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Actualités - ANALYSE

ÉCLAIRAGE Les Kurdes et les chiites satisfaits, la classe politique circonspecte Les Irakiens s’interrogent sur le procès annoncé de Saddam Hussein

L’annonce du début du procès de Saddam Hussein le 19 octobre a été accueillie avec satisfaction par nombre de ses victimes, mais suscite de nombreuses interrogations dans la classe politique sur les raisons pour lesquelles il se limite à une affaire, en apparence, de second plan. Si, en général, les Kurdes et les chiites, principales victimes des années de fer du régime déchu, n’ont pas caché leur satisfaction à l’annonce dimanche du début du procès, d’autres hommes politiques restent circonspects. Ainsi l’ancien ministre des Droits de l’homme, Bakhtiar Amine, un Kurde qui dirige aujourd’hui une ONG de défense des droits humains, regrette ouvertement de voir le président déchu comparaître uniquement pour le massacre de villageois chiites, 143 au total, en 1982, après une attaque contre son convoi dans la localité de Doujaïl, au nord de Bagdad. « Il aurait fallu que le tribunal le juge (aussi) sur les autres dossiers pour établir la vérité sur cette période tragique », de plus de 30 ans pendant laquelle il a été le maître absolu de l’Irak, a-t-il déclaré. Officiellement, seul le dossier touchant au massacre de Doujaïl a été bouclé et les recherches de preuves contre Saddam Hussein et ses lieutenants se poursuivent, notamment pour les autres atrocités contres les Kurdes et les chiites. Avant l’annonce du début du procès, le chef des juges d’instruction du Tribunal spécial irakien (TSI), Raed Jouhi, s’était rendu au Kurdistan pour activer la procédure compliquée et laborieuse menée par deux bureaux régionaux de cette juridiction. En principe, le TSI dit disposer de milliers de documents établissant la responsabilité directe de Saddam Hussein et de ses adjoints dans le gazage des Kurdes du village de Halabja en 1988, qui avait fait 5 000 victimes, du massacre des membres de la tribu Barzani ou de l’opération Anfal, consistant à déplacer des centaines de Kurdes de leurs régions d’origine. Mais dans les faits, cette juridiction, créée par les Américains, tente de réunir de nouvelles preuves, ses responsables disant vouloir établir des dossiers en béton contre les responsables de l’ancien régime. Ainsi, les enquêteurs examinent les restes humains des fosses communes et interrogent les survivants des massacres, comme ils le font pour les chiites victimes de l’aveugle répression après leur soulèvement en 1991. Le choix de la date du procès est perçu par beaucoup comme politique. C’est ce qu’estime notamment une personnalité sunnite, qui a négocié le projet de Constitution, Saleh al-Motlak. « Le gouvernement est impatient de mettre Saddam Hussein en procès pour engranger un succès lors des élections » générales du 15 décembre, a déclaré cet homme politique qui s’impose comme l’un des porte-parole de sa communauté. Il affirme que les Irakiens n’ont aucune confiance dans le TSI et recommande de faire juger l’ancien dictateur par une juridiction internationale. « Nous voulons un procès juste, mais nous pensons que la justice ne peut pas être rendue par un tribunal irakien et cela pourrait conduire à plus de violences », a-t-il estimé. Les soupçons de ceux qui voient d’un mauvais œil cette procédure ont été alimentés par le fait que l’annonce de la date du procès a été faite par le gouvernement et non pas par le TSI lui-même. « L’annonce de la date du procès est illégale parce qu’elle a été faite par le porte-parole du gouvernement (irakien) et non par le tribunal. Leith Koubba n’est pas le porte-parole du tribunal », a ainsi estimé l’avocat jordanien Issam Ghazzawi, le porte-parole de l’équipe de défense de Saddam Hussein. M. Koubba a laissé entendre que Saddam Hussein pourrait être exécuté s’il est condamné à l’issue de son procès sans qu’il soit nécessaire de le faire juger pour d’autres affaires. La sentence devrait alors être validée par les trois membres de la présidence, dont le président Jalal Talabani, en principe opposé à la peine de mort mais qui peut déléguer sa signature à l’un de ses adjoints, comme il l’a fait récemment pour confirmer trois condamnations à mort. Francis CURTA (AFP)

L’annonce du début du procès de Saddam Hussein le 19 octobre a été accueillie avec satisfaction par nombre de ses victimes, mais suscite de nombreuses interrogations dans la classe politique sur les raisons pour lesquelles il se limite à une affaire, en apparence, de second plan. Si, en général, les Kurdes et les chiites, principales victimes des années de fer du régime déchu,...