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TÉLÉPHONIE MOBILE - Le ministre des Télécommunications s’attend à une nouvelle campagne contre lui en mars Cardahi : La bataille est longue, mais le temps joue désormais en faveur de l’État

L’assistance n’est peut-être pas très spécialisée, mais elle est particulièrement attentive et désireuse d’en savoir plus sur un secteur qui occupe depuis des mois la première place dans les médias. Et puis l’orateur est on ne peut plus crédible, simple et direct. Jean-Louis Cardahi ne fait pas de politique, mais (peut-être à cause de cela) en quelques mois, il est devenu le ministre le plus populaire du gouvernement, réussissant à gagner la confiance de la population, convaincue qu’il sert ses intérêts. Devant les vétérans du Courant de la société civile, lancé et animé par Mgr Grégoire Haddad, le ministre des Télécommunications a dressé un bilan de la situation de la téléphonie mobile, précisant que la bataille est longue et qu’il faut s’attendre à un débat encore plus animé au cours du mois de mars, mais que la position de l’État dans ce secteur ne cesse de s’améliorer. Ni la pluie insistante ni le froid et encore moins les locaux mal chauffés n’ont découragé les membres du Courant de la société civile, qui sont venus nombreux à la causerie débat animée par le ministre Jean-Louis Cardahi. Dans le souci d’agir au mieux pour préserver les intérêts des citoyens, ils voulaient comprendre ce qui se passe dans le secteur de la téléphonie mobile et avec une grande simplicité, le ministre a répondu à toutes les questions. Tout d’abord, quelques principes de base: la privatisation ne peut en aucun cas, selon M.Cardahi, se résumer à une opération de vente ou d’achat. Pour être réussie, elle doit respecter certains critères, dont la protection du consommateur, l’absence de monopole et la création d’emplois. « En tout cas, si les citoyens ne sont pas convaincus qu’elle est dans leur intérêt, elle ne peut pas réussir », précise M. Cardahi. Des chiffres concluants Pourquoi le secteur de la téléphonie mobile aiguise-t-il tant les appétits? Les chiffres du ministre sont assez concluants dans ce domaine. Au Liban, la facture moyenne d’un abonné est de 85 dollars par mois pour 480 minutes de conversation. En France, elle est de 35 dollars environ, et en Grande-Bretagne, de 25 dollars. De plus, au Liban, il y a une grande densité d’abonnés pour une petite surface, donc le fonctionnement du réseau coûte moins cher que dans les pays à grande superficie. Il faut ajouter à cela qu’au Liban, 22 % de la population possède un téléphone portable, alors qu’en Europe, le chiffre est de 47 %. C’est dire que le secteur est loin d’être saturé et que les 800 000 abonnés actuels peuvent devenir rapidement un million et demi. D’où l’intérêt évident que les sociétés qui gèrent actuellement le réseau et de nombreux partenaires potentiels portent au secteur. De plus, actuellement, et pour arrondir les chiffres, les recettes mensuelles du secteur varient entre 60 et 70 millions de dollars. L’État verse, de ces recettes, 15 millions aux deux sociétés (7,5 à chacune), alors que le coût du fonctionnement du réseau s’élève pour chacune à 5 millions de dollars. Autrement, chaque société fait chaque mois 2,5 millions de bénéfices. Face à ces chiffres, que peut faire le ministre, sinon reporter les échéances ? M. Cardahi, qui lutte depuis des mois, presque seul dans l’arène, n’est pas d’accord avec cette évaluation. Pour lui, la date-butoir est le 31 août 2002. C’est, selon lui, à cette date que la situation a basculé en faveur de l’État. Ce dernier a assaini et renforcé sa position légale. Désormais, les recettes vont à l’État et les sociétés ne disposent plus que de sommes forfaitaires pour la gestion du réseau. Avec la signature du « Transfer Agreement », l’État a recouvré la propriété du secteur, ce qui lui donne une grande liberté d’action, puisque, auparavant, il ne pouvait vendre une licence qui ne lui appartenait pas. Désormais, le facteur temps joue en faveur de l’État, qui n’est