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Les cent jours de Siniora, un délai de grâce et un test de crédibilité

Le gouvernement de Fouad Siniora bénéficie d’un fort soutien extérieur. Mais il doit, dans le délai de cent jours qu’il s’est fixé, faire ses preuves. Donner corps aux engagements pris dans sa déclaration ministérielle et tenir les promesses de réformes faites lors de Paris II pour permettre la tenue d’une nouvelle conférence internationale d’assistance variée, à laquelle travaillent déjà, par de fréquentes concertations organisées dans des métropoles étrangères, des diplomates occidentaux accrédités chez nous, et des cadres qualifiés de leurs gouvernements respectifs. C’est par des mesures tangibles que le gouvernement Siniora doit initier, dans les semaines à venir, les réformes politiques, financières, administratives, économiques et sociales requises. Il doit prouver qu’il est bien à la hauteur de ses lourdes responsabilités. Et, surtout, qu’il opère sans tiraillements internes, sans ces luttes entre dirigeants qui ont fait avorter Paris II. La première forme d’assistance que le gouvernement libanais reçoit consiste dans la permissivité américaine. C’est-à-dire que Washington allège pour un temps ses pressions concernant la 1559, le désarmement du Hezbollah et des camps palestiniens. Que les USA donnent également du mou à la corde pour ce qui est de l’application de la récente résolution 1614, qui, tout en prorogeant de six mois le mandat de la Finul, enjoint aux Libanais de déployer leur armée le long de la ligne bleue, cela afin de stabiliser la région frontalière. Pour imposer à Israël, moyennant la normalisation du côté libanais, l’arrêt de ses continuelles transgressions, de ses violations quasi quotidiennes de l’espace aérien libanais. De sources informées concordantes, on indique que les États-Unis accordent aux Libanais jusqu’à la fin de l’année pour appliquer la 1559 en se mettant d’accord entre eux sur une solution qui permette le désarmement du Hezbollah et des camps sans risques d’explosion ou de remous intérieurs. Selon ces sources, Condoleezza Rice s’est montrée compréhensive quand les dirigeants libanais qu’elle a vus lors de sa visite à Beyrouth lui ont expliqué que ce pays respecte la légalité internationale, mais qu’on ne doit pas lui mettre le couteau sur la gorge et que ses délicates spécificités font qu’il doit évoluer avec prudence, par le dialogue positif, vers toute issue exigée. Ajoutant qu’il ne servirait à rien ni à personne que la paix civile libanaise vole en éclats par suite d’une application par la contrainte de la 1559. Ces arguments, concluent sur ce point les sources citées, ont paru convaincre Rice, qui a toutefois précisé que la 1559 a force de loi et doit finalement prendre corps, quitte pour les Libanais à ce que cela se fasse en douceur. Un autre dossier qui nécessite un dialogue interlibanais rapide autant que sérieux : le contentieux avec la Syrie. Indépendamment de son contenu, il est certain que les discordances sur la scène locale, et au sein même du nouveau pouvoir, nuisent à la défense de l’intérêt libanais bien compris. Que cela soit pour engager un bras de fer, si Damas nous y force, ou pour négocier, il est indispensable que la position libanaise soit bien soudée. C’est pourquoi il faut donc un dialogue intérieur rationnel pour définir les points et les constantes nationales à défendre. La curiosité de Rice D’autant que sur ce plan précis, qui ne concerne vraiment que les deux pays voisins, il faut quand même assurer une certaine étanchéité à la position libanaise face aux tentatives à peine voilées de certains Occidentaux de peser sur le dossier. Il se confirme en effet que Rice, rencontrant le président Lahoud, lui a parlé de la crise des frontières avec la Syrie en posant des questions sur les causes et en estimant que les prétextes avancés par la Syrie ne sont pas convaincants. Rice a cependant poussé la curiosité un peu trop loin, d’après les sources citées. En effet, sur ce problème de relations bilatérales, qui ne concerne pas son gouvernement, elle a été jusqu’à demander au chef de l’État libanais pourquoi il n’intervenait pas en personne. Pourquoi il n’entrait pas en contact avec son ami, le président Bachar el-Assad et pourquoi, le cas échéant, il n’allait pas à sa rencontre afin de desserrer l’étau étranglant l’économie libanaise. Le président Lahoud, indique un politicien informé, a répondu qu’il ne faut pas considérer la crise sous un seul angle, affirmant que dès lors il ne lui est pas possible d’ignorer l’inquiétude syrienne, les appréhensions sécuritaires qui ont motivé les mesures adoptées et ajoutant que le traitement du dossier doit se faire loin des feux de la rampe et des surenchères, dans le calme. Le président Lahoud a encore précisé, selon la même source, qu’il appartiendra au nouveau gouvernement de régler le problème du blocage frontalier, confirmant que pour sa propre part, il estime que les relations libano-syriennes doivent être institutionnelles et non personnalisées, qu’il doit y avoir des lignes ouvertes entre les départements en tant que tels, que son propre rôle est d’intervenir pour dénouer, le cas échéant, des négociations bloquées sur tel ou tel point. Quoi qu’il en soit, la crise est bien politique, le sécuritaire ou la logistique, invoqués par les Syriens, n’étant manifestement que des prétextes. Si le blocage reprend, résume un politicien libanais, c’est parce que la confiance manque du côté syrien. Il faut lever cet obstacle pour que le Liban puisse se consacrer à la préparation de la conférence internationale appelée à lui venir en aide en lançant le chantier des réformes. Mais aussi en confortant la démocratisation du pays par l’éviction du système militaro-sécuritaire qui le dominait. Philippe ABI-AKL
Le gouvernement de Fouad Siniora bénéficie d’un fort soutien extérieur. Mais il doit, dans le délai de cent jours qu’il s’est fixé, faire ses preuves. Donner corps aux engagements pris dans sa déclaration ministérielle et tenir les promesses de réformes faites lors de Paris II pour permettre la tenue d’une nouvelle conférence internationale d’assistance variée, à laquelle...