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Actualités - CHRONOLOGIE

Patrimoine - Entre l’héritage des croisés et l’œuvre de l’architecte brésilien Oscar Niemeyer, une lourde tâche à assumer avec l’aide du WMF La citadelle de Hasbaya et la Foire de Tripoli sur la liste des 100 sites les plus menacés au monde(photos)

La Foire internationale de Tripoli, conçue par le célèbre architecte brésilien Oscar Niemeyer, et la citadelle de Hasbaya, prise aux croisés par les émirs Chéhab en 1170, ont été inscrites sur la liste des 100 sites les plus menacés au monde, par le World Monuments Watch. C’est ce qu’a annoncé, hier, le ministre de la Culture, Tarek Mitri, au cours d’une conférence de presse tenue au siège de son ministère, en présence de Assem Salam, président de l’Association pour la protection des sites et anciennes demeures (Apsad), Carla Chéhab, présidente de la Fondation libanaise pour la sauvegarde de la citadelle de Hasbaya, Jade Tabet, membre de l’association française « Patrimoine sans Frontières » et expert auprès du comité du Patrimoine mondial de l’Unesco, et des deux architectes, Georges Arbid et Misbah Rajab, qui ont présenté et commenté une projection de photos sur les deux sites. Étaient également présents à la conférence les ministres des Travaux publics et du Tourisme, Mohammed Safadi et Joe Sarkis, le député de Tripoli, Samir Jisr, le directeur général du ministère de la Culture, Omar Halablab, le directeur général des Antiquités, Frédéric Husseini, la directrice générale du Tourisme, Nada Sardouk, le président du conseil municipal de Tripoli, Abdel Kader Alamuddine, de Hasbaya, Kamel Abou Ghaida, la secrétaire générale du comité national de l’Unesco, Salwa Siniora, l’ancien ministre Amine Bizri, et Faïka Ouwayda, représentant la Fondation nationale du patrimoine, ainsi que le conseiller auprès de la Ligue Arabe, Ziad Chéhab. Tarek Mitri, qui a condamné fortement toute atteinte portée au patrimoine, a souligné que « les bâtiments modernes et les biens culturels font désormais partie de l’identité de notre pays ». « L’idée de préserver des monuments archéologiques mais aussi des bâtiments tels que la Foire internationale Rachid Karamé n’a pas pour but uniquement de sauvegarder les acquis du patrimoine mais vise également à défendre les intérêts des villes concernées par le patrimoine », a dit le ministre. « La notion d’héritage doit être élargie » et il convient de garder comme « traces de l’histoire » les différents courants architecturaux, témoins du modernisme des formes et des matériaux, et des réponses aux besoins de chaque période, a déclaré à son tour Assem Salam. L’ancien président de l’Ordre des architectes et ingénieurs et président de l’Association pour la protection des sites et anciennes demeures a annoncé à cette occasion son engagement dans un nouveau programme de sauvegarde du patrimoine architectural contemporain. À l’instar de Niemeyer qui a conçu la Foire de Tripoli, plusieurs architectes-urbanistes de renommée internationale ont signé de belles réalisations au Liban, a souligné Assem Salam à L’Orient-Le Jour, citant à titre d’exemples, le Suisse Alfred Roth et le Finlandais Alvar Alto (siège de Fransabank), Edward Stone (hôtel Phoenicia), André Wogenscky, associé de Le Corbusier dans les années 50 (ministère de la Défense et le Holiday Inn), André Lecomte (immeuble Azarieh), Ecochard (Collège protestant), Auguste Perret et Antoine Tabet (le Saint-Georges). Le président de l’Apsad a, par ailleurs, exhorté le ministre Mitri à formuler une nouvelle restructuration de son ministère, à préparer les lois nécessaires pour la préservation de l’héritage architectural, à collaborer avec la direction de l’Urbanisme pour établir un plan directeur permettant de juguler la dégradation du patrimoine historique et naturel, et à mettre un terme à l’ampleur des constructions sauvages qui défigurent le Liban. Garantir la survie de la citadelle de Hasbaya Quant à l’architecte Jade Tabet, représentant « Patrimoine sans Frontières », il devait expliquer que le World Monuments Funds, qui établit tous les deux ans une liste de 100 sites en danger, a pour but d’aider à la restauration des monuments. Mais pour obtenir l’assistance internationale et les fonds nécessaires aux grands travaux, l’État concerné et ses organismes locaux doivent proposer dans un délai de deux ans un plan de sauvegarde sérieux et rigoureux. Tabet a ensuite mis l’accent sur « la valeur architecturale exceptionnelle » de la Foire international de Tripoli, qu’il faudrait revitaliser en y organisant des activités culturelles. En un mot, le programme devrait s’intégrer à la conception