CORRESPONDANCE La Renwick Gallery sort l’argenterie américaine du début du XXe siècle

WASHINGTON- Irène MOSALLI «Modernisme et argenterie américaine: design du XXe siècle» est une exposition organisée par la Renwick Gallery à Washington qui a sorti l’argenterie! Cette exposition donne à voir tout ce qui s’est fait de plus beau dans ce domaine au pays de l’Oncle Sam à cette époque. De plus, les 200 pièces présentées relèvent du design industriel. Leurs formes frappantes et leurs lignes inhabituelles sont inspirées des grandes tendances artistiques du siècle dernier: Art déco, cubisme, l’âge de l’espace, le modernisme, le postmodernisme et le minimalisme. Elles marquent aussi la fin d’une industrie haut de gamme, comme l’explique l’un des responsables de cette manifestation: «Au XIXe siècle, la production de l’argenterie américaine, dominée par des noms tels que Tiffany, Gorham et Reed & Barton, était devenue la plus importante au monde. À la fin du XXe siècle, les pourvoyeurs de rêves lustrés les ont vus ternis par l’acier inoxydable (stainless steel). » Design vs acier inoxydable Jewel Stern, qui possédait une collection de ces spécimens qu’il a offerts au Dallas Museum of Art, précise: «Le concept de l’argenterie va de pair avec la culture. Même les restaurants les plus huppés ont renoncé aux nappes de table recherchées.» Autres temps, autres mœurs… Voilà pourquoi il ne faut pas blâmer les designers qui signent les œuvres composant cette exposition et qui avaient insufflé une certaine magnificence aux formes anciennes. Ainsi, Erik Magnussen, d’origine danoise, a créé, en 1927, un étonnant service à café en argent à facettes . Une création majeure qui n’avait pas été mise sur le marché par la firme qui l’avait acquise. Ailleurs, c’est un service à thé sphérique (1934) dû à l’architecte Eliel Saarinen, venu de Finlande. Plus tard, d’autres architectes allient l’esthétique contemporaine aux objets domestiques de luxe. Pour exemple, un broc à surface striée qui n’est ni brillante ni mate et une passoire à thé reproduisant un motif de dentelle Queen Anne et reposant sur une coupe en porcelaine. Cependant, à partir des années 60, la vente de l’argenterie a chuté de 50% au profit de l’acier inoxydable vu les différents changements sociaux: résidences devenues plus exiguës, réduction du personnel de maison, primauté du fonctionnel sur le raffinement et l’avalanche des matériaux faciles à entretenir et à remplacer. Ainsi, malgré son brio et sa sophistication, ce genre d’argenterie a perdu de son éclat aux yeux des consommateurs. Les boîtes à cigarettes en argent ne sont plus symboles de glamour et on ne joue plus d’originalité et de somptuosité en dressant la table. Et ce que les nouveaux mariés continuent à acquérir, c’est une argenterie de facture traditionnelle. L’un des responsables de l’exposition ajoute: «Dans ce domaine, le design contemporain n’a jamais nourri son homme.»