Quand le phénix renaît de ses cendres...

Le 14 mars 2005 sera sans doute une date à inscrire dans les pages de l’histoire du Liban. C’est un jour de gloire et de victoire pour le peuple libanais. Durant ces dernières semaines, chrétiens et musulmans, jeunes et vieux, partisans et indépendants, riches et pauvres se sont retrouvés chaque jour à la place de la Liberté, criant haut et fort, d’une part, la nécessité de faire toute la vérité sur l’assassinat de Rafic Hariri, et, d’autre part, leur volonté de voir s’accélérer le retrait des forces d’occupation syriennes. Le peuple semble ainsi se libérer des frustrations accumulées pendant des décennies. Le paysage politique libanais paraît particulièrement sain, ce qui contredit toutes les théories selon lesquelles nous étions aux portes d’une guerre civile. Dépassant toutes les contraintes de la politique traditionnelle libanaise, nous sommes devenus les acteurs de notre propre histoire. Cette vérité-là, nous avons entendu beaucoup de personnes la crier haut et fort. Dans vingt ans, nous pourrons raconter à nos enfants, leur parler de « ce jour-là ». Ce que nous sommes en train de réaliser aujourd’hui sert tous les Libanais. Nous sommes désormais capables de prouver au monde entier notre courage, notre fierté et surtout notre sens de responsabilité. Nous avons définitivement brisé le climat de peur qui régnait avant toute manifestation. Aujourd’hui, nous récoltons le fruit des germes que nos compagnons qui résistaient, et qui continuent de le faire depuis quinze ans, ont semés. Le flambeau ne doit pas s’éteindre et la marche vers la souveraineté doit se poursuivre. Il faudrait être très attentif et ne pas perdre de vue l’objectif principal, celui d’un Liban libre, souverain et indépendant. Certes, la victoire finale, nous ne l’avons pas encore remportée, mais nous sommes sur le bon chemin. Les objectifs à réaliser à court terme se résument comme suit : – Chasser les forces d’occupation syriennes en poursuivant notre résistance pacifique. Il est bon de relancer, à cet égard, le concept de la résistance culturelle, élaboré et développé par le père Sélim Abou. Il semble que cette résistance ait pris son essor aujourd’hui, et qu’elle est, consciemment ou inconsciemment, présente dans tous les esprits. – Continuer à manifester à la place de la Liberté pour obtenir la démission d’Émile Lahoud, le démantèlement du régime sécuritaire et le retrait total des forces d’occupation syriennes. Sinon, à quoi servirait la chute d’un gouvernement nommé et désigné à Anjar pour le remplacer par un autre, suivant le même processus. Nous aspirons à un changement non de personnes, mais de mentalité et de discours. – Instaurer un gouvernement neutre pour préparer les élections législatives. Par neutre nous entendons un cabinet qui soit formé de ministres non candidats aux élections législatives. Le scrutin devrait aussi être organisé dans le respect des lois et textes juridiques en vigueur (respect de l’isoloir, formation d’un nouveau Conseil constitutionnel...). Certes, la tâche est ardue. Pour simplifier les choses, il faudrait « relibaniser » tout le système libanais, c’est-à-dire reconstruire tout un système éducatif, judiciaire, social et économique qui s’est détérioré par le processus de « baassisation » du pays. Il serait déplacé de ne pas remercier l’armée libanaise pour son « soutien ». Nous n’avons pas oublié les martyrs de Souk el-Gharb, Deir el-Kalaa, Dahr el-Wahch. Le phénix renaît de ses cendres, grâce au peuple libanais et à l’opposition plurielle. Aujourd’hui, il faut continuer, ensemble, pour rebâtir un Liban libre, souverain et indépendant. Jad AZKOUL Étudiant à l’USJ