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Les positions syriennes sont restées intactes hier, le 6e redéploiement devrait être entamé aujourd’hui De Aley à Dhour el-Choueir, la lassitude l’emporte sur l’espoir (Photo)

Jusqu’en début de soirée hier, le redéploiement syrien annoncé jeudi par le ministère de la Défense n’avait pas encore été entamé. Dans toutes les zones du Mont-Liban où les soldats de Damas sont toujours présents, les positions sont restées intactes, notamment à Dahr el-Wahch, Aley, Dhour el-Abadiyé, le triangle de Hammana-Aïn Dara-Mdeirej, Salima, Mrouj, Bois de Boulogne, Khonchara, Dhour el-Choueir, Ayroun, Douar et Mar Moussa. Dans leurs positions situées dans les forêts de pin, à proximité des routes principales ou dans les quartiers résidentiels, les soldats syriens ont vécu une journée ordinaire comparable à toutes les autres passées au Liban depuis trente ans : ils se sont entraînés dans leurs champs de tir, ils ont couru dans les plaines, se sont rassemblés autour de bennes en flammes pour se réchauffer, se sont ravitaillés... Bref, hier, dans les positions syriennes du Mont-Liban, aucune guérite n’a été démontée, aucune tente n’a été pliée, aucun camion n’a été rempli de matelas, de soldats ou de munitions, aucune villa ou habitation n’a été restituée à ses propriétaires initiaux... Et bien que rien ne présageait un départ imminent, diverses sources ont déclaré que ce sixième redéploiement, annoncé en grande pompe jeudi, sera entamé aujourd’hui samedi. Tout est possible. Rappelons qu’il a fallu un peu moins de 72 heures pour que les soldats de Damas évacuent totalement, en septembre dernier, les régions de Damour, Doha et Aramoun. Des positions stratégiques et des zones entières qui étaient en leur possession depuis plus de 20 ans. Aley, chef-lieu du caza. La localité abrite plus de 3 000 soldats syriens et ceci sans compter les importantes positions voisines de Dahr el-Wahch (école Kortbaoui) et de Dhour el-Abadiyé, (qui abrite un centre de services de renseignements). Les troupes de Damas sont présentes notamment dans trois secteurs de la ville, Hay el-Wata, le secteur Kettané et la zone de la centrale électrique. À Aley, les soldats syriens sont en possession d’armes de moyen calibre (RPG, B7...), de plusieurs bases de lance-missile sol-air ainsi que des pièces d’artillerie de 120 mm. Certains secteurs de la ville sont comparables à ce qu’était la zone de Monteverde au Metn avant le retrait en 2002 et Doha avant le redéploiement de septembre dernier. Ici, des quartiers entiers sont investis par des officiers et des cadres syriens, alors que plusieurs dizaines de bâtiments et de villas délabrés abritent des soldats, sans compter les tentes dressées dans la forêt voisine... Les habitants de Aley et des localités voisines ont accueilli la nouvelle du redéploiement avec beaucoup de scepticisme, même si plusieurs d’entre eux ont « patrouillé » auprès des positions syriennes juste pour voir... « À Aley, plus nombreux que les Libanais » « On peut compter facilement les Libanais à Aley. Les Syriens, eux, sont innombrables. Je sais en tout cas qu’ils sont plus nombreux que nous », indique Bassam, qui ajoute : « Faut-il compter les soldats et les ouvriers ensemble ? » « Depuis la mort de Rafic Hariri, beaucoup d’ouvriers sont partis », poursuit-il, soulignant que « les soldats syriens ne quitteront pas le pays si nous ne portons pas les armes ». Haytham raconte que des dizaines de bus transportant des ouvriers syriens ont quitté Aley la semaine dernière « après la manifestation qui a eu lieu dans la ville ». « Ils ont préféré rentrer chez eux... Dommage, depuis quelques jours, ils reviennent », poursuit-il. Mais comme pour se donner courage, le jeune homme relève, fier : « Depuis cette manifestation, les soldats syriens ne sortent plus qu’armés de leurs casernes. Ils doivent avoir un peu peur. » Rappelons dans ce cadre qu’au lendemain de l’assassinat de l’ancien Premier ministre Rafic Hariri, environ un millier d’habitants de Aley étaient descendus dans la rue pour contester la présence syrienne au Liban en général et dans leur ville en particulier. La permanence du PSP à Aley est située à côté de la résidence du député Akram Chéhayeb. Les troupes de Damas avaient évacué une importante position non loin de là il y a de cela un an et demi. Désignant le bâtiment délabré qui les abritait, un homme indique, virulent : « Ils ont fait exprès de s’installer durant des années ici, sous notre nez, en pleine ville. Comme pour faire acte de présence. » Dans un autre quartier de