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Actualités - OPINION

Point de vue - Taëf et la loi 2000, mariage mal camouflé La nouvelle République, enfant naturel illégitime

Les politologues et les juristes accordent en général plus d’importance au concept de la légitimité qu’à la notion de la légalité. D’ailleurs plus facile à définir. Car, malgré les études pointues, poussées (des tonnes et des tonnes de tomes traitent du sujet), il n’est pas toujours possible de distinguer ce qui est légitime de ce qui ne l’est pas. Disons, pour simplifier comme pour rester dans l’ordre pratique de nos propres préoccupations, qu’à un moment donné, dans un lieu déterminé, est légitime tout acte, toute option, toute situation découlant de ce qui a été convenu. Explicitement ou tacitement. Et pas nécessairement en respectant la loi écrite, que les us et coutumes (le droit coutumier) enfreignent, ignorent ou contournent souvent. Un exemple concret, tiré de notre propre expérience : la Constitution libanaise initiale accordait au président de la République des pouvoirs régaliens. Trop régaliens. Elle l’autorisait à nommer un gouvernement directement, sans consulter les membres de l’Assemblée nationale. Puis à désigner un Premier ministre. Ce droit exorbitant, nos chefs de l’État n’ont jamais songé à l’exercer. Car il était évidemment contraire à l’esprit de consensus sans lequel un pays composite ne peut vivre. Dès lors, le pacte moral dit national, la suprême loi non écrite, fixant les conditions dans lesquelles le pays pouvait vivre, prévalait sur le texte constitutionnel. Bref, la vie publique, sauf évidemment (et à des degrés d’ailleurs variables) dans les régimes tyranniques, est affaire de convention. C’est donc dans la mesure où elle est respectée, quitte à la modifier en cas d’évolution ou d’imperfection classée, que l’on peut, généralement, parler de légitimité. Hic et nunc, ici et maintenant, il y a et il n’y a pas de convention. Comment cela se peut-ce ? dirait Chamfort. C’est assez simple : il y a bien Taëf. Il est convenu, généralement, que dans son esprit (mais qui lit donc dans les esprits ?), il consacre l’unité nationale. Plus exactement, l’unité autour de l’existence même d’une nation déterminée. Mais, dans sa lettre lisible, Taëf n’est qu’un accord de cessez-le-feu. Car le reste, qui touche à la politique, à la structuration institutionnelle est scientifiquement illisible. Pourquoi ? Parce que c’est si mal formulé, si mal fagoté qu’on peut en faire (et qu’on en fait) des lectures variées. Contradictoires, opposées, litigieuses. Nourrissant, en les attisant, les clivages confessionnels, régionaux ou même idéologiques qui font du Liban un magma volcanique difficile à contenir. Pour en venir, ou en revenir, à l’actualité, dans le fond, et contrairement à ce que toutes les parties soutiennent, la loi électorale de l’an 2000 reste, de tous les textes expérimentés ou proposés, la plus proche des dispositions de Taëf. Qui prévoyaient une multiplication des mohafazats pour établir une douzaine de circonscriptions sur l’ensemble du territoire. La 2000 en prévoit 14, pratiquement 12 du reste si l’on observe ce qui se passe à Beyrouth. Mais c’est surtout au niveau du fameux « esprit » que les deux s’apparentent. Parce qu’il ne faut pas se leurrer : c’est bien Taëf qui a voulu prendre le pouvoir aux uns pour le donner, concrètement, aux autres. Voyez ce qu’il est advenu, non seulement des pouvoirs de la présidence de la République, mais aussi du traditionnel panier des postes-clés de l’État. L’oublie-t-on ? Le traité avait été conclu par une majorité de parties, Américains et Arabes en tête, soucieuses de ménager l’élément majoritaire dans ce pays. Sans se soucier de la marginalisation, de l’exclusion (« Chronique d’une mort annoncée ») de l’autre composante. Injustice qui dure depuis 16 ans. Et risque de perdurer encore. La nouvelle République (ne lui donnons pas de numéro, car il y a controverse à ce sujet), qui naîtra avec la toute prochaine Assemblée dite nationale, dont l’Exécutif sera issu, sera donc la fille d’un couple, Taëf et la 2000, qui n’a rien à voir avec le partage équitable. Seul nom possible pour une coexistence. Légitime. Jean ISSA
Les politologues et les juristes accordent en général plus d’importance au concept de la légitimité qu’à la notion de la légalité. D’ailleurs plus facile à définir. Car, malgré les études pointues, poussées (des tonnes et des tonnes de tomes traitent du sujet), il n’est pas toujours possible de distinguer ce qui est légitime de ce qui ne l’est pas. Disons, pour...