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Actualités - CHRONOLOGIE

Archéologie - Quelque 250 000 pièces de l’époque des Cinq Dynasties chinoises ont été récupérées au large de l’Indonésie mille ans après, un trésor inestimable émerge des flots

Une équipe de plongeurs internationaux vient d’achever les fouilles d’un navire coulé au Xe siècle en mer de Java : leur butin, stocké à Djakarta, est susceptible de faire tourner la tête des archéologues et des grandes maisons de vente. Au terme de 24 000 plongées par 54 mètres de fond, les scaphandriers belges, français, australiens, allemands et britanniques ont en effet remonté un trésor. Il se décompose en 250 000 pièces, principalement des céramiques de l’époque des Cinq Dynasties chinoises (907-960), mais aussi des objets vraisemblablement apportés par des marchands arabes. Assiettes décorées de dragons, de perroquets et autres oiseaux, porcelaines blanches translucides, théières ornées de fleurs de lotus, plats au bord finement découpé, céladons à la glaçure intacte... ces richesses dessalent dans des bacs d’eau douce dans un entrepôt anonyme de Djakarta. Luc Heymans, le patron belge du chantier d’excavation, parle d’une « cargaison tout à fait exceptionnelle ». Il sort de boîtes en plastique divers chefs-d’œuvre, dont un miroir en bronze à l’envers sculpté, un moule avec le mot « Allah » calligraphié, un couvercle paré d’une biche délicatement ciselée et un petit poisson en cristal de roche. « Les Cinq Dynasties sont une époque sur laquelle il y a très peu d’informations et très peu de choses dans les musées. Cette épave comble un trou », dit-il à l’AFP. La visite-inventaire se poursuit avec de minuscules flasques à parfum, des jarres en terre cuite, des vases au col élancé et des verres colorés de la dynastie des Fatimides, qui régna il y a mille ans en Égypte. « Mon avant-dernier jour de plongée, j’ai repéré un endroit avec quelques tessons. Sous trente centimètres de vase, j’ai sorti un manche de sabre en or », relate Daniel Visnikar, chef plongeur de nationalité française. Près de 14 000 perles et une profusion de pierres précieuses ont été extraites de l’épave, coulée à 130 milles marins de Djakarta : plus de 4 000 rubis, environ 400 saphirs, plus de 2 200 grenats, selon M. Heymans. Les porcelaines « proviennent d’un four très spécial, un four impérial, peut-être de la province du Hebei dans le nord de la Chine », avance Peter Schwarz, un spécialiste allemand qui dédie ses journées à trier les céramiques. En étudiant des photos, Jean-Paul Desroches, conservateur au musée Guimet à Paris avait lancé : « Une épave du Xe siècle aussi riche, il y en a peu. » La rencontre de deux mondes Sur le plan historique, le trésor émergé témoigne de la rencontre entre le monde islamique, la Chine et l’Indonésie, qui était morcelée en royaumes, dont celui, bouddhiste, de Sriwijaya à Sumatra. Luc Heymans insiste sur la « transparence » du stockage, effectué « en suivant toute l’éthique archéologique » dans un archipel réputé pour son opacité dans ce domaine. « Chaque pièce est répertoriée et on sait de quel endroit du bateau elle provient. Chaque semaine on a envoyé (aux autorités) un DVD avec toutes les pièces photographiées et numérisées », assure-t-il. Le chantier de 18 mois a pourtant connu un coup d’arrêt : le 6 novembre 2004, une navette de la marine indonésienne avait brutalement chassé les plongeurs de leur barge ancrée en pleine mer. « Il est suspecté que des étrangers illégaux œuvrent à récupérer un trésor », avait alors expliqué l’Agence de protection du patrimoine sous-marin indonésien. L’imbroglio s’était résolu au terme de longues négociations. « Nous avons subi les attaques d’une société concurrente », affirme aujourd’hui M. Heymans en citant le nom d’un pilleur d’épaves connu en Asie du Sud-Est. Il garde secrète l’identité des « partenaires privés européens » qui financent sa société, Cosmix, enregistrée à Dubaï. Il évoque un budget de 5 millions d’euros et précise que l’État indonésien touchera 50 % du produit des ventes.
Une équipe de plongeurs internationaux vient d’achever les fouilles d’un navire coulé au Xe siècle en mer de Java : leur butin, stocké à Djakarta, est susceptible de faire tourner la tête des archéologues et des grandes maisons de vente.
Au terme de 24 000 plongées par 54 mètres de fond, les scaphandriers belges, français, australiens, allemands et britanniques ont en effet...