Rechercher
Rechercher

Actualités

EXPOSITION - À la Planète de la découverte, jusqu’au 4 mars Les ténèbres lumineuses de Ali Kaaf

Entre visions illusoires et illusions d’optique, les œuvres de Ali Kaaf, exposées à la Planète de la découverte jusqu’au 4 mars, ne sont que l’exploration artistique intime et personnelle de l’artiste. Dans ces magmas monochromes, la dissolution et l’émergence des formes et des lumières se confondent ou s’annihilent simultanément pour laisser place à des espaces encore vierges, sensoriels et immatériels. Une infinité d’espaces inexplorés. Le choix de Ali Kaaf s’est porté sur la lettre k, sorte d’abréviation de même sonorité en arabe que « kaaf » .Selon Marwan Kassab, le peintre, qui a aussi été son maître, cette lettre (toujours en arabe) fait allusion au fil conducteur qui dicte la démarche artistique de Ali Kaaf : le destin (« kadar »), les multiples possibilités (« kad ») ainsi que la libre décision (« al karar »).Trois termes distincts mais qui résument parfaitement le parcours atypique de ce peintre . Kaaf… comme destin Né en Algérie, mais syrien de nationalité, Ali Kaaf passe son enfance en Syrie avant de venir à Beyrouth y poursuivre des études en beaux-arts à l’Université libanaise. En 1999, il part à Amman suivre un cursus à « Darat al-founoun » sous la supervision de Marwan. Le courant passe de suite et le maître invite le jeune académicien à le rejoindre à Berlin. Quatre années de hautes études à l’Académie des beaux-arts dans la capitale allemande, sous la tutelle d’abord de Marwan puis de Rebecca Horn, éminente professeure. Et au bout, le prestigieux prix allemand « Daad » en 2004. Aujourd’hui, les œuvres exposées marquent le retour, il y a six mois à Beyrouth, dans le cadre du programme d’artistes en résidence. « Assimilé à la sculpture et aux techniques multimédias, mon travail, qui se situe aux confins de la peinture, est l’aboutissement des explorations élaborées auparavant en Allemagne », souligne-t-il . Si « Ras » est le nom de l’ensemble des opérations réalisées sur les œuvres, celles-ci demeurent pourtant sans titre, laissant toute liberté de réflexion et d’interprétation. Un processus enclenché à partir de recherches sur le support et la couleur (qui sont l’essence même de la peinture), et où la représentation figurative va s’effacer peu à peu au profit d’espaces abstraits et par la suite tridimensionnels. Les formes deviennent ainsi anonymes, leurs rapports aussi, créant simplement une surface active capable d’établir la connexion visuelle avec le spectateur. Un engagement absolu Dans une lutte constante pour affirmer la spécificité de son art, l’artiste instaure une dialectique purement formelle qui s’éloigne de tout discours politique ou littéraire «Et même s’il en existe un, dit-il, c’est sûrement non intentionnel . » Cette lutte se traduira par un combat continu entre noir envahissant et blancheur phagocytée, ténèbres et lumière, salissures qui maculent la surface à l’effet pourtant cathartique. Et finalement, l’éternel corps à corps entre la mort génératrice de vie. Des autoportraits photographiques représentant l’artiste dissimulé par une pierre, une étoffe, une main, suite aux photos prises à Berlin, des diapositives à la gélatine ouverte par des lacérations et des brûlures sur papier carton; autant de manipulations techniques qui se rattachent au physicalisme de la peinture, et évoquent à la fois cet affrontement entre le matériel et l’immatériel. Sur papiers de grand et moyen format, Ali Kaaf se hasarde dans cette aventure muni de pigments métalliques, d’encre de Chine, de graphite, et va entraîner l’œil vers des espaces tantôt charbonneux, tantôt lumineux, vers des zones infinies et encore inexplorées. « Comme dans un jeu, un exercice ou une prière, je fais face à mon œuvre. Sur le support qui se consume et s’ouvre comme une plaie béante, je contrôle les accidents et à partir de cet instant fragile, tout génère ou se dégénère. » Comme un funambule, l’artiste se balance sur un fil, improvisant les gestes mais maîtrisant les mouvements « Je connais trop les matières que j’utilise, affirme-t-il. Je les ai même domestiquées. Par ailleurs, ce sont elles qui m’ouvrent des lucarnes vers des mondes jusque-là dissimulés.» Ali Kaaf a choisi la voie difficile, celle des possibilités, des incertitudes, des doutes et des présomptions, mais celle aussi qui mène à l’affirmation d’une identité d’artiste « sui generis ». Colette KHALAF
Entre visions illusoires et illusions d’optique, les œuvres de Ali Kaaf, exposées à la Planète de la découverte jusqu’au 4 mars, ne sont que l’exploration artistique intime et personnelle de l’artiste. Dans ces magmas monochromes, la dissolution et l’émergence des formes et des lumières se confondent ou s’annihilent simultanément pour laisser place à des espaces...