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Communautés - Message de Noël du patriarche maronite Sfeir dénonce le « détournement de pouvoir » qui fait des Libanais des étrangers dans leur propre pays(photo)

Le patriarche maronite, le cardinal Nasrallah Sfeir, a dénoncé hier, dans son message de Noël, le « détournement de pouvoir » qui a transformé les Libanais en étrangers dans leur propre pays. « Il s’agit là d’une grave déviation du cours de la démocratie véritable, un déni des droits les plus élémentaires des citoyens comme aussi un véritable détournement des institutions gouvernementales », a-t-il dit, parlant de la manière dont sont conduites les affaires publiques. Le chef de l’Église maronite a signalé ce grave travers dans la vie nationale, sans omettre aussi de signaler les difficultés économiques et sociales que rencontrent les Libanais, sur fond d’espérance dans la vocation du chrétien à la vie divine. Voici le texte intégral du message de Noël du patriarche Sfeir.

«Noël est de retour cette année, sans la joie humaine qu’il porte d’habitude. Mais la joie spirituelle demeure plus rayonnante que jamais, et c’est finalement ce qui importe. Car la joie de la terre reste sur terre ; elle est passagère. Souvent, elle laisse un goût d’amertume et de regrets. Mais la fête de la Nativité du Seigneur, de l’Incarnation de Jésus, réalise le rêve antique né avec l’homme, et qui se transmet d’une génération à l’autre, celui de l’immortalité. C’est un rêve inné à l’homme. Cette immortalité, qui est le propre de Dieu, nous associe à sa nature éternelle. N’est-ce pas ce qui a poussé le premier homme à manger du fruit défendu du jardin, en cédant à l’instance du serpent qui avait séduit la première femme en affirmant : “Dieu sait que, le jour ou vous en mangerez, vos yeux s’ouvriront et vous serez comme des dieux, qui connaissent le bien et le mal” (Gen 3:5) Ce fut la première désobéissance qui rendit nécessaire un sauveur, selon les paroles de saint Augustin : “Heureuse faute qui nous a valu un tel rédempteur”.
« Dieu s’est incarné pour nous sauver et nous réconcilier avec son Père céleste, selon les paroles de Jean l’Évangéliste : “Ce n’est pas nous qui avons aimé Dieu, mais c’est Lui qui nous a aimés et qui a envoyé son Fils en victime de propitiation pour nos péchés” (1 Jn 4:10). Il est venu pour que nous sachions que “Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, pour que tout homme qui croit en lui ne périsse pas, mais ait la vie éternelle”. ( Jn 3:16), afin qu’il soit pour nous un modèle de sainteté de vie et de conduite, comme dit encore saint Jean : “Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie, Nul ne va au Père que par moi”. (Jean 13:6). Et afin qu’il nous associe à sa nature, selon les mots de saint Pierre : “Afin que vous deveniez ainsi participants de la nature divine”. Voilà comment fut réalisé l’antique rêve de l’humanité. Comme dit saint Irénée : “Car telle est la raison pour laquelle le Verbe s’est fait homme, et le Fils de Dieu, Fils de l’homme : c’est pour que l’homme, en entrant en communion avec le Verbe et en recevant ainsi la filiation divine, devienne fils de Dieu”. Ce que confirme aussi saint Athanase qui affirme : “Le Fils de Dieu s’est fait homme pour nous faire Dieu”. Une proposition reprise par le docteur angélique, saint Thomas d’Aquin, qui écrit : “Le Fils unique de Dieu voulant que nous participions à sa divinité, assuma notre nature, afin que Lui, fait homme, fit les hommes dieux” (Catéchisme de l’Église catholique : 457-460).
« Toutefois, peu d’hommes sont conscients de ces vérités de foi. Elles ne leur parviennent pas avec suffisamment de clarté, ou alors ils décident de les ignorer, ou encore ils ne les appliquent pas dans leur vie quotidienne. S’ils en étaient conscients et les appliquaient, ils ne se conduiraient pas comme ils le font, les guerres ne faucheraient pas tous les jours des victimes, comme nous l’avons vue sur notre terre, et comme nous le voyons toujours autour de nous depuis plus d’un demi-siècle (et voici qu’une nouvelle guerre s’est allumée il n’y a pas longtemps dans un pays qui nous est voisin), la faim ne ravagerait pas l’humanité, alors qu’une minorité jouit de tous les biens de la terre insouciante du sort du reste du monde. C’est là la cause première du terrorisme qui ravage le monde, des actes commis par désespoir par des hommes que la crainte de Dieu et l’idée du jugement qui les attends ont désertées. »

