Rechercher
Rechercher

Actualités - CHRONOLOGIE

Environnement - Tollé général après l’abattage de centaines de pins à la forêt de Beyrouth Des centaines d’arbres arrachés pour édifier une caserne des FSI(photo)

La décision de la municipalité de Beyrouth d’arracher quelque deux cents arbres plantés dans une parcelle adjacente à la Forêt des pins, lundi, pour dégager un terrain où doivent être construits des bâtiments provisoires pour la section de la circulation des Forces de sécurité intérieure (FSI), a causé des remous dans la capitale. Pourquoi n’avoir choisi que cet espace vert, alors que la verdure est si rare dans la ville, pour en consacrer une partie à des constructions en béton ? Selon Rachid Jalkh, membre du conseil municipal, « cette décision a été prise il y a sept ou huit mois ». Il poursuit : « Nous n’étions pas favorables à cette option au départ, mais nous avons tenu compte du fait que les FSI ont besoin d’être présents dans cette région-là. Il s’agit de l’un des rares terrains qui n’ait pas fait l’objet d’une mainmise. » Le terrain est proche du rond-point de Tayouné et séparé de la Forêt des pins par la route. Les arbres qui s’y trouvaient devraient être transportés dans la pépinière de la Forêt des pins pour être plantés ailleurs. En principe, les constructions étant provisoires, le terrain devrait être rendu par la suite à la municipalité. Mais voilà, l’affaire a provoqué une véritable levée de boucliers auprès des associations écologiques. Une vingtaine des plus actives d’entre elles sur la scène locale a publié hier une pétition demandant « à la municipalité de Beyrouth, aux responsables administratifs, aux ministères de l’Intérieur et de l’Environnement et à la Direction générale de l’urbanisme (DGU) de revenir sur cette décision qui ne respecte pas les droits des habitants et prive la capitale d’un espace vert dont elle a urgemment besoin ». Le député Béchara Merhej a lui aussi protesté contre le choix de ce terrain. « Ces mesures injustes prises hier concernant la Forêt des pins nous poussent à nous interroger sur l’avenir de cette ville, a-t-il dit. De quel droit ont-ils poignardé le poumon par lequel la capitale respire difficilement, avec toute la pollution résultant du trafic ? Les autorités auraient dû opter pour l’expropriation d’une autre parcelle de terrain en vue de l’édification des bâtiments des FSI. Toute partie de la Forêt des pins qu’on détruit ne peut être compensée. » Les écologistes, pour leur part, ont considéré que « le conseil municipal de Beyrouth a pris une décision qui ne correspond pas à la nature du travail municipal, censé assurer le développement local et employer les biens-fonds dans le meilleur intérêt des habitants ». « Or le conseil municipal a approuvé une demande faite par l’État pour renoncer au terrain n° 1925 à Mazraa, poursuit le communiqué. L’article premier de la loi des municipalités stipule que les conseils municipaux sont des comités de gestion locaux, qui représentent des personnes morales jouissant d’une indépendance administrative et financière. Ceux-ci n’ont donc pas d’obligation envers l’État, surtout si c’est aux dépens de l’intérêt des citoyens, et ils ne sont pas tenus de prendre des décisions qui ne sont pas en harmonie avec la préservation de la beauté de la ville. » Par ailleurs, les associations ont rappelé que « la capitale manque cruellement d’espaces verts », et que « certaines régions de la capitale, dont la Forêt des pins, ont été protégées et classées zones non edificante par le décret 434 de 1943, adopté en vertu de la loi n° 8 de 1939, chose que les responsables ignorent ou feignent d’ignorer ». Des espaces verts qui s’étiolent Avec cette parcelle de terrain, c’est un espace vert de plus qui disparaît. Sans aucune raison valable, selon Riad Kange, ancien vice-président de l’Ordre des ingénieurs, qui habite non loin du terrain controversé. Selon lui, trois terrains ont été consacrés au relogement de cette section de la circulation des FSI, dont l’un d’eux est cette parcelle boisée. « La municipalité possède une autre parcelle près de la mosquée des Pins à Chatila, un ancien terrain de football qui sert de dépotoir improvisé actuellement, souligne-t-il. Pourquoi n’avoir pas pensé à concentrer la section du trafic dans ce seul périmètre au lieu d’opter pour trois endroits différents ? » M. Kange raconte qu’il a commencé à remarquer le travail des bulldozers vendredi dernier, et que celui-ci s’est poursuivi lundi, malgré ses protestations. « Pour le voisinage, cette amputation est un coup dur puisque cela va modifier la vie dans le quartier, dit-il. Cette parcelle n’était pas reboisée depuis longtemps, et les habitants se portaient volontaires pour arroser les jeunes pousses. Il y a quelques années, un projet de conservatoire y avait été envisagé, mais il avait été rejeté par la DGU. Et aujourd’hui, voilà où nous en sommes. » Ali Darwiche, trésorier de Green Line et conseiller régional de l’Union mondiale pour la conservation de la nature (IUCN), pense lui aussi que la localisation des nouveaux bâtiments aurait pu être déplacée ailleurs. Il relève plus d’un « scandale » dans cette affaire. « Cette parcelle a été boisée il y a deux ans, explique-t-il. Ce que révèle surtout cette affaire, c’est le manque de planification au sein du conseil municipal et le manque de vision au niveau du développement des espaces verts à Beyrouth. Pourquoi avoir planté des arbres pour les arracher ensuite ? N’est-ce pas du gaspillage ? » À travers l’utilisation d’une partie de la Forêt des pins (réhabilitée par la municipalité grâce à des fonds de la Région d’Île-de-France) pour une construction, aussi provisoire soit-elle, c’est en fait les habitants de la capitale qu’on punit. Beyrouth est l’une des villes où le taux d’espaces verts est le plus réduit au monde, n’atteignant que 0,8 mètre carré par habitant, alors que la moyenne mondiale est d’une vingtaine de mètres carrés. Les conséquences sociales, écologiques et sanitaires d’une telle situation se font désormais cruellement sentir. À quand une action en faveur de la restitution de ce qui n’est pas moins qu’un droit fondamental de l’homme ? Suzanne BAAKLINI

La décision de la municipalité de Beyrouth d’arracher quelque deux cents arbres plantés dans une parcelle adjacente à la Forêt des pins, lundi, pour dégager un terrain où doivent être construits des bâtiments provisoires pour la section de la circulation des Forces de sécurité intérieure (FSI), a causé des remous dans la capitale. Pourquoi n’avoir choisi que cet espace vert,...