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Actualités - ANALYSE

perspectives La gestion du portefeuille des AE doit être conforme à l’esprit consensuel de la formule libanaise Éviter de transposer à la diplomatie l’option guerrière imposée par le Hezbollah

Tous les observateurs s’accordent à souligner, à juste titre, que les difficultés rencontrées par le Premier ministre désigné, Fouad Siniora, à former le premier gouvernement de l’ère post-syrienne sont paradoxalement un signe de bonne santé. Ces difficultés démontrent que les Libanais ont enfin pris leur destin en main, au terme de quinze années de tutelle implacable et de suivisme éhonté à l’égard du tuteur syrien. Durant cette phase de transition, les responsables et leaders des différentes composantes socio-communautaires doivent apporter la preuve qu’ils sont en mesure de gérer leur diversité d’opinions, de transformer celle-ci en source de richesse, d’en faire une valeur ajoutée propre à la spécificité du Liban. Ils doivent surtout confirmer, dans les faits, que cette fameuse démocratie consensuelle, à la base de la formule de coexistence et pierre angulaire de l’édifice de Taëf, n’est pas une chimère mais constitue bel et bien une approche rationnelle et viable de la question libanaise. C’est à la lumière de cet incontournable esprit consensuel qu’il est nécessaire d’aborder le problème posé aujourd’hui par l’obstination du Hezbollah à obtenir que le portefeuille des Affaires étrangères soit octroyé à une personnalité chiite qui lui soit proche. Le prétexte invoqué à cet égard est de faire face à la détermination de la communauté internationale à mettre en application la résolution 1559. Mais il ne s’agit-là en toute vraisemblance que d’un prétexte qui résiste mal à l’analyse. Car nul n’ignore que les lignes directrices de la politique étrangère du gouvernement, à l’instar d’ailleurs de tous les autres grands dossiers, doivent être impérativement définies en Conseil des ministres. L’insistance du Hezbollah à vouloir contrôler le palais Bustros ne peut avoir ainsi qu’une seule explication : le parti intégriste chercherait à insuffler, au niveau du suivi quotidien, son propre esprit, sa propre orientation ponctuelle à la diplomatie libanaise ; et tenter d’imposer une approche réductrice de la gestion, au jour le jour, du département des Affaires étrangères, notamment dans les relations avec les chancelleries occidentales. Une telle démarche reviendrait à entraîner tout le pays dans les calculs du Hezbollah et à transposer à la diplomatie ce qui se produit déjà au plan militaire. Sur le terrain, le parti de Dieu impose en effet son propre rythme au pouvoir en décidant de manière unilatérale, et sans aucune concertation préalable avec les parties officielles concernées, du timing et de l’ampleur de ses opérations au Liban-Sud, plaçant ainsi les Libanais devant le fait accompli alors que le principe même de l’option guerrière devrait être le résultat d’un consensus national et non le fruit de la décision d’une seule fraction partisane. De la même façon, désigner à la tête de la diplomatie un ministre « radical » – pour reprendre le terme du général Michel Aoun – reviendrait à rendre le pays otage des orientations outrancières, voire sectaires, du ministre en question, ce qui serait en totale contradiction avec l’esprit consensuel censé imprégner le traitement de tout dossier crucial engageant le sort du pays. La solution au problème de l’attribution du portefeuille des AE réside ainsi dans l’attachement à une savante combinaison de mots-clés qui sont à la base de la formule libanaise : consensus, modération, équilibre, ouverture. Quelles que soient l’identité et l’appartenance communautaire du nouveau locataire du palais Bustros, aller à contre-courant de tels postulats constituerait une violation caractérisée des fondements du pacte de coexistence. Michel TOUMA


Tous les observateurs s’accordent à souligner, à juste titre, que les difficultés rencontrées par le Premier ministre désigné, Fouad Siniora, à former le premier gouvernement de l’ère post-syrienne sont paradoxalement un signe de bonne santé. Ces difficultés démontrent que les Libanais ont enfin pris leur destin en main, au terme de quinze années de tutelle implacable et de...