plus acculé, recevant les recettes du secteur et possédant désormais l’infrastructure qu’il a payée argent comptant aux deux sociétés de téléphonie mobile. Selon le ministre, il n’y a pas de conflit avec le président du Conseil sur le principe de la privatisation avec le président du Conseil, mais sur son application, notamment sur les préqualifications exigées pour l’appel d’offres. Le ministre a ainsi confié à Ericsson la mission de réaliser un monitoring sur les véritables recettes des sociétés, notamment les cartes prépayées. Fin mars, cette société pourra présenter un premier rapport et le ministère pourra alors fixer un prix réel pour la licence à vendre. « Ma politique n’est pas de faire des blocages, mais de placer des garde-fous et d’établir des normes pour protéger le secteur », ajoute M. Cardahi qui estime que les pièges sont dans les détails, non dans les principes. Des indices contradictoires pour troubler le marché Le ministre juge très bonne l’idée du président du Conseil d’ouvrir le secteur au public, mais pour cela, il faut, selon lui, changer tout le mécanisme, « car il s’agit d’une tout autre direction ». Il faudra donc créer une société anonyme libanaise, dotée d’un contrat gestion, puis se diriger vers la Bourse pour la mise en vente des actions, et tout cela nécessite une loi. Or, jusqu’à présent, le projet allait vers dans une autre direction : le lancement d’un appel d’offres qui s’adresse à des sociétés financières, non à des particuliers. Le ministre précise qu’à titre personnel, il préfère l’option de l’ouverture au public et il avait même fait une proposition en ce sens, mais le Conseil des ministres avait choisi l’appel d’offres et, selon lui, il faut être conséquent avec ses choix. « Car donner des indices contradictoires ne peut que semer le trouble dans le secteur et sur le marché. » En tout cas, le ministre croit au débat et il espère que ce secteur fera l’objet d’une discussion ouverte au Parlement au cours du mois prochain. Avec le Premier ministre, il affirme que le dialogue n’a jamais été rompu, même si les relations n’ont pas toujours été faciles. « Mais il n’y a jamais eu de conflit personnel », précise-t-il. Selon M. Cardahi, le mois de décembre a été le pire pour lui, tant la campagne menée par les médias appartenant à M.Hariri a été féroce contre lui, et il lui est arrivé, à ce moment-là, de se demander à quoi bon continuer à se battre. « Mais mon allié permanent a toujours été la presse (celle qui n’appartient pas au président du Conseil) et l’opinion publique. Sans elle, je ne serais peut-être pas resté à mon poste et elle m’a donné une plus grande marge de manœuvre. Au pire moment, en décembre dernier, un sondage effectué a montré que la majorité des Libanais appuyait ma position et cela m’a permis de continuer. » Le ministre, qui s’attend à une recrudescence des campagnes menées contre lui en mars, évoque le rôle des médias et de l’opinion publique pour montrer l’importance des institutions de la société civile, dans l’information de la population, afin qu’elle participe au débat. « Il faut créer des groupes de pression et pousser les responsables à s’expliquer et à respecter leurs engagements. Malheureusement, les citoyens ont atteint un stade de divorce avec l’État. C’est d’autant plus grave que les décisions de celui-ci influent sur leurs vies. Il faut donc leur donner l’envie de s’impliquer et leur faire comprendre que l’opinion publique a un rôle très important à jouer. » Mgr Grégoire Haddad et les deux coordonnateurs du Courant, Mme Ghada Yafi et M. Sami Farah, ne cachent plus leurs sourires. C’est exactement leur projet. Reste à savoir si le public suivra. Scarlett HADDAD
L’assistance n’est peut-être pas très spécialisée, mais elle est particulièrement attentive et désireuse d’en savoir plus sur un secteur qui occupe depuis des mois la première place dans les médias. Et puis l’orateur est on ne peut plus crédible, simple et direct. Jean-Louis Cardahi ne fait pas de politique, mais (peut-être à cause de cela) en quelques mois, il est...