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Actualités - OPINION

Le retard dans l’approbation de la loi électorale jette déjà une ombre sur le processus Le fair-play du pouvoir, objet de tous les soupçons

Les électeurs se posent cette question simple : quelle régularité peut-on attendre d’un scrutin supervisé par un gouvernement ouvertement, violemment partial ? Dont le chef et les membres déclarent publiquement qu’ils comptent intervenir, dans leurs départements ou ailleurs, contre les candidats de l’opposition. Sous prétexte que beaucoup d’élections ont été organisées sous des gouvernements engagés, le pouvoir refuse l’idée d’un cabinet neutre. Il rejette en outre la présence d’observateurs internationaux, de témoins gênants, pour disposer des urnes à sa guise et rester en mesure, si besoin est, de tronquer tranquillement les résultats. Comment espérer des élections libres avec le maintien de la présence militaire syrienne, services secrets en tête ? De plus, le processus ne peut être normal puisqu’il se trouve déjà vicié par le fait que la loi électorale ne sera pas approuvée avant la fin du mois en cours. Ce qui ne laissera aux électeurs et aux candidats opposants, qui ont une campagne difficile à mener, des alliances à contracter, des recensements à effectuer, des déplacements à organiser, qu’un petit mois de battement. Tandis que la logistique autant que la stratégie électorale se trouvent assurées, côté candidats loyalistes, par le pouvoir qui dispose de moyens transcendants. Ce n’est pas la première fois que les dirigeants de la période post-Taëf recourent au coup d’une loi électorale de dernière minute. Ils court-circuitent ainsi tout débat politique, brisent en pratique toute contestation sensée, rompent les reins de la démocratie. Dans la logique d’une politique, devenue traditionnelle, du fait accompli, chère aux décideurs. Qui passent outre, comme cela s’est vu, aux objections de leurs propres fidèles installés aux commandes. La pratique de la catapulte in extremis a pour effet, comme on l’a vu en 2000, d’empêcher les dirigeants d’éluder le projet dicté, tout simplement faute de temps. Cette fois cependant, l’initiative semble leur appartenir. Et s’ils jouent de l’élément d’urgence, c’est pour faire pression, en laissant planer le doute quant à la confirmation du caza. On sait en effet que nombre de piliers loyalistes tentent, encore à ce jour, de faire passer le mohafazat. N’était la détermination du chef de l’État, qui tient, comme le patriarche Sfeir, à une vraie représentation, donc au caza, ils seraient à deux doigts de réussir. L’opposition de son côté a des réserves et des remarques sur le projet transmis à la Chambre. Mais elle a peu de chances de le faire amender. Parce qu’elle se trouve confrontée au chantage suivant : c’est ça ou le retour à la formule foireuse de l’an 2000. Qui est, on le sait, encore pire que les dispositions négatives présentes. Comme le découpage « spécial » de Beyrouth où la deuxième circonscription a été taillée de manière à rogner les ailes de Hariri. Certains ministres ont d’ailleurs reconnu ouvertement que l’objectif est de marginaliser au maximum l’ancien président du Conseil. En faisant en sorte « d’attribuer » inévitablement nombre de sièges aux candidats loyalistes dans la capitale. L’opposition, redisons-le, a été sommée de ne pas se solidariser avec Hariri. Sous peine de l’abolition du caza et du retour, carrément, au parachutage. Kornet Chehwane a protesté, l’un de ses piliers faisant valoir que les pratiques observées ne sont pas démocratiques mais totalitaires. Puisque le droit de retoucher un projet de loi se trouve prohibé. La Rencontre a quand même certifié son attachement, avant tout, au caza. Ce qui signifie qu’elle se trouve obligée d’avaler la couleuvre de Beyrouth II. Il reste que le gouvernement, dont bon nombre de ministres ne sont initialement pas favorables au caza, déclare sans ambages qu’il ne compte pas défendre le projet bec et ongles à la Chambre. En répétant que le dernier mot appartient à cette institution. Ce qui sous-entend un certain espoir de voir la majorité, globalement élue sur base du parachutage, revenir au système de l’an 2000 qui lui a été si favorable. Mais ce pari est difficile, car le monde entier crierait alors à la triche manifeste. Le pouvoir dispose d’autres leviers d’arbitraire. L’article 63 du projet de loi, qui bride les dépenses de campagne, limitées à 150 millions de LL. Et qui, surtout, menace de poursuites comme de disqualification tout candidat qui aurait joué sur la fibre du confessionnalisme, utilisé tout moyen de séduire ou d’intimider l’électorat. Dans ce cadre, le pouvoir est libre d’interpréter à sa guise toute phrase, toute initiative pour frapper qui bon lui semble. Il foule aux pieds les prérogatives du Conseil constitutionnel (encore que cette instance ne lui soit pas hostile) pour s’arroger le droit d’invalidation. Parallèlement, grâce au fameux article 68, maintenu dans sa forme ultrarépressive, les médias sont muselés et risquent la fermeture, à l’instar de la MTV jadis. Alors quand le pouvoir jure ses grands dieux qu’il va organiser un scrutin libre, régulier, propre, les Libanais rient jaune. Émile KHOURY
Les électeurs se posent cette question simple : quelle régularité peut-on attendre d’un scrutin supervisé par un gouvernement ouvertement, violemment partial ? Dont le chef et les membres déclarent publiquement qu’ils comptent intervenir, dans leurs départements ou ailleurs, contre les candidats de l’opposition. Sous prétexte que beaucoup d’élections ont été organisées sous des...