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Actualités - REPORTAGE

Ce qu’ils en pensent - Loi Electorale

Le suspense a été levé, mais rien n’est encore joué. En soumettant au Conseil des ministres un projet basé sur l’adoption du caza comme circonscription électorale et en découpant Beyrouth selon des critères inhabituels, avec la volonté affichée de permettre à chaque communauté d’élire ses représentants, le ministre de l’Intérieur a provoqué une vague de réactions aussi multiples que diverses. Mais c’est surtout le sort réservé à Beyrouth qui soulève le plus de critiques, notamment dans les milieux proches de l’ancien président du Conseil, Rafic Hariri, principale cible du projet officiel. Nous avons demandé au député Jean Oghassépian ce qu’il en pense. Jean Oghassépian, député de Beyrouth, membre du bloc Hariri Q. : Que pensez-vous du projet de loi électorale présenté par le ministre de l’Intérieur et que change-t-il pour vous ? R. : « À première vue, je dirais que ce projet ne respecte pas le principe d’égalité entre les Libanais. Il ne pousse pas non plus à la participation et ne reflète pas du tout un esprit d’ouverture chez ceux qui l’ont préparé. Il semble avoir été élaboré en fonction de la volonté et des intérêts des gens du pouvoir, avec un objectif évident, réduire la dimension politique et populaire de M. Rafic Hariri. En vérité, c’est surtout le cas pour Beyrouth, car dans les autres régions, c’est le principe du caza qui a été adopté. Mais à Beyrouth, il y a un déséquilibre flagrant entre les circonscriptions, notamment sur le plan du nombre des électeurs par rapport au nombre de sièges. Si l’on regarde de plus près, on découvre qu’un tiers des électeurs choisira les deux tiers des députés de Beyrouth. C’est le cas notamment de la première circonscription qui regroupe les deux tiers des électeurs alors que le nombre de sièges est de six seulement, sur les 19 que compte Beyrouth. Le projet prévoit de faire d’Achrafieh une circonscription à part entière. J’accepte l’idée car elle fait partie de l’une des revendications essentielles de l’opposition. Mais pourquoi avoir procédé de la sorte avec les deux autres circonscriptions ? Si l’objectif déclaré est d’adopter le critère confessionnel et de permettre à chaque confession de choisir ses représentants, pourquoi n’est-il pas adopté partout ? » Q. : Le caza, c’est un peu cela… R. : « Je comprends bien l’idée du caza pour toutes les régions du Liban. Mais à Beyrouth, les critères adoptés sont différents. Le projet est suspect et montre une partialité évidente de la part du pouvoir et du gouvernement. Comment dans ces conditions peuvent-ils ensuite se déclarer neutres ? Le ministre de l’Intérieur a d’ailleurs déjà partagé les parts avant même que les élections n’aient lieu. Ce qui montre bien que le projet a été établi selon les intérêts du gouvernement. Il a ensuite assorti ses propos de menaces directes aux électeurs, au cas où ses estimations ne seraient pas respectées. Le moins qu’on puisse dire, c’est que tout cela n’indique pas un esprit démocratique. » Q. : Vous-même, vous devriez vous présenter dans la deuxième circonscription, celle que se partagent les chiites et les Arméniens ? R. : « Voyez-vous cela ? Apparemment, le pouvoir considère que les chiites ont des origines arméniennes ou le contraire. Bref, notre destin, au moins électoral, semble lié. En ce qui me concerne, je peux vous dire que le côté personnel importe peu. Si M. Hariri voudra de moi sur sa liste, je me présenterai dans cette circonscription. Sinon, je ne serai pas candidat. Et après avoir été ancien officier, je serai ancien député. Je trouve par contre que ce qui se passe à Beyrouth est déplorable. Cela me désole. » Q. : Mais M. Hariri lui-même a annoncé son intention de se porter candidat dans la deuxième circonscription. Qu’en pensez-vous ? R. : « Je trouve que son idée est courageuse. Il relève le défi que lui lance le pouvoir et confirme qu’il a réellement la stature d’un leader. Je pense qu’il l’emportera même dans cette circonscription et il prend en tout cas de court le pouvoir. » Q. : Pensez-vous que le projet de loi sera adopté au Parlement ? R. : « Je crois que oui. Nous allons certes réclamer des amendements, notamment pour le découpage de Beyrouth. Mais je ne sais pas dans quelle mesure l’opposition mènera la bataille sur ce sujet. Après tout, dans beaucoup de régions, elle a obtenu ce qu’elle voulait, avec l’adoption du caza comme circonscription électorale. Mais le résultat se fait déjà sentir, car le langage confessionnel est en train d’occuper la scène et cela ne sert pas le climat général dans le pays. » Ali Masri, étudiant en sciences politiques Q. : Que pensez-vous du découpage de Beyrouth en circonscriptions à base confessionnelle ? R. : « Je crois que cela reflète une réalité sur le terrain. Personnellement, je suis contre l’approche confessionnelle, mais le système libanais est ainsi fait et il faut en tenir compte dans le découpage électoral. Cela fait des années que l’on nous propose de grandes circonscriptions, sous prétexte qu’elles favorisent l’unité et la cohésion nationales. Or seul le comportement du pouvoir a réussi à créer une entente nationale. Pour le reste, c’est raté. Mais pour une fois, le découpage est réaliste et dans ces conditions, on ne pourra pas dire qu’une majorité impose sa volonté à la minorité. Chaque communauté élira ses représentants. Et on verra bien ce que cela donnera. Je trouve que le projet est cohérent, notamment pour les chrétiens et les chiites, qui jusque-là étaient à la merci des sunnites de Beyrouth. » Scarlett HADDAD

Le suspense a été levé, mais rien n’est encore joué. En soumettant au Conseil des ministres un projet basé sur l’adoption du caza comme circonscription électorale et en découpant Beyrouth selon des critères inhabituels, avec la volonté affichée de permettre à chaque communauté d’élire ses représentants, le ministre de l’Intérieur a provoqué une vague de réactions aussi...