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Good Morning Babilonia*

Une expression (heureusement) peu courante : infection ou maladie nosocomiale. C’est-à-dire contractée à l’hôpital. Guillaume Depardieu, soigné pour un choc à la rotule, a dû par la suite se faire couper la jambe ! Et nous, la gangrène Taëf va nous mener où ?
Quelques jours avant la guerre d’Irak, Hariri promettait que le Liban s’en ressentirait le moins dans la région. Brillant pronostic : le pétrole, qui est l’essence de l’économie, flambe. Le bidon de super est à 15 dollars. Dont 10 dollars de taxe. Plus cher de 50 % que la pauvre Syrie. Avec une TVA à 10 %, un petit poste télé coûte 50 dollars de plus. Que serait-ce si on passait à 16 %, comme le propose le magnanime milliardaire. Depuis 96, les salaires n’ont pas bougé. Mais les prix compensent. Par un vertigineux, par un prodigieux, hystérique saut en hauteur. Sans aucune perche. Un moteur à explosion.
Partout ailleurs, on se demanderait non pas si la rue va se soulever, mais quand... Ici, échaudé par la révolution des pneus qui a fait sauter Karamé en 92, le pouvoir a désarticulé les syndicats. Et neutralisé, en les caressant dans le sens du poil, les partis qui peuvent mobiliser des masses. Depuis lors, tout le peuple se plaint qu’il n’y ait pas de peuple, pour agir ou réagir. Contre l’incurie, contre la corruption, contre la dégradation, contre l’injustice sociale. Contre la faim galopante. D’autre chose.
Sans courroie de transmission, la contestation semble donc étouffée dans l’œuf. Mais, quand trop c’est trop, il se produit parfois un irrépressible, un imprévisible mouvement sui generis, comme jadis le Printemps (encore une promesse Hariri !) de Prague.
Cependant, dans l’inconscient collectif, et c’est une chance pour le pouvoir (comme pour le pays, à tout prendre), c’est l’expectative qui domine pour le moment. On attend de voir : si la guerre civile va éclater en Irak. Sous les yeux ravis des Américains, qui engageraient par là leur plan de dislocation de la région. Et si la guerre tout court va éclater en grand entre Israéliens et Palestiniens. Pour déboucher, peut-être, sur un contre-Exode à trois mille ans de distance, les Palestiniens prenant la route de Babylone, comme les juifs dans la Bible. Le peuple élu se retrouverait seul en terre sainte. Et ne craindrait plus, avec les 14 petits millions qu’il affiche dans le monde (on en voit en réalité bien plus à la télé, mais bon) d’être vaincu par le nombre.
Cette agonie du processus de paix, par le haut comme par le bas du tableau régional, donne en fait (mais pas en fête) du répit au Liban. Pays indivisible, parce qu’invisible sur la carte. Mais qui resterait quand même avec une dette inextinguible. Quand, après le grand chambardement, il n’y aura plus. De moratoire possible.

Jean ISSA
* Des frères Taviani, Paolo et Vittorio, 1987.
Une expression (heureusement) peu courante : infection ou maladie nosocomiale. C’est-à-dire contractée à l’hôpital. Guillaume Depardieu, soigné pour un choc à la rotule, a dû par la suite se faire couper la jambe ! Et nous, la gangrène Taëf va nous mener où ?Quelques jours avant la guerre d’Irak, Hariri promettait que le Liban s’en ressentirait le moins dans la...