En fait, les appréhensions domestiques actuelles sont alimentées par la précarité évidente des engagements israélo-palestiniens articulés autour de la « feuille de route » du quartette. Au lieu de s’apaiser après Aqaba, la violence s’est intensifiée. Ni l’armée israélienne ni les islamistes palestiniens ne veulent mettre un terme à leurs opérations. Tout autant que les fondamentalistes, mais pour des raisons diamétralement opposées, l’État hébreu répugne à voir se créer un État palestinien, même de pure forme ou presque. Objectivement, le gouvernement du Likoud, qui réclame la neutralisation du Hamas, du Jihad islamique ou du FPLP, ne peut que souhaiter la poursuite de leur action. Il doit se frotter les mains de ce que les extrémistes palestiniens refusent la trêve de trois jours renouvelable qu’il leur propose. Parce qu’ainsi, il montre patte blanche à l’Administration Bush et se met en position d’en obtenir le soutien pour sa vraie politique, qui se résume en un mot : répression. Dans le but de gommer la paix et la création d’un État palestinien, en organisant le transfert des populations vers la Jordanie. Cela, en profitant de la prochaine entrée des États-Unis en période électorale, Bush fermant alors les yeux parce qu’il a besoin des voix de l’électorat israélite américain.
Bien évidemment, la dégradation sur le front israélo-palestinien attise les convulsions dans le reste de la région. La néorésistance irakienne se trouve de la sorte encouragée, ainsi que le courant conservateur iranien dans son bras de fer avec les réformistes. La résistance libanaise de son côté pourrait relancer son action de libération. Ce qui risquerait de provoquer une redoutable confrontation entre Israël d’une part, la Syrie et le Liban d’autre part. La contrée irait, avec la violence, l’anarchie et la montée en puissance des fondamentalistes, vers la dislocation en mini-États confessionnels ou ethniques. À la grande satisfaction d’Israël, qui deviendrait intouchable, et au grand dam des États-Unis, qui perdraient le contrôle de la région.
Bien entendu, ce sont là des spéculations théoriques. Mais la région est certainement sur un volcan, à un tournant crucial de son histoire. C’est pourquoi, les professionnels locaux répètent qu’il ne faut pas mettre la charrue devant les bœufs, ni parler de la présidentielle avant que le tableau régional ne se soit décanté.
Émile KHOURY
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