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Le pouvoir plus que jamais désuni, malgré la récession

Les politiciens, qui ne sont pas tous inconscients, tirent la sonnette d’alarme: le pays s’avance à grandes enjambées vers le gouffre économique et financier. Parce que le pouvoir n’a recouru, jusque-là, qu’à de pâles palliatifs. Sans jamais plancher sur des solutions de fond que ses tiraillements internes, ouverts ou camouflés, l’empêchent d’aborder. La fameuse responsabilité partagée, revendiquée d’abord par les lahoudistes pour priver Hariri d’une chasse gardée, puis par Hariri lui-même pour justifier l’échec, se situe donc au niveau de l’inculpation plutôt qu’à celui d’un engagement de mission.L’inquiétude s’accentue quand on constate qu’avec la rentrée (les écoles à payer, la sécu, l’électricité, etc.) les difficultés des gens s’aggravent, alors que les camps loyalistes en présence ne songent qu’à se tirer dans les pattes. Il n’y a pas d’harmonie entre Baabda et Koraytem, et presque pas de contacts. En bonne logique, pourtant, sachant que les deux présidents ont pratiquement la haute main sur le pouvoir exécutif (même s’il est légalement détenu par le Conseil des ministres), on se serait attendu à ce qu’ils multiplient les concertations, pour faire face à la crise. Et qu’ils dirigent ensemble une cellule du même nom, une ruche de travail intensif, comprenant plusieurs commissions spécialisées. En des circonstances moins dramatiques, jadis, le pouvoir tenait séminaire, session ouverte pendant plusieurs jours. Devant la passivité des autorités publiques, un opposant se demande si le pays va pouvoir traverser la saison d’automne sans troubles sociaux.
Cependant, Hariri veut se montrer rassurant, sinon franchement optimiste. Il s’est rendu récemment, comme on sait, auprès de son grand ami Chirac. Qui, après une réunion de travail de trois heures en présence de leurs collaborateurs, l’a retenu à déjeuner en tête à tête. Sur le perron de l’Élysée, Hariri a réaffirmé le soutien de la France, la promesse d’assistance donnée par Chirac, en vue notamment de la redynamisation de Paris II comme de la préparation de Paris III. Le Premier ministre a cependant précisé, honnêtement, qu’il faut d’abord que le Liban tienne ses engagements, restés jusque-là lettre morte. Qu’il réalise les réformes ou les compressions qui lui ont été posées comme conditions lors de Paris II. Il a répété qu’il appartient à l’État dans son ensemble de mener à bien un tel programme. Voulant manifestement par là renvoyer la balle dans le camp du régime, auteur initial de la formule de la responsabilité partagée, mentionnée plus haut. C’est dire que même à l’issue d’une démarche de sollicitation en France, le litige intérieur reste en vedette. Et l’on se demande si les multiples appels en faveur d’une coopération entre les dirigeants libanais vont être entendus par les intéressés. Du côté du budget, Siniora indique dans ses assises privées qu’il reste obsédé par une réduction du déficit. Il ajoute qu’il n’a pas de penchant particulier pour une augmentation des impôts et que l’on doit d’abord couper le robinet du gaspillage public. Pour se hâter ensuite de soutenir que, quand même, les Libanais doivent s’attendre à consentir des sacrifices, à suer sang et eau, selon les propos qu’on lui prête, pour sortir de la crise. Le ministre ne veut pas être mal compris : il précise qu’il ne s’agirait pas de supporter de nouvelles charges fiscales, mais de travailler plus, pour produire plus, et relancer la croissance. Siniora ajoute que manifestement certains tentent de lui mettre des bâtons dans les roues, dans ses efforts pour un plan de redressement économique. Il souhaite que l’État adopte ce programme sans rechigner, quoiqu’il en coûte. Siniora indique que la ligne suivie depuis l’an dernier en matière de gestion budgétaire sera poursuivie. Et qu’il espère cantonner l’an prochain le déficit dans les limites des 25 %.
Il reste à savoir si le débat sur le projet de budget, qui doit d’abord passer devant le Conseil des ministres, ne va pas tourner à l’empoignade entre lahoudistes et haririens. En d’autres termes, si les présidents vont s’entendre au moins sur ce sujet. D’intérêt général.
Philippe ABI-AKL
Les politiciens, qui ne sont pas tous inconscients, tirent la sonnette d’alarme: le pays s’avance à grandes enjambées vers le gouffre économique et financier. Parce que le pouvoir n’a recouru, jusque-là, qu’à de pâles palliatifs. Sans jamais plancher sur des solutions de fond que ses tiraillements internes, ouverts ou camouflés, l’empêchent d’aborder. La fameuse...