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Actualités - OPINION

Charm et maléfices

Il a décidément du ressort, Hosni Moubarak, qui convie ses pairs arabes à un sommet extraordinaire et urgent, consacré en grande partie à la lutte contre le terrorisme : mieux, qui les invite à le rejoindre le 3 août à Charm el-Cheikh, c’est-à-dire sur les lieux mêmes où ce fléau fauchait, il y a quelques jours à peine, des dizaines d’innocents. Il ne perd pas le nord non plus, Moubarak, qui, par la même occasion, promet aux électeurs la levée des lois d’urgence, en vigueur depuis 24 ans, au profit d’une nouvelle législation mieux adaptée à la lutte antiterroriste : admirables scrupules démocratiques qui honorent, bien qu’avec quelque retard, un raïs en place depuis près d’un quart de siècle, lui aussi, et que l’on voit cingler gaillardement vers un cinquième mandat. Il y va davantage, cependant, que de l’image touristique – ou démocratique – de l’Égypte, et ce n’est certes pas avec des sommets arabes que l’on pourra faire barrage à la terreur. Les rencontres au sommet, on en sait déjà toute la triste inanité, en effet : joutes oratoires parfois épiques, hypocrites embrassades, flots de résolutions condamnées à demeurer désespérément lettre morte, et à la prochaine ! Et puis surtout, les Arabes ne sont pas seuls à subir le catastrophique contrecoup d’une terreur d’autant plus odieuse qu’elle ose se réclamer de principes célestes : à la longue, c’est l’Islam tout entier qui risque de pâtir de ces barbares agissements. Pire, c’est la Oumma qui en définitive se trouve davantage menacée que le reste du monde. Et menacée, elle l’est deux fois plutôt qu’une. Car en Irak comme en Arabie saoudite, comme en Égypte, les criminels inspirés ne s’en prennent pas aux seuls Occidentaux, aux croisés, aux kouffar (mécréants), si tant est que l’on a le droit de distinguer entre créatures humaines. Dans les pays arabes ou musulmans, ces monstres n’hésitent pas à tuer des musulmans. Et dans les pays non musulmans, leurs crimes vouent fatalement à la suspicion, à la discrimination, au harcèlement et même à la persécution leurs propres et innocents coreligionnaires qui ont cherché à s’y assurer une existence décente ; et qui y jouissent, faut-il le rappeler, de tous ces droits civiques dont bon nombre n’auraient pu rêver dans leurs patries d’origine, livrées au règne des potentats, dictateurs et autres tyrans. Bien sûr, le monde arabo-musulman ne saurait être tenu pour responsable – et encore moins pour seul responsable – de ce mal tentaculaire qu’est le terrorisme. Mais c’est bien à lui qu’il appartient en priorité, qu’il incombe, d’extirper le cancer qui ronge son sein et dont il risque, bien davantage que le reste du monde, d’être la première, la principale, la véritable victime. Il serait trop facile en effet de reprocher aux apprentis sorciers américains d’avoir produit des Oussama Ben Laden et consorts, armés et financés au départ pour combattre les communistes athées. Car des royaumes pétroliers – alliés notoires des États-Unis de surcroît – ont longtemps continué de nourrir le monstre, croyant l’éloigner ainsi de leurs fastueux palais. Par peur, par lâcheté ou par calcul, d’autres États ont fermé les yeux sur des activités éminemment suspectes, quand ils ne les encourageaient pas (chez les autres) en sous-main… C’est dans ce contexte que dans notre pays déjà durement éprouvé, pointe son vilain museau une aberration nouvelle : celle d’un fanatisme dans le fanatisme, d’une folie inédite engendrée par la folie qu’est cette menace de liquidations à caractère sectaire apparue mardi ; menace visant des personnalités chiites et attribuée au groupe Zarqaoui, mais dont on ne saurait exclure qu’elle provienne en réalité de sombres manipulateurs ; menace jugée assez sérieuse en tout cas pour avoir suscité un communiqué conjoint des deux grandes instances religieuses musulmanes, de même que de fiévreuses démarches auprès de diplomates arabes et musulmans. Il en est du terrorisme comme de la science, hélas : on n’arrête pas le progrès. Issa GORAIEB
Il a décidément du ressort, Hosni Moubarak, qui convie ses pairs arabes à un sommet extraordinaire et urgent, consacré en grande partie à la lutte contre le terrorisme : mieux, qui les invite à le rejoindre le 3 août à Charm el-Cheikh, c’est-à-dire sur les lieux mêmes où ce fléau fauchait, il y a quelques jours à peine, des dizaines d’innocents.
Il ne perd pas le nord non plus,...