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Actualités - OPINION

Tribune Benoît XVI et le Liban : dans la continuité de Jean-Paul II

Par Daoud SAYEGH Le 10 mai 1997, les Libanais massés dans les rues de Beyrouth ont démontré, pour la première fois, qu’ils étaient capables de se rassembler, de s’exprimer et même de réclamer tout haut, avec la vitalité de ceux qui ont une cause, leur volonté de sortir du temps du silence imposé durant de longues années. Ce jour-là, Jean-Paul II effectuait sa visite historique au Liban. Un homme d’Église, commentant ce rassemblement populaire sans précédent dans l’histoire du Liban, n’hésita pas à affirmer que les Libanais étaient « dans le silence du secret », qu’ils attendaient leur heure. C’était peut-être un prélude à ce qui s’est passé huit ans plus tard, le 14 mars 2005, lorsque les Libanais se sont révoltés, après l’assassinat du président Rafic Hariri, et que plus d’un million et demi d’entre eux se rassemblèrent sur la place des Martyrs. Ceux qui se rappellent encore la rencontre du pape avec les jeunes à Harissa ne peuvent oublier que ces jeunes criaient plus qu’ils n’acclamaient. Parce que, autour de ce visage lumineux, une sorte de miracle s’était produit, lorsque le pape, en lançant son regard sur la foule des jeunes rassemblés, s’était exclamé: « Quel bel horizon ! » Car, au-delà de ces jeunes, se profilait l’horizon du temps, véritable annonciateur des lendemains, de l’avenir et de l’espoir. Jean-Paul Il n’éprouva pas le besoin de répéter devant les Libanais ce qu’il avait dit le jour de son avènement : « N’ayez pas peur. » Car qu’étaient sa visite au Liban, dont la cause fut l’un des engagements majeurs de son pontificat, et sa présentation de l’Exhortation apostolique, fruit des travaux du Synode pour le Liban en 1995, sinon une invitation aux Libanais à affronter l’avenir avec la détermination des croyants ? C’est pourquoi les Libanais, toutes confessions confondues, entourent Jean-Paul II d’un halo de considération et de respect. C’est qu’il les avait perçus dans leur diversité, une diversité qu’il a aimée et qui fut l’objet de nombre de ses messages et positions sur le Liban. La disparition de Jean-Paul II fut perçue par tous comme une grande perte. Mais le Saint-Siège demeure. Et voici le pape Benoît XVI qui reprend le flambeau, pour assurer la continuité du message de l’Église avec tous les problèmes qu’il comporte. S’il est encore tôt pour déceler chez le nouveau pape les constantes héritées de son prédécesseur, il est cependant certain que les justes causes auront la priorité dans son programme d’action. Avec un style différent peut-être, le saint-père se penchera sur toutes les questions relatives à la paix, à la justice, à la convivialité et à la solidarité. Et parmi les justes causes, le Liban figure en bonne place. Le jour de Noël, le pape se contenta d’évoquer le Liban dans sa bénédiction urbi et orbi. En s’adressant le 9 janvier au corps diplomatique accrédité près le Saint-Siège, en présence de 170 ambassadeurs représentant la plupart des pays du monde, il s’est par contre exprimé plus longuement sur le Liban, disant : « Ma pensée se tourne spontanément vers le Liban, dont la population doit retrouver, avec aussi le soutien de la solidarité internationale, sa vocation historique en faveur de la collaboration sincère et fructueuse entre les communautés de foi différente. » Si l’allusion au Liban passa inaperçue de la plupart des Libanais, elle n’en démontre pas moins deux choses : la première est que l’intérêt que le Saint-Siège porte au Liban est une constante dans sa politique étrangère ; la seconde est que le pape, tout en renonçant à l’expression « Liban message », trop fréquemment utilisé dans le discours interne libanais, n’a cependant pas renoncé à son sens profond, qui n’est autre que la vocation historique du Liban. La politique du Vatican, sous le pontificat de Benoît XVI, tout en étant d’un style différent de celui auquel nous a habitués le pape disparu, conserve cependant son sens le plus profond. Le Liban reste, dans la conscience du saint-père, une expérience humaine sur la réussite de laquelle parie le Vatican, afin qu’elle soit un modèle pour les sociétés multiformes, dans lesquelles les chrétiens vivent en paix avec leurs frères musulmans, surtout dans cet Orient très troublé. Car le Vatican, qui prêche la justice, la paix, la modération et la compréhension de l’autre, considère le Liban comme le reflet de ces valeurs. C’est pour cette raison que le Liban a joui de l’intérêt constant de Jean-Paul II. Et, sur ce plan, Benoît XVI s’inscrit dans sa continuité.
Par Daoud SAYEGH

Le 10 mai 1997, les Libanais massés dans les rues de Beyrouth ont démontré, pour la première fois, qu’ils étaient capables de se rassembler, de s’exprimer et même de réclamer tout haut, avec la vitalité de ceux qui ont une cause, leur volonté de sortir du temps du silence imposé durant de longues années.
Ce jour-là, Jean-Paul II effectuait sa visite...