À quand le nouveau Liban ?

Comme il fallait le prévoir, la manifestation du dimanche 5 février organisée à Beyrouth pour protester contre la publication, par un journal danois, d’une caricature offensante à l’égard du prophète Mohammad a tourné à la quasi-insurrection. Cette manifestation a été infiltrée par les ennemis du Liban qui ont saccagé des habitations et des voitures à Achrafieh, après avoir mis le feu, comme à Damas, au bâtiment abritant le consulat danois dans la capitale libanaise. Une fois de plus, l’analyse effectuée, à la fin des années quarante, par Georges Naccache du problème libanais et de la convivialité islamo-chrétienne revient à l’esprit ; l’indépendance nationale a, aujourd’hui, 63 ans et on peut dire que chaque partie continue de « s’oxygéner » de la crainte de l’autre. Sans oublier les dizaines de milliers de morts que cela a déjà coûté, l’émigration massive qui continue de priver le pays de ses meilleurs éléments, alors que le Liban demeure un terrain ouvert à tout pays moyen-oriental en quête d’expériences politiques. Avec le départ de l’armée syrienne, le Liban est entré dans une nouvelle ère d’indépendance ; faut-il donc s’attendre toujours à un autre et cynique scénario d’une manifestation face à une autre, pour réaliser que l’heure est venue de régler le problème libanais à la base ? Combien de temps encore le peuple libanais peut-il attendre la consolidation d’une entité nationale qui ne craint pas de vivre sa réelle indentité ? Dans pratiquement tous les pays arabes, ainsi que dans les communautés musulmanes d’outre-mer, les réactions contre les caricatures offensantes ont été mesurées ; pourquoi donc faut-il que le Liban soit « plus royaliste que le roi » ? Le moment est certes venu de concevoir et de mettre en pratique une œuvre de décentralisation politique et administrative s’inspirant de la réalité démographique du pays, avec des dirigeants à la hauteur de leur mission, en vue d’éviter ces secousses périodiques injustifiées qui freinent son véritable développement dans tous les secteurs. Et cela avec des partis politiques qui auraient des programmes de travail réels à offrir à l’ensemble des Libanais. Gaby Jean CHAMI