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Obnubilés par le pouvoir politique, les services ont laissé le pays sans bouclier sécuritaire

Si les fameux services s’étaient occupés de faire leur métier plutôt que de la politique, la sécurité du Liban ne se trouverait pas privée de tout bouclier face au terrorisme assassin. Ce point de vue des ex-opposants, largement relayé par les capitales occidentales ou arabes, se trouve, malheureusement, conforté par l’assassinat de Georges Haoui, portant à huit le nombre d’attentats commis depuis le 1er octobre dernier. Pour beaucoup, il s’agit d’une même série, d’un même complot. Techniquement, cependant, les faits dénotent trois méthodes différentes, qui semblent correspondre à des situations distinctes. Et partant, à des mots d’ordre de nature, et d’objectifs, qui ne sont pas comparables. Ce qui ne veut pas dire qu’ils n’émanent pas de la même source. Ces trois méthodes, quelles sont-elles ? Dans l’attentat contre Marwan Hamadé puis dans le drame du secteur Saint-Georges, un véhicule piégé. Dans les quatre attentats du Metn et du Kesrouan, une bombe posée au sol. Dans les assassinats de Samir Kassir et de Georges Haoui, une charge télécommandée posée sous le siège conducteur. Liste noire Quoi qu’il en soit, comme nombre de professionnels ne cessent de le répéter, la sécurité est ouverte à tous les vents. Les pôles de l’ex-opposition se trouvent tous sous la menace. Il est question, avec insistance et depuis longtemps, d’une « death list ». Contre laquelle, selon ce que laissent entendre plusieurs sources fiables, nombre de capitales étrangères auraient mis en garde ces pôles. Les Américains, on le sait, ont été plus loin en exprimant ouvertement, et au plus haut niveau, leurs craintes. Réseaux Un élément important à souligner : l’assassinat de Georges Haoui, réplique de l’assassinat de Samir Kassir, s’est produit au moment où des sources autorisées révélaient que l’enquête sur le meurtre du journaliste marquait des points. Ces sources soutiennent que l’on est parvenu à saisir des fils conducteurs essentiels permettant de centrer les soupçons sur des commanditaires et des exécutants déterminés. Plus précisément, selon ces sources, un réseau terroriste. Qui, entre autres objectifs, veut provoquer une psychose déstabilisatrice dans le pays en sériant attentats aveugles à la bombe et assassinats ciblés. Responsabilité Selon des politiciens, il y aurait en fait non pas une seule, mais plusieurs cellules terroristes activées au Liban. Ces professionnels mettent toujours en cause les services, qui s’occupaient dans le système sortant de manipulation politique beaucoup plus que de vraie sécurité. Ils ne les accusent pas directement, mais affirment qu’ils ont rendu l’État aveugle et impuissant face aux réseaux terroristes assassins qui ont le champ libre devant eux. Certes, nombre de cadres de ces services ont été évincés, mais sans être remplacés en termes de fonctionnement effectif. Sans compter que ce fonctionnement, justement, n’était plus ce qu’il devait être. Autrement dit, les services en charge de la sécurité, déviés de leur mission, ne sont plus structurés pour protéger la population. Disputes La confusion est aggravée par les chicaneries politiques. La nouvelle opposition reproche à la nouvelle majorité de se lancer dans des surenchères sur le plan sécuritaire, à des fins d’exploitation politique, sans prendre les mesures nécessaires sur le terrain. Cette nouvelle majorité englobe 72 députés. Dans le restant, on trouve des ex-loyalistes, ainsi que des indépendants à géométrie variable et Michel Aoun. Qui prend pratiquement la direction de l’opposition, en confirmant que son courant ne participera pas au prochain gouvernement. Il soutient en outre que le gouvernement des élections comprenait des ministres-clés, comme ceux de l’Intérieur et de la Justice, relevant du camp de la nouvelle majorité, et il leur impute la dégradation sécuritaire. Bras de fer administratif Dans les faits, avec un demi-pied en quelque sorte à l’intérieur du pouvoir, pendant la période des élections, l’ancienne opposition a commencé à régler des comptes, sur un plan administratif, avec l’ancien camp loyaliste. Ainsi, après l’assassinat de Samir Kassir, le ministre de l’Intérieur avait demandé au directeur de la Sûreté générale par intérim, le général Assaad Takch, de mettre à disposition (à l’écart) 15 officiers anciennement fournis à ce département par l’armée. En indiquant qu’il allait préparer des décrets pour que ces officiers regagnent les rangs de l’armée et laissant entendre que les intéressés avaient (mal) occupé des fonctions sécuritaires sensibles. Ce à quoi il a été répondu que le rôle de la Sûreté générale, à part passeports et filtrage des entrées et des sorties, est d’informer le gouvernement sur la situation politique. Non pas de s’occuper de sécurité préventive, et encore moins d’enquêtes policières pénales ou civiles. En d’autres termes, si les réseaux terroristes doivent être dépistés, ce n’est pas par la Sûreté générale, mais par les services de renseignements militaires ou autres, et la police. Le même vieux message L’assassinat de Georges Haoui est politiquement interprété, dans presque tous les milieux concernés, comme une nouvelle tentative de montrer qu’au Liban, sans tutelle il n’y a pas de sécurité. Et de laisser entendre que les Libanais, laissés à eux-mêmes, ne peuvent ni se gouverner ni se protéger. C’est là un refrain très ancien, jadis servi pour raffermir la tutelle. Repris depuis le retrait, sinon dans l’espoir de revenir en arrière, du moins pour faire contre-pression sur les Américains, les Français et la communauté internationale. Autre but présumé : frapper la saison de villégiature. Peut-être aussi faire hésiter les amis du Liban qui se proposent de l’aider financièrement. Puis entraver encore plus l’application de la 1559. Philippe ABI-AKL

Si les fameux services s’étaient occupés de faire leur métier plutôt que de la politique, la sécurité du Liban ne se trouverait pas privée de tout bouclier face au terrorisme assassin.
Ce point de vue des ex-opposants, largement relayé par les capitales occidentales ou arabes, se trouve, malheureusement, conforté par l’assassinat de Georges Haoui, portant à huit le nombre...