la ville, Anouar tient un magasin d’électroménager. Le jeune homme dormira sur place ce soir. « Peut-être que les soldats partiront, cette nuit. On ne sait jamais, il peut y avoir des débordements ». Waël, son camarade, rétorque : « Ils n’oseront pas. Regarde comment les ouvriers ont détalé comme des lapins après la manifestation. » À la question de savoir si les habitants de la région ont menacé ou brutalisé les ouvriers syriens, le visage des deux jeunes hommes s’illumine d’un grand sourire. Ils répondent presque en chœur, l’un achevant la phrase de l’autre. « Pas du tout. Les ouvriers ont vu les manifestations à la télévision, ils ont eu peur. Ils ont dû voir aussi sur les écrans la tente rouge (celle du PSP) à la place des Martyrs. Personne ne les a brutalisés. Si, peut-être, des nourrissons qui étaient dans les bras de leurs mères et qui ont tenté de jouer avec eux en leur tirant gentiment les cheveux ou en leur donnant de petites tapes à la figure... » ricanent-ils. Au Haut-Metn et au Metn : « Le respect de Taëf » Comme à Aley, dans d’autres localités du caza les ouvriers syriens sont partis depuis une dizaine de jours. C’est le cas aussi à Hammana (Haut-Metn), qui abrite le plus important centre de services de renseignements syriens de tout le Mont-Liban, et également, environ un millier de soldats dans les plaines formant ce qu’on appelle « le triangle Hammana-Mdeirej-Aïn-Dara ». La place de Hammana. Najwa tient une épicerie et elle chuchote à ceux qui sont venus s’enquérir du mouvement des troupes : « Ils sont toujours là, et les services de renseignements et les soldats. Ils n’ont pas bougé d’un pouce. Ils ne partiront pas de sitôt. » Georges, son voisin, se demande, inquiet, si le triangle en question est considéré par les autorités comme faisant partie du Mont-Liban ou de la Békaa. Il se lamente : « Ils ont saccagé la plaine. La zone qu’ils ont investie abrite plein de villas. Depuis qu’ils se sont installés en masse ici, les estivants sont partis. » En fait depuis l’arrivée de la Force de dissuasion arabe, en 1976, les soldats syriens sont présents dans la plaine de Hammana. En 2002, leur nombre a sensiblement augmenté. Les troupes syriennes qui avaient quitté Monteverde et Beit Méry s’étaient partiellement redéployées à Hammana. Cette année-là, les soldats avaient dressé des tentes. Hier dans la plaine, il y avait certes des dizaines et des dizaines de tentes, mais aussi de petites maisons en dur, munies de cheminées, d’où émanait une fumée grise... En fait, le froid est glacial dans cette zone du Mont-Liban, située non loin du col de Dahr el-Baïdar. La même scène se présente de l’autre côté du mont Kneissé, à Salima et Dhour Salima (Haut-Metn) : une immense position syrienne. Plusieurs dizaines de tentes et de petites maisons en dur se dressent au milieu de l’une des plus belles forêts de pins parasols de la région. Aïman, qui tient une épicerie non loin de là, indique en se lamentant presque : « Ils n’ont pas bougé depuis hier. Ils sont là depuis des dizaines d’années. » « Ils ne quitteront pas Dhour el-Choueir et le Bois de Boulogne non plus. Ils y étaient même avant que je sois né », ajoute-t-il montrant la montagne en face. Hier, les positions syriennes de Dhour el-Choueir, du Bois de Boulogne, de Mrouj et de Khonchara étaient maintenues intactes au point que quelques habitants qui vivent avec la présence syrienne depuis 1976 ont perdu toute patience. Certains d’entre eux se sont promenés du côté des positions syriennes, interpellant les soldats : « Dites, vous n’allez pas partir ? » Et les troupes ont répondu : « Nous ne savons pas. Nous attendons les ordres. » Depuis le premier redéploiement syrien, en juin 2001, les habitants de cette zone du Metn espèrent en vain que leurs villages seront évacués. Hier en soirée, ils ignoraient si « les ordres » de ce retrait partiel toucheraient leurs terrains, immeubles, hôtels et villas. Certains sont las, d’autres ne perdent pas courage, soulignant : « S’ils veulent véritablement appliquer les accords de Taëf, ils ne peuvent pas rester ici. » Ceux-là guetteront dès ce matin le mouvement des troupes... Peut-être que l’heure du grand départ aura sonné. Patricia KHODER
Jusqu’en début de soirée hier, le redéploiement syrien annoncé jeudi par le ministère de la Défense n’avait pas encore été entamé. Dans toutes les zones du Mont-Liban où les soldats de Damas sont toujours présents, les positions sont restées intactes, notamment à Dahr el-Wahch, Aley, Dhour el-Abadiyé, le triangle de Hammana-Aïn Dara-Mdeirej, Salima, Mrouj, Bois de Boulogne,...