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Actualités - OPINION

ÉCLAIRAGE - La Syrie voulait établir un équilibre avec l’activité des diplomates occidentaux Moallem a échoué, et l’heure est à la confrontation...au Parlement

L’idée était assez subtile, et elle aurait pu faire son chemin sur la scène politique et briser le mur de durcissements réciproques qui divise aujourd’hui les Libanais entre eux, et les Libanais et les Syriens. La tournée de Walid Moallem auprès de grandes figures libanaises avait été bien étudiée et visait à faire d’une pierre deux coups. D’une part, il s’agissait de répondre à l’une des revendications de l’opposition, à savoir que le dossier libanais ne devait plus être placé entre les mains des services de sécurité. Et d’autre part, la Syrie avait aussi le souci d’établir une sorte d’équilibre diplomatique au Liban avec les activités des ambassadeurs occidentaux, notamment ceux de France et des États-Unis. La personne de Walid Moallem était d’ailleurs idéale pour remplir ce genre de mission. Diplomate chevronné, rompu aux négociations difficiles, il avait noué des relations assez cordiales avec nombre de figures libanaises, notamment l’ancien ambassadeur du Liban à Washington, Nassib Lahoud. Bien préparée, la visite avait sélectionné les personnalités à rencontrer dans une première étape, quitte à élargir plus tard l’éventail du dialogue. Et M. Moallem, qui avait qualifié cette visite de mission exploratoire, comptait essentiellement écouter ce que ses interlocuteurs avaient à lui dire, notamment sur la manière d’assainir les relations libano-syriennes en replaçant le débat dans un contexte diplomatique et politique. Plus de place pour les demi-mesures Tout avait d’ailleurs bien commencé, avec notamment les entretiens avec les anciens présidents, puisque cheikh Amine Gemayel, qui fait partie de l’opposition, avait qualifié sa rencontre avec l’émissaire syrien de « bon début ». Mais c’est plus tard que tout a basculé, notamment lors du déjeuner qui a réuni M. Moallem avec les députés membres de l’opposition, Boutros Harb et Nassib Lahoud, à la table de M. Issam Farès. Comme pour se dédouaner d’avoir accepté de participer à ce déjeuner, M. Lahoud avait tenu une conférence de presse dans laquelle il avait affirmé avoir réclamé le retrait total des troupes syriennes du Liban. Et la riposte syrienne ne s’est pas fait attendre. C’est en présence du rival déclaré – au moins électoralement – de M. Lahoud, le vice-président de la Chambre, Michel Murr, que M. Moallem a choisi de répondre d’une façon bien peu diplomatique. Il a affirmé que M. Lahoud n’a pas réclamé le retrait total des Syriens, mais l’application de l’accord de Taëf. La démarche rappelle des propos du président syrien Bachar el-Assad à la veille de la reconduction du mandat du président Émile Lahoud, lorsqu’il laissait entendre que les alliés de la Syrie devraient voter en faveur de cette reconduction. Mais cette déclaration, qui ressemblait fort à un désaveu, n’a pas atteint l’effet escompté, et pour bien montrer que l’opposition n’est plus prête à faire la moindre concession, et aussi sans doute pour éviter que certaines personnalités ne soient tentées de faire cavalier seul, Walid Joumblatt a exigé au cours de la réunion, dite « Bristol-3 », que le communiqué final réclame un retrait syrien total. Il a aussi, dans une déclaration ultérieure, demandé des grues « pour emporter le Beau Rivage et ses annexes ». Cette déclaration virulente coïncidait d’ailleurs avec les propos du sous-secrétaire d’État américain adjoint pour le Proche-Orient, David Satterfield, dans laquelle il affirmait que la seule chose que les Américains attendent de la Syrie, c’est l’application de la 1559, et rien d’autre. Autrement dit, les positions sont désormais claires : il n’y aurait plus de place pour les demi-mesures et les tentatives d’apaisement. L’opposition se rapproche de plus en plus du plafond de la résolution 1559, et le pouvoir durcit le ton et ne semble plus prêt à jeter du lest. Quant à M. Moallem, il est rentré à Damas et ne compterait pas reprendre sa mission de sitôt. En s’alignant, selon le pouvoir, sur les positions internationales, l’opposition aurait donc fait échouer la mission de l’ambassadeur syrien, mais aussi rejeté toutes les initiatives d’ouverture de la part du pouvoir. Il s’agit notamment du projet de loi électorale basé sur le caza selon les désirs du patriarche maronite Mgr Sfeir et d’un grand nombre de figures de l’opposition, et des déclarations cordiales à l’égard du général Michel Aoun. Désormais, l’atmosphère est à la confrontation, et le terrain de cet affrontement sera le Parlement qui devrait étudier dans les prochains jours le projet de loi présenté par le gouvernement. Le duel s’annonce féroce, et aucune des deux parties ne veut plus d’un compromis. Les sources proches de l’opposition laissent entendre que plus l’affrontement sera dur et plus il y aura des possibilités d’une intervention internationale. Quant au pouvoir, il pense avoir encore les moyens de mettre en échec les plans de l’opposition. Le mois de février devrait être édifiant. Scarlett HADDAD
L’idée était assez subtile, et elle aurait pu faire son chemin sur la scène politique et briser le mur de durcissements réciproques qui divise aujourd’hui les Libanais entre eux, et les Libanais et les Syriens. La tournée de Walid Moallem auprès de grandes figures libanaises avait été bien étudiée et visait à faire d’une pierre deux coups. D’une part, il s’agissait de...