Le chômage
« Certes, la joie humaine n’est pas au rendez-vous. Et comment le serait-elle, puisque la majorité des Libanais se plaint de l’absence d’emplois, du chômage endémique, de difficultés matérielles, une plainte qui s’élève de toutes les catégories sociales ; d’hommes et de femmes qui souffrent de voir se prolonger une grève conduite par la classe la plus éveillée de la société libanaise, celle des professeurs universitaires ? Voici presque un mois que cette grève dure, et aucune solution satisfaisante ne lui a encore été trouvée, alors que les étudiants protestent contre ce temps perdu et s’interrogent sur les moyens de le compenser.
« Nous avons également recueilli de certains capitaines d’industrie une plainte contre l’accaparement par une minorité de personnes et de sociétés, de certains matériaux ou de certains moyens dont ils ont besoin pour pouvoir concurrencer les produits étrangers qui envahissent le marché local. La plupart des plaintes sont relatives à la cherté du courant électrique, du gaz, du téléphone, de la main-d’œuvre, alors que les accapareurs réalisent des profits exorbitants aux dépens du secteur industriel qui s’étiole. On peut en dire autant de l’agriculture. »

L’exode rural vers Beyrouth
« Si nos responsables avaient appliqué la partie de l’accord de Taëf relative à la décentralisation administrative et avaient développé les régions libanaises et surtout les zones rurales afin qu’elles continuent à être habituées grâce aux institutions nécessaires comme les écoles, les dispensaires, les usines, la ville, et la capitale en particulier n’aurait pas connu ce surpeuplement.
« Nous ne nous arrêterons pas aux différends qui opposent les tenants du pouvoir. Les causes en sont maintenant connues. En effet, les Libanais ont perdu toute possibilité et tout recours institutionnel pour demander des comptes aux dirigeants en place, après avoir été privés d’une loi électorale qui leur permette de choisir les députés qui doivent forger ces lois et tracer une politique pour le pays, pour en assurer les intérêts légitimes. En fait, ils en sont réduits à se sentir comme étrangers aux questions qui pourtant les intéressent directement. Il s’agit là d’une grave déviation du cours de la démocratie véritable, un déni des droits les plus élémentaires des citoyens comme aussi un véritable détournement des institutions gouvernementales. C’est ainsi que nous voyons totalement paralysés un certain nombre de nos institutions, comme le Conseil constitutionnel, le Conseil économique et social ainsi que des administrations comme l’Inspection centrale qui multiplie en vain les rapports sur les vices de comportement. Et voilà que la volonté d’un ministre s’impose, alors même que sa décision est illégale, et que sa clientèle politique envahit des postes que ses compétences ne leur permettraient jamais d’occuper. C’est là une des grandes lacunes du système, alors que guette cet autre et suprême danger qu’est le risque de voir le Liban, maillon faible de la région, se transformer en champ de bataille. »

L’abnégation
dans le service public
« Pourtant, en dépit des graves lacunes qui paralysent les institutions, nous continuons à espérer que se lève une nouvelle génération de jeunes de toutes les classes sociales et de toutes les communautés, consciente de ses responsabilités nationales. Nous continuons à espérer voir ces jeunes s’enrôler dans les rangs de partis nationaux sains et représentés sur l’ensemble du territoire, édifier un pouvoir reposant sur le désintéressement, la compétence, la probité, le souci de l’intérêt général, l’abnégation dans le service public, le contentement au gain. Nous continuons à espérer voir le Liban reprendre sa place au soleil dans la communauté des nations souveraines et libres, d’une souveraineté sans partage et d’une indépendance inaliénable. Sur cet espoir, nous demandons à Dieu, par l’intercession de la Vierge Marie, de faire de cette fête de la Nativité de son Fils unique une saison de justice, de grâce et de paix pour notre région et pour le monde, et qu’il accorde aux Libanais dans leur ensemble, résidents et émigrés, longue vie, afin que ces fêtes les retrouvent comblés de sa bienveillance et de ses bénédictions. »

Visiteurs
Par ailleurs, le patriarche a poursuivi hier son accueil des visiteurs. Il a notamment reçu une délégation de la ligue libanaise orthodoxe, M. Robert Boulos, le député Ali Osseirane et le ministre Khalil Hraoui.
Le patriarche maronite, le cardinal Nasrallah Sfeir, a dénoncé hier, dans son message de Noël, le « détournement de pouvoir » qui a transformé les Libanais en étrangers dans leur propre pays. « Il s’agit là d’une grave déviation du cours de la démocratie véritable, un déni des droits les plus élémentaires des citoyens comme aussi un véritable détournement des...