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Actualités - CHRONOLOGIE

Le comportement irresponsable et inhumain des forces de l’ordre sur les lieux de l’attentat suscite l’indignation Zahi Bou Rjaili est mort asphyxié, à l’hôtel « Saint-Georges », 14 heures après l’attentat

Zahi Bou Rjaili, employé de l’hôtel « Saint-Georges », a péri dans l’attentat qui avait visé l’ancien Premier ministre, Rafic Hariri. Mais Zahi Bou Rjaili, 45 ans, n’était pas brûlé, défiguré ou grièvement blessé. Coincé sous les décombres, il est mort 14 heures après l’explosion dans son bureau situé au premier étage de l’hôtel « Saint-Georges ». Cause du décès, selon le médecin légiste, le manque d’oxygène. Zahi Bou Rjaili est mort donc asphyxié parce que les secours, malgré la mobilisation de sa famille, sont arrivés trop tard. Ses proches ne sont pas les seuls à souffrir du désordre qui a marqué les opérations de secours le jour de l’attentat. En effet, Abdel-Hamid Ghalayini, qui marchait sur la corniche au moment de l’explosion, est toujours porté disparu, et ce malgré les divers appels lancés par sa famille qui ignore toujours si le cadavre de la victime a été complètement déchiqueté, a été propulsé dans la mer par le souffle de l’explosion, ou s’il gît encore sur les lieux de l’attentat… Car, lundi dernier, huit jours après l’explosion, la police a retrouvé sur le site le corps défiguré d’un homme qui se trouvait sous une voiture calcinée. Jusqu’à présent, ce dernier n’a pas été identifié. Jusqu’à l’arrivée des enquêteurs suisses, et probablement jusqu’à la fin de l’enquête, le secteur touché par l’explosion demeurera fermé au public. Les voitures détruites resteront sur place. Seuls les véhicules du convoi de l’ancien Premier ministre ont été transférés à la caserne Hélou des FSI, où elles ont été protégées par des bâches. Ce mort qu’on aurait pu sauver, ce corps qu’on n’a pas encore retrouvé, et ce cadavre qu’on a retrouvé trop tard font planer plusieurs interrogations. Pourquoi les responsables des secours qui ont passé plusieurs heures dans le secteur de l’hôtel Saint-Georges n’ont-ils pas inspecté comme il se doit les lieux de l’attentat ? Pourquoi la police a empêché, dans la nuit du lundi 14 au mardi 15 février, les parents des victimes de chercher leurs proches, pourquoi ne leur a-t-elle pas prêté une oreille attentive ? L’ampleur des dégâts et la perte de l’ancien Premier ministre y étaient certes pour quelque chose, mais cela ne justifie pas la négligence et la non-assistance à personne en danger… Durant la guerre du Liban, les explosions à la voiture piégée étaient courantes. Les secouristes, les pompiers et la police étaient donc habitués à gérer ce genre de situation. Et presque jamais, lors des événements, on n’avait retrouvé huit jours après une explosion un cadavre étendu sur une chaussée ou n’avait vu une personne qui n’avait pas subi des blessures graves mourir asphyxiée sous les décombres par manque de soins… « L’armée m’a empêchée de monter au 1er étage de l’hôtel » L’épouse de Zahi Bou Rjaili, Noha, raconte son cauchemar. C’est lundi dernier, en lisant le rapport du médecin légiste, Kevork Kombehjian, qu’elle a su que son mari aurait pu être sauvé, qu’il est décédé 14 heures après l’attentat. « Quand j’ai su que Zahi est mort, je m’en suis remise à la volonté de Dieu. Maintenant je culpabilise, je dis que c’est de ma faute, que j’aurais dû monter au 1er étage de l’hôtel Saint-Georges même si les soldats m’avaient empêchée de le faire », indique-t-elle. « Si seulement ils m’avaient permis d’entrer ! » dit-elle en sanglotant. Noha raconte sa terrible journée du 14 février. Dès 14 heures, elle fait le tour de tous les hôpitaux de la ville, cherchant en vain son époux. Elle s’est même rendue à la morgue de l’hôpital américain de Beyrouth, ouvrant chaque tiroir… « À 16 heures, le téléphone de Zahi s’est remis à sonner. J’ai prévenu la police, elle m’a dit qu’il fallait une autorisation du parquet pour effectuer les recherches nécessaires afin de localiser le téléphone. Les FSI ne sont donc pas intervenues. Puis vers 20 heures, j’ai été sur les lieux de l’explosion. Au début, l’armée m’a empêchée de m’approcher. Puis les soldats m’ont permis de marcher à côté de l’hôtel Saint-Georges entre les débris », raconte-t-elle. « Il n’y avait aucune lumière, l’un des soldats avait une torche. Quand je suis arrivée au niveau de l’entrée de l’immeuble où mon époux travaillait, j’ai voulu entrer, aller au 1er étage. Les soldats ne m’ont pas permis de le faire. Si seulement j’avais su qu’il était toujours vivant dans son bureau… », ajoute-t-elle. « Vers 20 heures, il n’y avait plus personne sur le site, l’armée gardait les entrées. Les secouristes et la Défense civile étaient partis depuis longtemps », indique-t-elle. Noha rentre chez elle, n’arrête pas de composer le numéro de téléphone de son époux. Peu après minuit, dans la nuit de lundi à mardi, son frère, Hachem Hachem, et d’autres personnes de la famille se rendent sur les lieux de l’attentat. L’accès au Saint-Georges leur est interdit. Auparavant dans la journée du 14 février, alors que Noha cherchait son époux dans les hôpitaux, d’autres membres de la famille se trouvaient dans le périmètre de l’attentat. « Nous avons supplié l’armée pour qu’elle nous laisse entrer à l’hôtel Saint Georges ou qu’elle fasse elle-même les recherches. En vain. Ils nous ont dit que la Défense civile avait déjà effectué toutes les recherches », indique le frère de Noha, Hachem Hachem. C’est le mardi 15 février vers 11 heures que le corps de Zahi Bou Rjaili est retrouvé. Il était intact, et portait un léger hématome au crâne. Zahi était sous les décombres de son bureau. Il tenait son téléphone portable à la main. Selon le médecin légiste, il est mort 14 heures après l’attentat à cause d’un manque d’oxygène. Lorsqu’il a été retrouvé, le corps n’était pas encore rigide… Noha tient à dénoncer le mépris avec lequel les autorités ont traité les victimes et leurs familles. Et si elle livre son témoignage, « c’est pour que ce genre d’erreur ne se reproduise plus ». Hachem, son frère, va plus loin. Il souligne : « Si nous n’étions pas entrés en contact avec un personnage influent, nous n’aurions pas, jusqu’à présent, retrouvé le corps de Zahi. Nous aurions subi le même sort que celui de la famille de Abdel-Hamid Ghalayini. » Zahi Bou Rjaili, employé depuis 15 ans à l’hôtel Saint-Georges, était père de deux jeunes adolescentes. Il vivait dans une maison de location. Il subvenait aux besoins de sa famille et de sa mère. Patricia KHODER
Zahi Bou Rjaili, employé de l’hôtel « Saint-Georges », a péri dans l’attentat qui avait visé l’ancien Premier ministre, Rafic Hariri. Mais Zahi Bou Rjaili, 45 ans, n’était pas brûlé, défiguré ou grièvement blessé. Coincé sous les décombres, il est mort 14 heures après l’explosion dans son bureau situé au premier étage de l’hôtel « Saint-Georges ». Cause du...