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Actualités - OPINION

Sursis

En dépit des apparences, le chef de l’État peut encore, plus que quiconque, déboulonner la grave crise qui sévit dans le pays depuis l’assassinat de Rafic Hariri. Un sursis vient de lui être accordé par l’opposition, y compris par un Walid Joumblatt pourtant acharné depuis le vote de la prorogation du mandat présidentiel – mais davantage encore après le funeste 14 février – à obtenir son départ. Indépendamment des considérations tactiques ou de principe des uns et des autres, un fait est aujourd’hui indéniable : la politique du président de la République et le système tout entier sur lequel cette politique repose ont été désavoués par une évidente majorité de Libanais. Émile Lahoud a trop longtemps et trop systématiquement combattu Rafic Hariri. Aujourd’hui, ce dernier est mort, mais ne serait-ce qu’à titre posthume, les Libanais, y compris ceux qui étaient souvent critiques à son égard, l’ont proclamé vainqueur de la titanesque joute qui l’avait opposé au chef de l’État. Émile Lahoud a trop longtemps – et de façon ostentatoire – accroché le wagon libanais au train syrien. Au point de répéter à tout venant que les relations libano-syriennes, telles qu’elles sont, constituent un « modèle » pour les autres pays arabes. Littérature de propagande plus que de conviction, ces mots ont été balancés dans les oubliettes de l’histoire par tout un peuple célébrant ses retrouvailles au pied d’un mausolée. Émile Lahoud a trop longtemps et trop généreusement accordé sa caution à un régime de nature policière. Des incidents du 7 août 2001 à la fermeture de la MTV, en passant par les déclarations sur « l’indépendance » de la justice, pendant qu’au Parlement, on contraignait les députés à se dédire en l’espace de quelques jours à propos du code de procédure pénale, tout un système fondé sur une mentalité ultrasécuritaire a connu ses heures de gloire. Le « Printemps de Beyrouth », qui a fleuri sur une tombe, le conduit à présent vers sa déchéance. Que reste-t-il aujourd’hui des options de Baabda ? Des reliquats de présence syrienne, appelés à moyen terme à disparaître ? Un Hezbollah qui reste puissant, mais qui se voit contraint de poser son arsenal sur une table de négociations à laquelle la présidence de la République n’est pas invitée ? Une majorité parlementaire fictive qui continue à jouer le jeu, tout en se disloquant lentement mais sûrement sous les coups de boutoir d’une majorité réelle, celle qui s’exprime place de la Liberté ? Combien faudra-t-il encore de portraits barbouillés et de SMS désobligeants, combien de fois faudra-t-il encore nier avoir accompli telle ou telle activité sportive pour que l’on se décide enfin à mettre la présidence de la République à l’abri de la tempête ? Émile Lahoud peut encore, s’il le souhaite, sauver la situation. Et, du même coup, rétablir le prestige de la présidence et le sien propre. En favorisant la formation d’un gouvernement capable d’organiser de bonnes législatives, le plus tôt possible ; en acceptant le principe d’une surveillance internationale – ne serait-ce que civile – du scrutin ; et, enfin, en proclamant, dès à présent, son intention de partir après l’installation de la nouvelle législature, il aura largement contribué à déboulonner la crise. Et, par-dessus tout, il aura tout simplement répondu au vœu de ses concitoyens. Élie FAYAD
En dépit des apparences, le chef de l’État peut encore, plus que quiconque, déboulonner la grave crise qui sévit dans le pays depuis l’assassinat de Rafic Hariri.
Un sursis vient de lui être accordé par l’opposition, y compris par un Walid Joumblatt pourtant acharné depuis le vote de la prorogation du mandat présidentiel – mais davantage encore après le funeste 14 février –...