EXPOSITION Annie Kurkdjian au Goethe Institut : noir de noir

Attention, talent ! Au Goethe Institut, les travaux d’une jeune artiste diplômée en gestion, peinture, psychologie et théologie. Annie Kurkdjian y expose quarante toiles. Vingt-deux huiles de tailles variées et une vingtaine d’œuvres graphiques, en pastel, crayon et acrylique. L’artiste peint des personnages et des paysages, « sans soleil » (titre de l’exposition). Il fait effectivement nuit dans ces œuvres. Le soleil, synonyme de vie, de clarté, d’ouverture, est absent des natures mortes. Mais l’obscurité n’est pas uniquement dans les couleurs. Elle se traduit dans la tristesse d’une expression faciale, dans la courbe d’un dos, dans un rictus amer. « Il s’agit de personnages impuissants, frustrés, damnés, aliénés par l’angoisse et la solitude », explique l’artiste. Kurkdjian peint aussi la femme. Recroquevillée de douleur, les jambes ouvertes, l’intimité exposée. « Elle est blessée dans sa pudeur. Elle n’est même pas en mesure de voir ce qui lui arrive pour se protéger. L’absurde devient facile. Elle est entièrement sous la merci du voyageur. Pourtant, le tableau est calme. L’équilibre est partout, la sérénité est là, malgré la grande douleur, et la symétrie est presque parfaite. » Annie Kurkdjian affirme peindre pour tromper l’ennui. Cette mélancolie et cette lassitude lui viendraient du fait que tout ce qui est en elle et tout ce qui l’entoure est mort. « Ces choses meurent au moment où je pose mon regard sur elles. Est-ce moi qui les tue ou meurent-elles d’elles-mêmes, je ne sais pas. » Et d’ajouter : « Je sens que la mort travaille pour estomper mes détails comme elle fait avec toutes les autres choses. Je cherche une voie pour fuir tout cela, un horizon qui me fera marcher toujours en avant, vers l’autre qui est vivant. Je cherche cet horizon partout et toujours. » À suivre donc. M.G.H.