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Actualités - OPINION

TRIBUNE La communauté chiite et la bataille contre la mainmise syrienne

Déchirés par la longue guerre qu’ils ont connue, les Libanais ont besoin de rassembler toutes leurs forces professionnelles, politiques, syndicales, religieuses et laïques pour œuvrer à la réunification, la démocratisation et la modernisation du Liban. Par contre, la Syrie, bénéficiaire de relations privilégiées avec les États-Unis, avait, à partir de 1991, travaillé au démantèlement du Liban, à l’incarcération et à l’exil de plusieurs de ses figures symboliques en milieu chrétien, empêchant de ce fait l’apparition d’une relève politique, en raison de l’identification forcée avec les chefs de guerre qu’a provoquée la discrimination faite à leur égard. La Syrie avait également travaillé à remplacer la guerre civile chaude par une guerre civile froide, poussant chaque communauté à vivre ses problèmes et ses soucis d’une manière indépendante de l’autre. Aux chrétiens, les Syriens et leurs alliés disaient que leur nombre était devenu insuffisant après la guerre, qu’ils avaient perdu leurs relations internationales... et qu’ils ne leur restaient plus qu’à se rallier au régime syrien, seul garant des minorités, pour obtenir une protection sécuritaire. Le discours tenu aux communautés musulmanes était inverse. Le sentiment instillé par la Syrie à ces communautés, c’était que seule la présence syrienne pouvait leur assurer une respectabilité politique, sociale ainsi qu’une représentation équitable au niveau du pouvoir – inexistante avant la guerre –, une représentation que la communauté chrétienne pourrait remettre éventuellement en question pour revenir au modèle du « maronitisme politique » qui existait avant la guerre. Et pour bloquer totalement la situation et permettre à la classe politique prosyrienne de se maintenir et de renouveler ses allégeances traditionnelles, le régime syrien avait établi un cycle de corruption qui a touché de vastes secteurs de l’économie, notamment le secteur bancaire. La confiance des Libanais en eux-mêmes Longtemps, l’Occident a considéré que la division et la fragmentation communautaires étaient inhérentes à la nature même du Liban et que celui-ci était donc « un pays aux tendances suicidaires » dont la stabilité ne pouvait être assurée que de l’extérieur. Cette idée martelée par tous les centres de décision avait considérablement contribué à miner la confiance des Libanais en eux-mêmes et dans l’avenir de leur pays, rendant de la sorte acceptable l’idée de la « colonisation » syrienne du Liban. Cette résignation n’est, heureusement, pas le fait de ceux qui continuent de lutter pour démontrer la capacité des Libanais à dépasser les clivages de la guerre, à affronter le système imposé par la Syrie au Liban et à imposer une véritable paix dans le pays. La visite de Walid Joumblat au domicile de Samir Geagea est un exemple clair de cette volonté libanaise de recréer une entente nationale en dépit de tous les efforts de blocage entrepris par le pouvoir syrien. Mais l’adhésion des communautés libanaises aux thèses de l’opposition n’est pas uniforme. Longtemps, le problème de la libération de l’occupation israélienne a été perçu comme une revendication musulmane, alors que la question de la souveraineté nationale était considérée comme une revendication chrétienne, que les prélats maronites avaient évoquée dans leur communiqué du 20 septembre 2000. Les « chiites » et la « légitimité » syrienne Après quatre ans d’efforts incessants, les différentes communautés libanaises commencent à unifier leurs objectifs. Seule la communauté chiite semble être jusqu’à présent réfractaire aux objectifs de l’opposition. L’avenir du Hezbollah, la place de la communauté chiite sur l’échiquier interne, après le retrait des troupes syriennes du Liban, les changements sociaux qui se sont produits sont des questions qui se posent au sein de cette communauté. Par certains côtés, les chiites du Liban se comportent comme ceux, parmi les maronites, qui avaient refusé l’indépendance de leur pays et le retrait des troupes françaises en 1943 parce qu’ils considéraient que le maintien de ces troupes étrangères leur assurerait une garantie d’ordre sécuritaire. La peur évoquée par les chiites du Liban à l’égard du retrait des troupes syriennes doit être prise en considération par l’opposition libanaise, qui est appelée à dépasser les idées simplistes et préconçues présentées par certaines personnalités politiques. La communauté chiite représente aujourd’hui le dernier pilier libanais sur lequel repose « la légitimité » de la présence syrienne au Liban. Il revient aux autres communautés d’établir un dialogue de fond sur les moyens d’assurer la participation chiite à la bataille menée contre la mainmise syrienne sur le pays. Il s’agit d’une priorité qui dépasse la simple « union électorale » de l’opposition, une priorité qui pourrait jouer un rôle important dans le rétablissement du Liban comme principal agent de démocratisation et de la stabilité du monde arabe. Dr Farès SOUHAID, député
Déchirés par la longue guerre qu’ils ont connue, les Libanais ont besoin de rassembler toutes leurs forces professionnelles, politiques, syndicales, religieuses et laïques pour œuvrer à la réunification, la démocratisation et la modernisation du Liban.
Par contre, la Syrie, bénéficiaire de relations privilégiées avec les États-Unis, avait, à partir de 1991, travaillé au...