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Actualités - OPINION

Patriotes par définition, réalistes par vocation, sceptiques par conviction

1- Quelle est la place du Liban, aujourd’hui, sur l’échiquier politique international ? Le Liban n’est plus le même depuis le 14 mars 2005, date historique quand a soufflé un vent de liberté et d’espoir sur la population et surtout sur la jeunesse. La population libanaise est descendue dans les rues en masse pour formuler des exigences qui se sont réalisées dans des délais à imprimer dans le Livre des records (essentiellement le départ des forces syriennes du Liban). Des élections législatives, prévues de longue date, ont finalement eu lieu et à temps, renouvelant le Parlement (mais pas son président…) pour une durée de quatre ans. Le président de la République reste en place pour le moment, un nouveau Premier ministre a été nommé et a formé son gouvernement, paralysé momentanément. Une enquête internationale dirigée par le juge Mehlis est en cours, conformément aux exigences ou souhaits de la rue. Le général Aoun est de retour après un exil de quinze ans , il a été élu député, et Samir Geagea est sorti de prison , direction l’Europe pour que, officiellement, il se remette de ses onze années de détention. Sur le plan intérieur, un immense chantier, qui visiblement ne les effraie pas, attend les ministres en charge des dossiers : – redresser l’économie et les finances, rembourser les dettes colossales (si possible sans toucher aux véritables responsables qui sont, malheureusement, victimes de la corruption généralisée) ; – s’attaquer à l’infrastructure du pays ; – modifier la loi électorale pour l’élection des députés mais aussi du président de la République ; – remettre sur pied un système judiciaire et sécuritaire digne de confiance et indépendant de la politique ; – initier une politique de santé et sociale juste ainsi qu’une politique de l’environnement soucieuse de la nature. Sur le plan extérieur : – Tout d’abord concernant les relations avec ses voisins les plus proches (Syrie et Israël ) qui tous deux l’avaient envahi, il convient de souligner qu’on n’occupe pas un pays pendant 29 ans pour l’un et pendant 22 ans pour l’autre sans laisser des traces. Nous dédommagera-t-on un jour des pertes économiques et humaines provoquées par ces deux pays ? – Sur le plan régional, le Liban est membre de la Ligue arabe, ce qui ne veut pas dire grand-chose pour lui, à part pour le moment qu’il lui est possible de demander une aide économique... – Sur le plan international, il est membre de l’ONU et demande l’aide économique des États-Unis et de la Communauté européenne. Aux deux niveaux régional et international, il se trouve donc dans une situation de demandeur et non de décideur. Bref, le Liban est un tout petit pays de 10 452 kilomètres carrés qui, depuis trente ans, est ballotté au gré de desseins qui le dépassent, sans qu’il puisse rien maîtriser. Tantôt il attire l’attention du monde, tantôt il est relégué pour quelque temps aux oubliettes. Je me répète mais, le Liban ne maîtrise pas son destin puisque celui-ci est lié à la bonne volonté des super-Grands. Sur l’échiquier international, le Liban ne représente qu’un pion que l’on manipule à souhait, en fonction du jeu politico-stratégique. Il réagit à nombre de changements dans la région ; il se situe volontiers, et à moindre frais, dans une logique politique plus large, menée par les très Grands, soit directement, soit par l’intermédiaire de puissances régionales. Économiquement, le Liban aujourd’hui est en mauvaise posture : diplomatiquement il est inexistant, culturellement il voit ses acquis disparaître progressivement, militairement il est trop faible. Et politiquement... Interrogeons-nous : à quelle sauce allons-nous bientôt être mangés ? Qui demain décidera de notre avenir ? Qui sera notre tuteur ? 2- Comment pourrions-nous compter plus, à nos yeux et aux yeux du monde ? Il apparaît ainsi que malgré la volonté populaire de redevenir libre, incarnée un temps par l’immense manifestation du 14 mars, il y a fort à parier que le Liban ne sera plus jamais ce qu’il a été, et surtout à l’époque faste qui va de l’indépendance au début des années soixante-dix. La double négation islamo-chrétienne qui transparaît dans le pacte national a vécu. L’affirmation que la force du Liban, c’est sa faiblesse militaire a donné naissance à des milices paramilitaires de toutes les obédiences. Cette affirmation-là a vécu et a été vaincue. L’obstination maladive consistant à éviter tout recensement de la population pour ne pas voir la réalité en face de même que le fait de n’avoir jamais envisagé de comptabiliser les émigrés à travers le monde ont vécu. Indépendance rimant avec prospérité est une donnée réaliste, à condition que tout le monde soit concerné et que l’on se donne les moyens d’y parvenir. Nous avons autre chose en nous de plus valeureux que ce que nous avons bien voulu montrer en un spectacle macabre au monde durant ces trente dernières années. Ne nous leurrons pas : d’un côté, l’argument qui veut que pour une puissance démocratique, l’ordre externe qu’elle contribue à façonner reflète les principes sur lesquels reposent son ordre intérieur, ne tient pas, ou si peu. La moralité de l’exécutant ne compte pas quand la culpabilité de l’accusé, même à tort, a été établie (voir la guerre contre l’Irak). D’un autre côté, ne nous laissons pas berner par des idéaux impliquant ou excluant Dieu. Soyons sincères avec nous-mêmes et conformes à notre identité. Sommes-nous fiers de notre histoire ? Si oui, prouvons-le. Avons-nous des raisons de douter de la sincérité de nos compatriotes ? Si oui, crevons l’abcès, qu’ils le sachent et parlons-en. Idéalement, en comparaison avec les manifestations du 14 mars et suite aux attentats qui se sont produits depuis cette date – et dont le dernier en date visait May Chidiac – restés non élucidés, l’autre cas de figure suppose qu’un vaste mouvement de mobilisation, sans couverture extérieure cette fois-ci, aboutirait pourtant grâce à la mise en œuvre d’un projet de rassemblement national. Descendons dans la rue et exigeons ce que nous voulons réellement. Exigeons l’arrêt immédiat de la terreur, l’arrestation des commanditaires des attentats, la fin de l’état de non droit, les réformes profondes et sans tarder de l’État. Il faut faire peur aux semeurs de la terreur en recourant à la masse et à la force de conviction de tout un peuple qui se révolte contre l’inacceptable et qui exige le rétablissement du droit et de la paix. Soyons patriotes par définition, réalistes par vocation, mais sceptiques par conviction. Dr Riad JREIGE France

1- Quelle est la place du Liban, aujourd’hui, sur l’échiquier politique international ?
Le Liban n’est plus le même depuis le 14 mars 2005, date historique quand a soufflé un vent de liberté et d’espoir sur la population et surtout sur la jeunesse. La population libanaise est descendue dans les rues en masse pour formuler des exigences qui se sont réalisées dans des délais à...