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Actualités - CHRONOLOGIE

Conférence - Séminaire d’ONG régionales sur la souveraineté alimentaire Les dessous d’une mondialisation galopante (photo)

Une planète surpeuplée, une production alimentaire de masse, une mondialisation galopante... Quelles conséquences sur les populations rurales et les pays en développement, notamment les pays de la région ? Un réseau d’ONG d’Asie centrale et de l’Ouest, et de l’Afrique du Nord, a été formé depuis le congrès qui a marqué le cinquième anniversaire du Sommet mondial de l’alimentation, en 2002, pour travailler à la sensibilisation des populations sur la « souveraineté alimentaire » et la conséquence des accords de libre-échange sur l’agriculture locale. Depuis ce temps-là, plusieurs réunions ont regroupé un grand nombre d’ONG. La dernière en date s’est tenue récemment à Beyrouth, à l’invitation de Green Line. Le concept de souveraineté alimentaire se définit par le droit des peuples à décider de ce qu’ils veulent consommer, comment produire et d’où importer leurs denrées alimentaires. Or, selon les ONG, beaucoup d’accords internationaux et bilatéraux de libre-échange mettent la pression sur les pays les plus pauvres, généralement agricoles. Même les petits agriculteurs des pays industrialisés, puissants partenaires de ces accords, se trouvent désavantagés par cette agriculture de masse. C’est de ce sujet que les ONG ont discuté durant le dernier congrès au Liban, ce pays étant lui-même très concerné par ce problème puisqu’il a déjà signé l’Accord de libre-échange interarabe, ainsi que le partenariat euro-méditerranéen. « Beaucoup d’accords ont été signés par le Liban à mainlevée, sans que des études approfondies n’aient été effectuées, dénonce Ali Darwiche, membre de Green Line. D’autres pays envoient des délégations entières aux négociations, avec des équipes pluridisciplinaires. Nos ministres s’y rendent souvent seuls ou avec quelques spécialistes du ministère, ainsi qu’on nous l’a souvent rapporté. Les conséquences peuvent être très dangereuses. » Ainsi, M. Darwiche met en garde contre l’accord interarabe qui risque de ruiner le secteur agricole libanais, déjà considérablement affaibli. En effet, au Liban, le coût de production est bien supérieur à celui des autres pays arabes. « Pour l’accord interarabe, nous avions plusieurs années de délai pour nous préparer et nous n’avons rien fait, explique M. Darwiche. Il entre en vigueur en janvier. En ce qui concerne l’accord euro-méditerranéen, on nous a accordé sept ans de répit. Deux sont déjà révolus et aucun effort n’est visible. » De même, a-t-il remarqué, aucun débat public sur les organismes génétiquement modifiés (OGM) n’est engagé au Liban. « Plusieurs produits importés en comportent, et nous n’avons aucun moyen de les reconnaître parce que aucune étiquette ne les indique », souligne-t-il. À un niveau mondial, M. Darwiche fait remarquer qu’ « une moyenne de 10% des produits agricoles sont voués au commerce extérieur, le reste étant destiné à être consommé localement dans chaque pays ». « L’ouverture des marchés peut nuire à l’agriculture parce que certains pays pourraient arrêter de produire », poursuit-il. Mais quelle est l’alternative dans le contexte actuel ? « Il ne faut pas signer des textes complets d’accords sans émettre des restrictions, et ne pas accepter des conditions standards, considère-t-il. L’agriculture et l’eau ne devraient pas être considérées comme des denrées car ils sont essentiels à la vie. Aujourd’hui, les grandes compagnies nous vendent la graine, l’herbicide qui va avec... les agriculteurs sont désormais sous leur pouvoir. » Lutte contre le terrorisme et libre-échange Mariam Rahmanian, de l’association iranienne Cenesta (Centre pour le développement durable), n’est pas vraiment mécontente que la candidature de son pays ait été rejetée vingt fois à l’Organisation mondiale du commerce (OMC). « Mais notre gouvernement y tient, et nous n’avons pas vraiment le choix à long terme, dit-elle. Toutefois, il ne faut pas perdre de vue que la mondialisation peut pousser les agriculteurs à la faillite. De tels séminaires nous permettent d’apprendre à approfondir de telles questions