La leçon morale et politique d’un pontificat

Par Hyam MALLAT Cette mort souveraine, triste et douloureuse du pape Jean-Paul II interpelle notre foi et notre conscience car elle nous rappelle d’abord que la disparition physique s’accompagne pour le chrétien et pour tout croyant sur la terre d’un acte de foi envers le Seigneur. Elle nous rappelle également que le pape Jean-Paul II successeur de saint Pierre et berger de l’Église, l’a dirigée durant plus d’un quart de siècle, et que son retour à la maison de Dieu revient à remercier le Seigneur en signifiant qu’il n’est de poste ou de mission sans responsabilité. Cette mort souveraine témoigne que ce pontificat aura été tout d’authenticité et de courage, et que le message politique de Jean-Paul II aura été à la mesure de son message spirituel, confirmant la parole du Christ dans l’Évangile qu’« il sera beaucoup demandé à ceux à qui il a été beaucoup donné ». Et c’est en quoi ce pontificat aura été un exemple quotidien, continu, fatigant et douloureux pour rappeler à tous ceux qui sont aux postes de responsabilité, à quelque religion qu’ils appartiennent, qu’il n’est d’engagement valeureux que pour ceux capables de léguer autre chose que les fautes, les errances et les mensonges. Ces quelques jours sont un moment de recueillement dans le monde car ils nous rappellent que toute fin arrive avec son moment de souffrance et de grandeur. Et le Liban est surtout redevable à Jean-Paul II de l’avoir inscrit au rang des pays qui, s’ils ne sont pour les hommes, n’ont plus valeur d’exister par les hommes. Cette leçon de politique morale et historique rejoint la préoccupation fondamentale du pontificat de Jean-Paul II, et le Liban en témoigne, lui qui a été victime depuis plus de trente ans de cette mauvaise politique qui ne vit que de choses injustes, faisant croire qu’il existe des actes sans impunité, des crimes sans punition et une corruption sans sanction. C’est cette « accountability » morale et spirituelle, ce rapport que la mission a été remplie et le devoir accompli qui constituent la leçon historique du pontificat de Jean-Paul II. Exemple significatif et témoignage éminent pour que les politiques s’élèvent car ce n’est pas parce que les politiciens aiment mentir que la politique est faite de mensonges, et pour que ces mêmes politiques se rappellent également que toute forme de responsabilité publique revient à avoir charge d’âme.