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PHOTOGRAPHIE - Jusqu’au 25 décembre, au Centre Jules, à Saifi Village «Écriture secrète», ou l’alchimie de Joanna Andraos

À la seule lueur des bougies qui éclairent les lieux, les photos sombres, mais paradoxalement lumineuses, de Joanna Andraos sont exposées à souk el-Najarin jusqu’au 25 décembre. Un local désaffecté, des murs revêtus de noir, un éclairage en clair-obscur. C’est dans cette mise en scène, entièrement réalisée par l’artiste, que Joanna Andraos a choisi de présenter ses photos argentiques, qui sont l’expression de ses écritures secrètes, ou « Rûna » en celtique. Une mise en scène théâtrale Un travail en profondeur qui ne s’arrête pas à la seule prise de vues, mais qui va fouiller dans les superpositions de négatifs pour créer des images aux couleurs surannées, traduisant le passage du temps et l’angoisse de la mort. Formée à l’École nationale de théâtre de Chaillot (Paris), la photographe a effectué une subtile mise en scène comprenant l’éclairage, le maquillage et le décor, avant la prise de vues finale. Deux femmes aux figures d’icônes ont posé pour elle sur fond de murs lézardés ou au milieu de fleurs fanées, nimbées d’une lumière digne des grands maîtres flamands. Pour l’artiste, ces modèles d’un moment sont les témoins d’un temps dévastateur, subi avec dignité. Ces divinités grecques quasi intemporelles, qui traversent l’histoire de l’humanité, semblent porter dans leurs regards mélancoliques les angoisses occultées du monde, celles que Joanna Andraos a voulu exorciser sur grains de pellicule. De la chimie… À travers une succession de techniques qui visent à dénaturer le cliché pour mieux exprimer sa réflexion intérieure, Andraos parvient à retransmettre ses propres écritures secrètes qui ne sont que les ruines de la mémoire collective : « Aussitôt la prise de vues terminée, je passe à une autre étape qui est l’essence même de mon travail. Un exercice que je qualifierai de chimique puisque je réussis à obtenir, par l’effet de la chaleur, du feu ou du froid, des métamorphoses au niveau de la nature même du négatif. Il m’arrive d’en brûler une partie rien que pour concrétiser mon idée initiale », affirme l’artiste. « Parfois même, j’introduis certains éléments, comme ces tulles qu’on remarque dans la photo, et me retrouve ainsi avec des négatifs chargés », poursuit-elle. Les clichés développés sont alors encadrés dans une sorte de halo de lumière et de flottement volontaire qui accentue l’impression de la fugacité du temps. Témoignant de la fatalité du destin de l’homme, ces négatifs en sont aussi l’otage, puisque certains incidents imprévisibles peuvent détériorer l’œuvre. « Mais jusque-là, affirme l’artiste, mon expérience m’a permis d’éviter ce genre de surprises désagréables.» Les œuvres de Joanna Andraos charrient des effluves du passé, des couches de souvenirs et des rêves enfouis. Elles s’approprient, avec force, la mémoire. Elles sont le résultat d’un travail intéressant à découvrir. Colette KHALAF
À la seule lueur des bougies qui éclairent les lieux, les photos sombres, mais paradoxalement lumineuses, de Joanna Andraos sont exposées à souk el-Najarin jusqu’au 25 décembre.
Un local désaffecté, des murs revêtus de noir, un éclairage en clair-obscur. C’est dans cette mise en scène, entièrement réalisée par l’artiste, que Joanna Andraos a choisi de présenter...