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Actualités - CHRONOLOGIE

Reportage À Noisy-le-Grand, les voitures brûlent, les machines à laver volent

Paris, d’Élie MASBOUNGI Dimanche, il est midi à Noisy-le-Grand. Comme dans d’autres banlieues de la petite couronne parisienne, la nuit précédente a été chaude. Ici, une machine à laver a été jetée d’un toit sur une patrouille de policiers. Une agression qui n’a, heureusement, pas fait de blessé, un des agents ayant vu à temps les jeunes pousser l’énorme appareil par- dessus la balustrade. Les « insurgés » – c’est ainsi qu’on appelle désormais les jeunes révoltés des banlieues – ont disparu à l’aube et reprendront probablement leur sinistre besogne à la tombée de la nuit. Un conseiller municipal tente d’apporter un soutien moral aux habitants hagards qui ont tous un drame à raconter. « Ma voiture, mon atelier, ma pharmacie »… On écoute et on tente de comprendre. Plus loin, Mohammed (dit Momo) se présente comme « un grand frère ». À savoir, un membre du quartier qui tente de se mêler aux délinquants afin de les raisonner et de prévenir de nouveaux actes de violence. En général, les journalistes, surtout ceux de la télévision, sont plutôt malvenus dans ces quartiers. Mais un journaliste arabophone rassure. Ce qui n’empêche pas que pour entrer dans la cité, il faille se faire passer pour un habitant d’un quartier voisin. Au milieu des rues désertes, jonchées de carcasses de voiture toujours fumantes, Mohammed explique le drame que vivent les jeunes des banlieues. « C’est la faute à Sarko », lâche-t-il, en faisant référence au ministre de l’Intérieur. Pourquoi ? « Il ne faut pas rouler les mécaniques ici… Il faut dialoguer et chercher les causes du mal », affirme ce « travailleur social ». Interrogé sur le rôle des imams des mosquées alentour, Momo assure qu’« ils font de leur mieux » et jure ses grands dieux qu’aucun mouvement islamiste n’est présent dans cette région. Mais il craint que les choses traînent, auquel cas, dit-il, « tout dérapage est possible et ce serait la catastrophe ». Dans cette zone chaude de Seine-Saint-Denis, une centaine de voitures ont été incendiées pour la seule nuit de samedi à dimanche, ainsi que des dizaines de commerces. Le gymnase de Noisy, un bâtiment de 2 000 mètres carrés, a également été réduit en cendres. Étant donné l’escalade des violences, les patrouilles de police sont désormais guidées par des hélicoptères qui les alertent en cas de mouvement suspect. C’est ainsi qu’au milieu de la journée, deux frères de 14 et 15 ans ont été arrêtés alors qu’ils tentaient d’incendier un camion. Selon les habitants qui ont pu voir les bandes de jeunes opérer en pleine nuit, la moyenne d’âge des délinquants serait de 14 ans. Devant les mairies des principales localités, des équipes de télévision, pour la plupart étrangères, attendent que quelque chose se passe. Ils resteront là toute la nuit, selon un cameraman finlandais. Durant les moments calmes, ces journalistes parlent éthique. « Notre présence peut-elle être de nature à inciter les “casseurs” ? » s’interroge un reporter radio italien. « Oui, le boulot doit être fait, et tant pis si cela les excite », lui répond un photographe. Dans l’après-midi, quelques jeunes sortent dans la rue, capuchon relevé pour ne pas être reconnus. Ils ont l’air d’être en mission de repérage, mais rien n’indique qu’il s’agit de bandes organisées obéissant à une hiérarchie. En début de soirée, un calme relatif régnait, même dans les cités « chaudes », probablement en raison de la brève apparition de Jacques Chirac à la télévision. Plusieurs bandes de jeunes s’attendaient toutefois à l’annonce de la démission de Nicolas Sarkozy, leur « ennemi public ». Mais face à la fermeté affichée par le président, une nouvelle nuit chaude était à craindre.
Paris, d’Élie MASBOUNGI

Dimanche, il est midi à Noisy-le-Grand. Comme dans d’autres banlieues de la petite couronne parisienne, la nuit précédente a été chaude. Ici, une machine à laver a été jetée d’un toit sur une patrouille de policiers. Une agression qui n’a, heureusement, pas fait de blessé, un des agents ayant vu à temps les jeunes pousser l’énorme appareil par-...