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Actualités - OPINION

Le camp du cœur

C’était inévitable, cette bouffée d’air frais, de vent de liberté ne pouvait que soulever une tempête dans notre frêle pays. Les événements de ces derniers mois, meurtriers et condamnables, ont laissé le champ libre à toute sorte d’arrivistes, prêts à tout pour grignoter un morceau de pouvoir, à des personnages œuvrant plus pour leurs intérêts que pour le bien public. C’est d’ailleurs ce qui menace de conduire notre pays à sa perte. Après l’assassinat du Premier ministre Rafic Hariri, le paysage s’est métamorphosé en un volcan prêt à entrer en éruption. Adultes et jeunes ont des choses à dire. De la pléthore d’analyses qui se veulent politiques, d’opinions passionnées non réfléchies et encore moins logiques, de croyances fondées sur la tradition, il y a certains mouvements qui ne peuvent rester ignorés, tant pour leur sincérité que pour leur ampleur. Et pour moi, le mouvement de liberté, d’espérance, de patriotisme le plus éclatant est celui des jeunes Libanais, celui de ces jeunes gens réunis place des Martyrs et qui ravive l’espoir d’un Liban nouveau. Ce lieu de réunification des Libanais dans toutes leurs composantes montre qu’une des pages les plus sanglantes du pays est presque tournée. Plus de séparations, plus de conflits et surtout plus de haine. L’assassinat de Rafic Hariri a généré un mouvement populaire, extraordinaire et spontané. Les Libanais n’ont plus peur, ils ne sont plus terrorisés par la menace d’oubliettes obscures et noires. Bâillonnés, marginalisés des années durant, ils ont décidé de se révolter contre l’ordre politique, social et moral instauré par la force. Chrétiens et musulmans ne sont heureusement plus aveuglés par des broutilles; ils ont décidé de renforcer leur unité en n’ignorant pas les différences les séparant, et surtout en n’en faisant plus des obstacles à leur unité. La diversité d’un pays fait sa richesse, et c’est cette diversité qui fait la force du Liban. La vérité criée, chantée, écrite par ces jeunes gens fermement installés place de la Liberté ne peut être étouffée. L’irréversible machinerie enclenchée il y a plus d’un mois ne peut plus être contrée à coup de bombes ou par des illuminés qui nous matraquent de la même idée oiseuse: « L’opposition, à l’exemple du peuple libanais, ne restera pas éternellement unie. » Eh bien, non ! Nous nous refusons de prêter l’oreille à ces imprécations; le Liban peut être fier d’avoir des citoyens clairvoyants, intelligents, conscients du bien du pays et de la véracité du dicton :« L’union fait la force.» L’aube est presque là, l’espoir d’un jour nouveau éclaire le Liban. Et cela parce que la volonté des jeunes abolit tous les obstacles, ces jeunes qui symbolisent la résistance libanaise. Ce « camp de la liberté » installé en plein cœur de la ville, et contrairement à d’autres qui jadis la ceinturaient, menaçant de la détruire, pourra-t-il reconstruire la société sur de nouvelles bases? On ose l’espérer et y croire. Mais, qu’en est-il de la réalité? Passés les premiers élans d’enthousiasme, oubliés les naïfs espoirs de la jeunesse, peut-on toujours croire en n’importe quoi? Les rapaces guettent. Les leaders politiques, eux, vont tenter de tout happer sur leur passage. Ceux qui espèrent tout d’une liberté tellement attendue et ceux qui, méfiants, craignent ce qu’elle implique, sont en fait plus unis qu’on ne le croit. Ce sont les éternels perdants. On se fait avoir par des promesses enflammées, par des mots acidulés enrobés de sucre et par des discours rédigés par des maîtres de la rhétorique. Le peuple ne peut-il pas lutter lui-même pour son indépendance, sans encadrement aucun et sans que personne n’essaie de recueillir les fruits de sa lutte? Quel est le prix à payer pour que le monde commence à tenir compte de nous ? Les politiciens ne peuvent plus continuer à changer de discours tous les deux jours. Nous refusons d’être bernés plus longtemps. Ce que nous demandons, c’est de la part des politiciens un minimum d’honnêteté. Ce camp des jeunes, ce camp de la liberté, ce « camp du cœur » a pu survivre deux mois durant et résister à la pourriture de la réalité en nous permettant de rêver d’une unité entre nous, qui sommes tellement différents. Ne laissons pas ce rêve voler en éclats car il peut devenir réalité ; d’ailleurs le «Che» ne disait-il pas : « Soyez réalistes, demandez l’impossible »? Tania ALAM 18 ans – IC

C’était inévitable, cette bouffée d’air frais, de vent de liberté ne pouvait que soulever une tempête dans notre frêle pays. Les événements de ces derniers mois, meurtriers et condamnables, ont laissé le champ libre à toute sorte d’arrivistes, prêts à tout pour grignoter un morceau de pouvoir, à des personnages œuvrant plus pour leurs intérêts que pour le bien public....