Rechercher
Rechercher

Actualités - OPINION

Une escalade loyaliste télécommandée au nom du slogan « diviser pour régner »

La brusque poussée d’adrénaline des loyalistes, qui haussent considérablement le ton et se font fielleux, n’étonne pas outre mesure le camp des opposants. Qui observent que dans la logique, et dans le prolongement du coup de force dit de la prorogation, la télécommande allait fatalement, un jour ou l’autre, se tourner vers les riches ressources des dissensions confessionnelles. Pour durcir le conflit occurrent, élargir le fossé entre les Libanais, pour mieux les diviser en jouant tant sur les positions par rapport à la 1559 que sur la perspective des prochaines législatives. Une échéance qui permet de jeter facilement de l’huile sur le feu, à partir de propositions tendancieuses portant sur la loi électorale. Lesquelles donnent lieu à de soudaines attaques tant contre de vénérables instances religieuses que contre des leaderships politiques. De quoi déstabiliser la scène locale, y semer la confusion pour rendre l’édification d’une nouvelle république plus difficile une fois que le temple de la tutelle étrangère se sera écroulé. Toujours est-il que le virage à 180° effectué en quelques jours par Hassan Nasrallah en étonne plus d’un. Même un ministre se demande pourquoi le secrétaire général du Hezbollah se mue de conciliateur en fer de lance exacerbé du loyalisme dur. En gommant au passage les engagements, encore tout chauds, pris au sujet de la démocratie consensuelle, pour prôner un langage de domination de la majorité numérique et en s’abritant derrière l’argument selon lequel cette majorité ne saurait se laisser guider par la minorité. Le ministre cité est d’autant plus surpris, selon ses dires, qu’il n’y a pas longtemps il a discuté avec le sayyed, sur un mode tout à fait raisonnable, de la loi électorale comme des effets de la 1559. Le responsable s’était alors laissé dire que le Hezb n’avait pas de problèmes avec le découpage des circonscriptions, moyennes, ou cazas. Qu’il souhaitait une loi prenant en compte les appréhensions de certaines parties. Qu’il s’intéressait aux résultats dans l’ensemble du pays, non dans la Békaa ou au Sud seulement. Qu’une cellule avait été ainsi chargée de procéder à une étude englobant la carte politique de la région centrale, à savoir le Mont-Liban. Parallèlement, on le sait, le Hezb avait dépêché, dans un geste évident d’ouverture, une délégation à Bkerké. Pour recevoir ensuite une délégation de Kornet Chehwane. Or voici que Nasrallah tire brusquement sur tout ce qui bouge à l’Est. En faisant une boulette des déclarations sur la nécessité d’un dialogue constructif, en vue de promouvoir les dénominateurs communs. Ce qui avait donné lieu, du reste, à un communiqué rassembleur, à la suite d’un colloque de la Rencontre libanaise pour le dialogue auquel avaient participé diverses forces actives. Tout cela est maintenant du passé. Le député Nasser Kandil se déchaîne encore plus que Nasrallah. Ce qui signifie clairement, affirment des opposants, que l’on veut montrer que les Libanais sont divisés par eux-mêmes. Car, juste auparavant, l’on avait pris soin de faire savoir que la Syrie n’intervenait pas du tout dans la question de la loi électorale, affaire libanaise purement intérieure. On avait de plus envoyé des signaux positifs, en dépêchant le vice-ministre des Affaires étrangères, Moallem, à Beyrouth pour montrer que les rapports politiques officiels prenaient enfin le pas sur le traitement par les services de renseignements. La Syrie ayant de la sorte exhibé patte blanche, et de velours, la relance des discordes intérieures ne devrait être imputée qu’aux Libanais. C’est l’objectif de l’escalade, estiment ces opposants, pour qui la démonstration vise en définitive à prouver qu’on ne peut laisser les Libanais sans tutelle, car ils s’entre-déchireraient aussitôt. Mais d’autres sources, sans écarter l’idée que cette sorte de manipulation ait pu effleurer l’esprit des décideurs, pensent que tout le monde a dépassé ce stade. Car après la 1559, les Occidentaux ne s’en laissent plus conter. Pour ces professionnels, il est peut-être erroné de lier le revirement du Hezbollah, doublé de son durcissement sur le terrain au Sud, aux décideurs. Qui, probablement, ne souhaitent pas mettre au défi des Américains qui sont manifestement à bout de nerfs en ce qui les concerne. L’explication, ajoutent ces observateurs, il faudrait peut-être la voir du côté de l’Iran. Pays qui, selon certaines informations de presse, serait infiltré par des commandos secrets américains et aurait tout lieu de craindre des opérations militaires d’envergure contre son territoire à cause de l’Irak. Cependant, si l’on va du côté de l’hostilité aux États-Unis, les Syriens devraient eux aussi en éprouver beaucoup, après le veto posé par Washington, sur instigation israélienne, à la vente de missiles russes à Damas. Capitale qui, pour en retourner à la scène locale, devra se soucier de voir le langage de ses fidèles du cru s’accorder au sien propre, qui reste mesuré et positif. On devra en savoir sans doute plus à l’issue de la réunion du Conseil supérieur libano-syrien prévue après l’Adha. Et après le retour du président Assad de Moscou, justement. Beaucoup de spécialistes s’attendent qu’il y ait ensuite une importante initiative syrienne en direction de l’Occident pour ôter à ce dernier une carte de pression. Donc, dès février, il faudrait s’attendre à un repli sur la Békaa et à une fermeture des antennes des services dans les différentes régions de ce pays. Avec une réduction du rôle d’Anjar, institutionnalisation marquée des relations bilatérales, impliquant la réactivation du Bureau libanais permanent à Damas. Philippe ABI-AKL

La brusque poussée d’adrénaline des loyalistes, qui haussent considérablement le ton et se font fielleux, n’étonne pas outre mesure le camp des opposants. Qui observent que dans la logique, et dans le prolongement du coup de force dit de la prorogation, la télécommande allait fatalement, un jour ou l’autre, se tourner vers les riches ressources des dissensions confessionnelles. Pour...