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Actualités - RENCONTRE

Rencontre - L’art minutieux du trompe-l’œil Le monde de Gina Succar, un monde plus beau (photos)

Elle refait le monde à sa façon. Jaune, bleu, rouge, avec des fleurs, un ciel d’été, un chat à la fenêtre ou un voilier qui passe, ce monde gris et las devient, d’une manière évidente, tellement plus heureux. Il suffit de voir la colline de Karm el-Zeitoun, rebaptisée «la colline des hirondelles», après le gros travail de Gina Succar et de Help Lebanon et ses sponsors pour comprendre que, quelque part, cette femme est une vraie fée. C’est avec beaucoup de talent et une grande générosité que Gina Succar a fait du trompe-l’œil, qui attire aussi l’œil séduit, un métier en même temps qu’une passion. De la simple toile aux centaines de maisons de Karm el-Zeitoun, en passant par des panneaux pour Solidere et des intérieurs sublimes et parfois fous, elle a imprimé sa touche et une trace dans le paysage quelquefois sans couleurs de la capitale et du quotidien. Ce travail, très précis, qu’elle fait souvent, accrochée à une balançoire ou un échafaudage de fortune, suspendue à 5m de hauteur, ou plus, elle tient à l’accomplir toute seule. «Je ne suis pas commerciale; je n’ai pas envie que quelqu’un d’autre que moi exécute mon travail, tout le plaisir est là. Je peins avec mon cœur.» De plus en plus grand «Moi, quand je travaille, je sens tellement d’émotions, parfois j’ai la chair de poule...» Son accent venu d’ailleurs, ses mots maladroits prononcés dans un arabe particulier, «on me prend souvent pour une Arménienne», prouvent bien que Gina Succar n’est pas libanaise. Et pourtant… Succar est son nom de jeune fille, même si elle est née en Argentine de parents libanais, qu’elle a vécu son enfance dans ce pays lointain, avant de rejoindre le Brésil dont elle retiendra les couleurs et la bonne humeur. Car Gina est une femme souriante, optimiste, superbement gaie. Un bol d’air frais, comme ses dessins. «J’ai toujours été très fantaisiste. J’ai besoin de m’échapper du monde réel que je trouve épouvantable.» Elle a commencé à dessiner dès ses premières années, «des histoires de fées et de princes charmants. J’étais, précise-t-elle, un enfant très timide et introvertie, c’était mon moyen de communiquer avec le monde.» Quelques années plus tard, elle quitte ses pages quadrillées pour des toiles de 70 x 50 cm. «Je faisais des dessins graphiques et figuratifs.» Boulimique de travail et curieuse d’épanouir ses talents, elle va même illustrer des couvertures de revues culturelles argentines, faire des céramiques, «j’avais envie de tout peindre, même la nappe sur laquelle je mangeais!», avant de s’attaquer à un premier mur en extérieur. «C’est bien la seule fois que j’ai exécuté un travail sans le concevoir moi-même.» Le coup d’essai sera un coup de maître, l’élève autodidacte apprend vite et seule, et commence à se faire remarquer. Un retour aux sources En 1993, Gina débarque au Liban avec son époux Salim, dont elle décrira, en quelques mots, la belle histoire d’amour qui la rend encore heureuse aujourd’hui. «J’ai vu que, malgré la guerre, il y avait une vie dans ce pays.» Elle rencontre des décorateurs qui lui demandent d’habiller les murs de certaines maisons. Salles de bains, WC, salles à manger, salons, puis garages, célèbres restaurants de la capitale, Al Dente, Mijana, halls de banque, ascenseurs d’hôtel, le Musée maritime de la Planète de la découverte, les peintures de Gina sont partout, différentes, mais toutefois reconnaissables. «Quelqu’un m’a dit que c’était par les couleurs chaudes et la sérénité qu’elles transmettent.» Il y a trois ans, elle démarre avec Help Lebanon le magnifique projet, tant humain qu’urbain, de repeindre la colline de Karm el-Zeitoun (une suite est prévue, en 2005, vers le Forum de Beyrouth). Elle connaît à présent chaque coin et recoin de ce quartier très défavorisé; elle se souvient encore de la plupart de ses habitants, toutes les anecdotes et les réactions qui se rattachent à cette belle aventure. «Lorsqu’on travaille sur un quartier, c’est très différent. On parle avec les voisins, on échange des idées, on essaie de les convaincre, on prend le café chez eux.» Eux n’ont certainement pas oublié cette femme qui, en habit de travail et le sourire aux lèvres, passait des journées entières à verser dans leur quotidien un peu de couleur et beaucoup de bonheur. Carla HENOUD
Elle refait le monde à sa façon. Jaune, bleu, rouge, avec des fleurs, un ciel d’été, un chat à la fenêtre ou un voilier qui passe, ce monde gris et las devient, d’une manière évidente, tellement plus heureux. Il suffit de voir la colline de Karm el-Zeitoun, rebaptisée «la colline des hirondelles», après le gros travail de Gina Succar et de Help Lebanon et ses sponsors pour...