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Actualités - OPINION

LE POINT (en) Jeux électoraux

Deux ombres planent sur les élections prévues le 28 mars en Israël : celles d’Ariel Sharon, dans le coma depuis sa seconde attaque cérébrale, la plus grave, subie le 5 janvier ; celle, tout aussi omniprésente, du Hamas, dont le triomphe lors des législatives du 25 janvier a désarçonné tout le monde dans un pays confortablement installé dans la fausse certitude d’avoir une longueur d’avance sur l’ennemi mais où nul n’avait su prévoir un tel résultat. Tant bien que mal, chacun a tenté, un moment, de faire comme s’il ne s’était rien passé à ces deux dates. Comme si, à trois semaines d’intervalle, deux événements d’une portée qui demeure incalculable pour l’heure ne s’étaient pas produits, bouleversant tous les plans soigneusement établis. Jusqu’alors, les choses paraissaient claires : le Kadima se préparait à une victoire éclair ; le Likoud allait s’efforcer de recoller les morceaux de sa gloire éclatée ; les travaillistes enfin se promettaient sans trop y croire de jouer les trouble-fêtes. Et la cohorte des sans-grade rêvait déjà, en cas de victoire d’un des trois grands camps en présence, de marchander chèrement l’apport indispensable qu’ils allaient représenter pour une majorité un tant soit peu viable, sinon cohérente. Tout a changé en ce début de semaine, avec le coup d’envoi de la campagne, placée sous le signe des images et des slogans négatifs, un style que toutes les démocraties feignent d’abhorrer mais qu’elles pratiquent allègrement. Ainsi d’Amir Peretz, le successeur de Shimon Pérès. Regardez-le en photo, vous dit-on, n’est-ce pas qu’il ressemble à s’y méprendre au Petit Père des peuples, le regretté Joseph Staline ? Ehud Olmert, lui, a déjà été affublé d’un sobriquet qui se veut dévastateur : Smol (gauche en hébreu) mert. Benjamin Netanyahu, toujours à la traîne, a attendu quelque peu avant d’encaisser les premières railleries pour son surnom de « Bibi » qui, paraît-il, le fait grincer des dents. Pour le reste, qui est l’essentiel, les programmes promettent tous des lendemains qui chantent, avec le plein emploi et la sécurité assurée. Les statistiques sont à l’image de la situation, c’est-à-dire fluctuantes. À croire que le nouveau parti créé par « Arik » n’a plus la cote, alors que son fondateur lutte contre la mort, que même s’il ressuscite rien n’indique qu’il sera en mesure de se remettre à faire de la politique et que son successeur, l’actuel Premier ministre par intérim, a l’air plutôt falot. Si la lune de miel est terminée pour celui-ci, que l’on n’aille surtout pas croire que le malheur de Kadima – tout relatif d’ailleurs puisqu’il continue d’être crédité de 37 députés – fait le bonheur de ses deux principaux adversaires, lesquels demeurent à la traîne dans les sondages, avec, pour eux, un total de 33 députés. Mais à qui donc profite le flou actuel ? Aux petites formations comme le Parti national religieux, le Shass ou encore le Judaïsme unifié de la Torah qui n’en finissent pas de glaner les miettes abandonnées par les grands. Le jugement formulé le mois dernier par Naomi Chazan a provoqué maints froncements de sourcils dans le landernau politique. S’adressant à un parterre prestigieux réuni au Royal Institute of International Affairs de Londres, cette ancienne vice-présidente de la Knesset, revenue depuis à ses premières amours universitaires, a prévu que la déferlante islamiste lors de la consultation palestinienne du début de l’année allait peser lourd dans la balance et, curieusement, hâter le démantèlement de certaines colonies. Une prédiction confirmée par Avi Dichter, un ex-dirigeant du service de sécurité du Shin Beth, qui vient d’apporter sur le sujet d’utiles précisions. En l’absence d’un interlocuteur valable, a-il fait savoir, l’État hébreu devra déterminer seul le tracé de ses frontières, un processus qui prendra quatre ans. Dans une première phase, a révélé le Yedioth Aharonoth, dix-sept des 120 implantations créées en Cisjordanie seront supprimées, ce qui signifie le reclassement de 16 000 des 254 000 personnes formant l’ensemble de la population des points de peuplement. Il est évident que la pilule ainsi annoncée est plutôt amère. Comme pour la dorer, le ministre de la Défense, Shaul Mofaz, a menacé de poursuivre les liquidations ciblées visant les radicaux palestiniens, ceux du Mouvement de la résistance islamique tout comme les radicaux du Jihad. Mais un tel langage ne suffira pas à assurer le succès de l’équipe au pouvoir. C’est pourquoi, dans la grisaille qui s’est abattue sur le paysage, les adversaires fourbissent de nouvelles armes qu’ils exhiberont en temps opportun. Nul n’en fait mystère : il s’agira de quelques-uns de ces scandales dont les Israéliens sont particulièrement friands. Et au jeu peu ragoûtant des coups bas, devinez qui est le grand perdant… Christian MERVILLE
Deux ombres planent sur les élections prévues le 28 mars en Israël : celles d’Ariel Sharon, dans le coma depuis sa seconde attaque cérébrale, la plus grave, subie le 5 janvier ; celle, tout aussi omniprésente, du Hamas, dont le triomphe lors des législatives du 25 janvier a désarçonné tout le monde dans un pays confortablement installé dans la fausse certitude d’avoir...