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Richard Millet signera son ouvrage, «Le goût des femmes laides», aujourd’hui vendredi 11, à 19 heures au stand de la librairie Antoine La dictature de la beauté

Ce n’est pas son premier voyage au Liban. « Je suis un peu chez moi ! » avoue Richard Millet en parlant de Beyrouth dont il connaît chaque rue, de Badaro, pour y avoir vécu de 6 à 14 ans, et dont il se souvient de chaque détail. « Depuis 1994, je viens une à deux fois par an. » Cette fois-ci, l’écrivain, critique musical et membre du comité de Gallimard, nous fait le bonheur d’être là pour présenter son trente-troisième livre, « Le goût des femmes laides ». «J’étais l’année dernière sur une plage, raconte Richard Millet, lorsque j’ai vu une naine, accompagnée d’un homme objectivement beau. Je me suis alors demandé: qu’est-ce qu’ils font ensemble et, au fond, qu’est-ce-que la laideur? J’ai écrit ce livre pour essayer de trouver des réponses.» Des réponses, il dit ne pas en avoir trouvé. Ou quelques-unes. Son narrateur, «qui n’est pas moi», précise-t-il, est laid. Ou du moins, c’est ainsi qu’il se voit depuis que sa mère le lui a assuré, alors qu’il n’était qu’un enfant. Ce jour-là, sa vie s’est figée. Quelque chose en lui s’est brisé. L’envie de grandir et peut-être d’être moins laid. S’est installée la certitude qu’il ne sera jamais un être comme les autres. Qu’il sera, pour toujours, un «orgueilleux par nécessité» qui doit vivre avec le lourd poids de son image, cette « forteresse de son visage ». Aucune compassion, dans ses interminables lignes, Millet aime les phrases longues qui «créent un rythme, comme une musique dans laquelle on peut prendre son temps et s’installer. Ce qui permet d’aller très loin dans l’esprit du personnage». Mais beaucoup d’ironie et de cruauté, la plus forte étant celle du narrateur lui-même puis celle de sa sœur, sa complice, son miroir. «Il est condamné à être laid, poursuit l’auteur, car il est prisonnier de cette imagination qu’il a de cette laideur. Il a trouvé dans la laideur une manière d’être, la haine de soi. Il préfère être très laid que moyen.» «On peut toute sa vie, poursuit Millet, être blessé par quelque chose.» Souvenirs d’enfance Pourtant, Richard Millet n’est pas un homme laid. Même s’il avoue, ce Corrézien pur-sang, avec un sourire plein de charme, un accent aux résonances étonnamment bien de chez nous, ponctuées de «Yaané» surprenants: «J’étais un enfant très maigre et roux, avec des taches de rousseur sur les joues. Ce qui était inhabituel au Liban! J’ai eu beaucoup de mal avec le regard des autres sur moi.» Le Liban, ce pays d’adoption qu’il quitte en pleine puberté, et dont il dit: «Durant 27 ans, j’ai rêvé du Liban toutes les nuits. » Il écrira d’ailleurs deux romans sur le sujet, Beyrouth et Un balcon à Beyrouth, de même qu’une pièce de théâtre, L’accent impur, éditée par Dar an-Nahar. Très sensible à la beauté, et donc à la laideur, il poursuit: «Beyrouth est une ville fascinante, en perpétuel mouvement. On peut dire que c’est une femme laide qui a du charme!» Ironique et drôle, même quand il est très cruel, Richard Millet n’en garde pas moins une sensibilité extrême qu’il cultive et dévoile avec pudeur. Après Harcèlement littéraire où l’auteur a osé affirmer que «90% de la littérature française est nulle», l’excellent Le goût des femmes laides va certainement le réconcilier avec ses confrères et, on l’espère, avec le regard des autres. Carla HENOUD
Ce n’est pas son premier voyage au Liban. « Je suis un peu chez moi ! » avoue Richard Millet en parlant de Beyrouth dont il connaît chaque rue, de Badaro, pour y avoir vécu de 6 à 14 ans, et dont il se souvient de chaque détail. « Depuis 1994, je viens une à deux fois par an. » Cette fois-ci, l’écrivain, critique musical et membre du comité de Gallimard, nous fait le bonheur...