Rechercher
Rechercher

Actualités - CHRONOLOGIE

Interview - Le colonel est rentré au Liban après treize ans d’exil Fayez Karam : « Michel Aoun est de retour avec un projet d’avenir » (photo)

Fayez Karam est enfin rentré au Liban. Après les prisons syriennes, l’humiliation et treize ans d’exil à Paris, le colonel Karam, accueilli en héros par les siens quelques jours avant le retour de Michel Aoun, a recouvré toute sa dignité, toute sa fierté. « Durant treize ans, l’État libanais m’a considéré comme un terroriste dangereux. Pourtant, aux yeux de l’État français et du peuple, je suis resté un officier libanais qui a combattu le terrorisme au Liban et au Moyen-Orient, au côté du général Aoun », affirme d’entrée celui qui était le responsable des services de renseignements durant la « période Aoun ». L’affaire remonte à décembre 1992. Poursuivi dans le cadre d’une prétendue affaire de « subversion » et de « terrorisme », Fayez Karam avait été contraint de quitter pour la France. Serein, Fayez Karam donne aujourd’hui l’image d’un pur et dur, d’un homme auréolé de dignité. L’homme a comparu, à son retour au Liban, il y a près de dix jours, devant le tribunal militaire. Il précise, dans ce cadre, qu’il a tenu à « se soumettre à la loi », même s’il était convaincu que les poursuites contre lui étaient à caractère politique. Il affirme d’ailleurs que la véritable justice, il l’a trouvée dans les yeux des Libanais qui lui ont réservé un accueil chaleureux à son arrivée au Liban. « J’ai vu dans leur regard le respect, le soutien, l’espoir, l’avenir, qu’ils lisent dans le retour du général Aoun au pays. Je suis arrivé avant le général pour transmettre un message : nous nous soumettons tous au droit, à la loi. Mais si je ne suis pas retourné avant, c’est parce que la justice était devenue, l’espace de quinze ans, sélective, arbitraire, un instrument de vengeance », dit-il. Le soutien du peuple Le passé est douloureux. Fayez Karam n’oublie pas, mais préfère se tourner vers l’avenir. Le colonel confie que le Liban lui a beaucoup manqué, « la terre libanaise, le vent, le paysage, les amitiés qu’il est impossible de refaire à partir d’un certain âge ». « Cet accueil était inimaginable. Je me suis rendu compte, en voyant cela, que les Libanais nous ont bien compris. Qu’ils sont un peuple mûr, libre, un peuple qui a résisté malgré toutes les humiliations, affirme-t-il. Lorsque j’étais en prison, puis en exil, j’avais la ferme conviction que je disposais d’un véritable soutien. J’étais fier d’avoir le peuple libanais à mes côtés. Et, malgré cela, le sentiment était très fort. Le peuple libanais ne suit pas aveuglément ses leaders. Il comprend, analyse, attend le bon moment pour se manifester. On a vu la réaction populaire après l’assassinat de Rafic Hariri, contre les SR et l’occupation syrienne, confie-t-il. Selon un dicton célèbre, la vraie récompense du chef est dans le regard de ses hommes, pas de ses supérieurs. C’est le peuple qui nous a rendu justice en nous accueillant de cette façon, place des Martyrs », dit-il. « Aoun, un projet d’avenir » « J’ai vu beaucoup d’espoir dans les yeux des Libanais, à mon retour. L’espoir du changement. Mais j’ai vu aussi de la prudence, de la méfiance quant à l’avenir. Ce qui est sûr, c’est que le général (Michel Aoun) est un homme mûr, un homme d’État. Il arrive avec un projet d’avenir, surtout pour les jeunes », affirme-t-il, en prônant un nouveau consensus sur un projet politique qui regrouperait tous les Libanais, opposants, loyalistes ou indépendants. Un projet qui serait basé sur la souveraineté, l’indépendance et le respect des libertés publiques et des droits de l’homme. Un projet d’État de droit, avec une justice indépendante et des contre-pouvoirs efficaces, souligne celui qui pourrait être le candidat du CPL à Zghorta. « Il ne faut jamais oublier le passé », souligne Fayez Karam, en indiquant qu’il se trouve désormais dans une « étape différente » de sa vie. « Il faut profiter de l’expérience qu’on a vécue, pour ne pas tomber de nouveau dans les mêmes erreurs. Mais nous n’avons pas été éloignés du Liban pour des erreurs commises. Nous avons été éloignés par un accord international qui a livré le Liban à la Syrie. En quinze ans, nous avons eu le recul nécessaire pour évaluer la situation. Maintenant, l’objectif est de diffuser une vision différente qui pourrait nous sortir de la situation de crise dans laquelle nous sommes plongés, et qui résulte de la classe politique pourrie et opportuniste que nous avons. Une classe qui n’a d’autre projet que de s’enrichir et d’accéder à des postes, et qui est à l’origine de toutes les crises qui ont touché le Liban », dit-il. Interrogé sur le jugement qu’il porte sur ses successeurs à la tête des SR, les artisans du régime de la terreur au Liban, Fayez Karam évoque l’ivresse du pouvoir et « le manque de compétences sur le plan patriotique ». La nuisance du sectarisme Aux Libanais, Fayez Karam adresse le message suivant : « Bien que la loi électorale soit injuste, le discours confessionnel reste bien plus nuisible. Les musulmans subissent aujourd’hui certains candidats, comme les chrétiens. J’aimerais dire à Saad Hariri que tout le Liban a pleuré son père. Aujourd’hui, ces mêmes Libanais ont le sentiment que M. Hariri veut choisir des candidats dans toutes les régions du Liban, sans se soucier des personnes qui ont pleuré et qui portent toujours le deuil de Rafic Hariri. M. Hariri devrait percevoir tous les Libanais comme des partenaires pour l’édification d’un Liban libre, sur des bases saines. Or cela est impossible s’il y a une seule force qui désigne les candidats, sans entente nationale. Il s’agit d’une atteinte à la démocratie. Le Liban de demain est libre, uni dans toutes ses confessions. Il ne faut pas le priver de cette liberté, garante de son avenir, alors même que le monde entier nous perçoit comme un exemple de démocratie dans le monde arabe. N’imitons pas les régimes autoritaires. Nous devons tous participer au renouvellement de notre pays. Les Libanais devront aller aux urnes libres, affranchis du pouvoir de l’argent, forts du pouvoir de sanctionner ou de récompenser » leurs élus. Michel HAJJI GEORGIOU
Fayez Karam est enfin rentré au Liban. Après les prisons syriennes, l’humiliation et treize ans d’exil à Paris, le colonel Karam, accueilli en héros par les siens quelques jours avant le retour de Michel Aoun, a recouvré toute sa dignité, toute sa fierté.
« Durant treize ans, l’État libanais m’a considéré comme un terroriste dangereux. Pourtant, aux yeux de l’État français...