour un regard bridé, épaules de rugbyman (et pourtant c’est d’un footballeur chevronné qu’il s’agit), silhouette de sportif accompli, «lap-top» glissé en bandoulière dans sa housse, bras chargés de plaquettes de poésie et de CD dans...