architecturale de Niemeyer. Aussi à la question de savoir si la cité accueillera un projet Disneyland (comme il en a été question ces deux dernières années) Tabet fait-il observer que la cité, « une des plus belles œuvres de Niemeyer », mérite mieux qu’un parc d’attractions. Si le projet peut être positif pour l’économie de la capitale du Liban-Nord, il n’est pas une raison de démolir une œuvre majeure de notre patrimoine moderne. Prenant à son tour la parole, la présidente de la Fondation libanaise pour la sauvegarde de la citadelle de Hasbaya, Mme Chéhab, a rappelé qu’au lendemain de la libération du Liban-Sud, « notre fondation n’a cessé d’alerter les autorités libanaises et de sensibiliser les missions diplomatiques, les fonds internationaux et l’Unesco, sur l’urgence d’une intervention. Parallèlement, nous avons milité pour protéger la citadelle, en soumettant sa candidature sur la liste du WMF des 100 monuments les plus en danger dans le monde (…) Une opportunité pour garantir à la citadelle sa survie pour les générations futures ». Carla Chéhab devait par ailleurs faire un résumé historique de « cette forteresse croisée prise par les Chéhab au XIIe siècle » et qui « a été durant 700 ans la résidence des émirs qui gouvernèrent le Liban jusqu’au XIXe siècle. Ce monument d’une grande richesse architecturale pourrait servir de référence aux styles arabe, croisé, mamelouk et ottoman, qui, avec les siècles, s’y sont juxtaposés ». Carla Chéhab a conclu en soulignant que la citadelle est « l’élément majeur d’un circuit touristique qui donnerait au caza de Hasbaya une prospérité économique ». La forteresse, qui comprend six étages dont trois en sous-sol, a été construite en plusieurs étapes et sa structure tentaculaire se présente comme un mélange de styles et de techniques architecturales. L’ensemble comprend des demeures médiévales et une mosquée. De nos jours encore, sa propriété est partagée entre cinquante membres de la famille dont certains y résident en permanence. Mais les propriétaires n’occupent que 10 % de la superficie de ce monument historique et sont prêts à coopérer et à ouvrir leurs portes aux touristes, selon les dires de Mme Chéhab. Une projection de photos a révélé les splendeurs… mais aussi l’état désastreux de la citadelle. La Direction générale des antiquités a établi une étude préliminaire de l’état des lieux, a proposé un plan de sauvegarde… mais n’a pas les fonds nécessaires pour assurer les travaux de réhabilitation. Une foire d’un million de m2 C’est le Brésilien Oscar Niemeyer qui a conçu l’architecture de la Foire internationale de Tripoli. Grand sculpteur de l’espace, ancien collaborateur de Le Corbusier (ils ont signé conjointement la construction des sièges des ministères de l’Éducation et de la Santé à Rio de Janeiro), il est le créateur des principaux bâtiments de Brasilia et nombre de ses réalisations aux États-Unis et en Europe ont marqué depuis les années 30 jusqu’à aujourd’hui l’histoire de l’architecture internationale. Détenteur de prestigieux prix, tels que le « Gold American Institute of Architecture » (1970) et le « Pritzker Prize » (1998), il est aussi détenteur du prix japonais « Praemium imperiale 2004 », considéré comme une des récompenses artistiques les mieux cotées du monde et qui est à l’art ce que le Nobel est pour les sciences ou la littérature. Niemeyer est toujours en vie et continue, à 98 ans, à travailler. L’État libanais a vu grand en 1964 lorsqu’il a décidé d’édifier la Foire internationale de Tripoli en faisant appel à Oscar Niemeyer pour dessiner tous les plans de la cité – à laquelle on a donné le nom du président Rachid Karamé. Le projet, réalisé entre 1968 et 1974, se déploie sur un million de mètres carrés soit à peu près la superficie du centre-ville de Beyrouth. Il abrite plusieurs complexes dont une salle d’exposition de 20 000 m2, un auditorium aménagé pour accueillir plus de 1 500 personnes, un parc de stationnement d’une capacité de 3 500 voitures. Sur un plan d’eau de 16 500 m2, se dressent le pavillon libanais et le théâtre flottant, véritable sculpture qui se décline en une immense voûte s’élançant d’une seule courbe pour abriter une scène de 50 mètres de long et 20 mètres de large. Les espaces verts s’étalent sur 125 000 m2. M. M.

La Foire internationale de Tripoli, conçue par le célèbre architecte brésilien Oscar Niemeyer, et la citadelle de Hasbaya, prise aux croisés par les émirs Chéhab en 1170, ont été inscrites sur la liste des 100 sites les plus menacés au monde, par le World Monuments Watch. C’est ce qu’a annoncé, hier, le ministre de la Culture, Tarek Mitri, au cours d’une conférence de presse...