et à éviter au maximum les risques. » Mais à quoi peut mener l’action des ONG dans un contexte de mondialisation galopante et de compagnies superpuissantes ? « La critique peut s’avérer très efficace, explique Mme Rahmanian. Cela permet d’ouvrir des débats, de pousser les gens au défi, de les sensibiliser à l’importance de ces questions. Mais ce n’est pas le seul avantage : les ONG entretiennent des relations auprès des décideurs pour influer au maximum sur le cours des choses. » Les accords internationaux ont été vivement critiqués par Abdel Aziz Choudry, de l’association Gatt Watchdog, basée en Nouvelle-Zélande mais intéressée par les problèmes des pays en développement. « Les nations puissantes préfèrent signer des accords bilatéraux avec des pays en développement, pour mieux en profiter, explique-t-il. Depuis le 11 septembre, il existe un lien très direct entre la lutte contre le terrorisme et le libre-échange. Pour les États-Unis par exemple, il s’agira non plus seulement d’imposer un modèle, mais d’en tirer des avantages politiques. » Il ajoute : « De plus, les pays riches poussent les petits pays à ouvrir leur économie tout en gardant la leur protégée.» Selon le militant, le rôle principal des ONG est de déterrer des informations sur les véritables bénéficiaires de ces accords. Ces informations peuvent être complétées par d’autres obtenues à travers le monde, pour se faire une idée de la situation générale. « Munis de ces informations, nous pouvons alors nous adresser à la presse, établir des contacts à différents niveaux avec les gouvernements, nous entretenir avec diverses catégories de la population comme les agriculteurs, les étudiants... », souligne M. Choudry. Il est persuadé que la diffusion de l’information effraie réellement les grandes organisations, même si celles-ci ne modifient pas encore leurs plans. « À l’OMC, on ne donne pas voix au chapitre aux pays du tiers-monde, poursuit-il. En revanche, le système de l’organisation lui-même n’est pas aussi stable qu’on le pense. Il est possible de construire une opposition dans les différents pays, mais il y a un travail de longue haleine à entreprendre. » Profit pour quelques-uns ou alimentation pour tous ? Les inégalités entre pays riches et pauvres se retrouvent bizarrement à l’intérieur même des sociétés des pays industrialisés. C’est ce que confirme Antonio Onorati, président de l’association italienne Crocevia, qui participait également au séminaire. Fondée en 1958, cette association est bien placée pour comprendre la situation des agriculteurs italiens, qu’elle suit de près depuis bientôt cinquante ans. « L’Europe soutient un seul type d’agriculture, l’industrielle, dans l’objectif de conquérir le marché international et de favoriser l’industrie agroalimentaire », explique-t-il. Résultats selon lui : « Une qualité de plus en plus médiocre, un consommateur qui subit les conséquences de cette politique », dit M. Onorati. Mais la croissance démographique dans le monde ne justifie-t-elle pas une production plus intense ? « Cet argument ne tient pas la route et cette donnée est fausse, soutient-il. Actuellement, la production agricole totale progresse plus rapidement que la démographie mondiale. Ce qui est en question, c’est l’accès des personnes à cette alimentation. Est-il utile de rappeler que 75% des habitants de la planète vivent dans un milieu rural ? » Or, selon lui, « la mondialisation détruit les fondements de l’agriculture familiale, ce qui ne peut que nuire au petit paysan ». Il ajoute : « Nous sommes face à un choix : du profit pour très peu de gens, ou de l’alimentation pour tout le monde. » Pour faire face à cela, justement, il y a ce que M. Onorati appelle un « hyper-réseau », un mécanisme planétaire d’associations engagées pour une répartition plus juste des richesses. Un autre son de cloche. S. B.
Une planète surpeuplée, une production alimentaire de masse, une mondialisation galopante... Quelles conséquences sur les populations rurales et les pays en développement, notamment les pays de la région ? Un réseau d’ONG d’Asie centrale et de l’Ouest, et de l’Afrique du Nord, a été formé depuis le congrès qui a marqué le cinquième anniversaire du Sommet mondial de...