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Actualités - OPINION

Des trous dans les mots

Proche ami du président syrien mais bénéficiant du soutien de l’opposition, Nagib Mikati fait visiblement ce qu’il peut pour ménager la chèvre et le chou ; mais du moins le fait-il avec une remarquable célérité, et cela compte tout de même. Quoi qu’il arrive, les Libanais éliront leurs députés dans les délais constitutionnels : telle est, en gros, la bonne nouvelle qu’apporte le programme gouvernemental publié hier, et qui tranche salutairement avec toutes les manœuvres dilatoires déployées durant les derniers mois. Quant à savoir sur quelle base se déroulera le scrutin, il faudra attendre quelque peu pour les nouvelles : et celles-ci ne promettent pas forcément d’être tout aussi bonnes. À l’évidence en effet, la nouvelle équipe a fait une croix sur le projet de loi déposé auprès de l’Assemblée par l’ancien ministre de l’Intérieur Sleimane Frangié et qui retenait la petite circonscription (caza) : formule concédée à l’époque au patriarche maronite, car favorisant une représentation plus authentique des diverses communautés. Dès lors, le gouvernement se propose de négocier avec le Parlement une nouvelle loi électorale ; et à preuve de sa détermination à honorer coûte que coûte les exigences du calendrier, il se fixe un délai n’excédant pas dix jours pour parvenir à un tel consensus. À titre d’acompte, le gouvernement sollicite la latitude de convoquer le corps électoral quinze jours seulement (et non un mois comme le veut la règle) avant la date fatidique du 31 mai marquant l’expiration de la législature actuelle. Mais si cette dérogation lui est refusée, il n’aura plus d’autre choix que de se rabattre, dès le 31 avril, sur la loi qui a régi le scrutin de l’an 2000 et qui demeure en vigueur jusqu’à nouvel ordre. Un peu compliqué tout cela, n’est-ce pas ? Passablement douteux aussi. Car il ne reste plus à la majorité parlementaire, qui a fait son deuil du scrutin à la proportionnelle, qu’à traîner les pieds pour garder en vie le découpage hybride qui fit sa fortune en 2000. La majorité réelle, celle des citoyens entrés en révolte contre la tutelle syrienne et le règne des services secrets, se consolera quant à elle à l’idée que 2005 n’est pas 2000. Et que dans tous les cas de figure, le vent de liberté qui souffle sur le pays ne pourra que modifier substantiellement la composition de l’Assemblée. Quant au reste, la déclaration ministérielle comporte une claire et nette adhésion à la résolution 1595 de l’Onu, de même qu’elle proclame la volonté de l’État de faciliter au plus haut point l’enquête internationale sur l’attentat du 14 février. Non seulement le gouvernement invite à se mettre à disposition ceux des chefs des organismes de sécurité qui n’en ont pas pris eux-mêmes l’initiative, mais il se promet de prendre les mesures adéquates à l’encontre de toute personne incriminée ou qui se serait rendue coupable de négligence. On s’étonnera néanmoins du traitement de faveur que réussit à s’octroyer avec superbe le directeur de la Sûreté Jamil Sayyed : d’abord en calquant la durée de son congé sur celle de l’enquête ; et ensuite en s’assignant auprès du Sérail plutôt que de son autorité de tutelle, au motif que le ministre de l’Intérieur Sabeh était naguère son subalterne ! Tout aussi surprenant d’ailleurs est le vertueux sermon sur la nécessité de restituer à la justice son indépendance, sa crédibilité et le respect des citoyens, sans la moindre référence à ceux dont les agissements ont rendu impérative une telle remise à flot. Issa GORAIEB
Proche ami du président syrien mais bénéficiant du soutien de l’opposition, Nagib Mikati fait visiblement ce qu’il peut pour ménager la chèvre et le chou ; mais du moins le fait-il avec une remarquable célérité, et cela compte tout de même.
Quoi qu’il arrive, les Libanais éliront leurs députés dans les délais constitutionnels : telle est, en gros, la bonne nouvelle...