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Actualités - INTERVIEWS

Entretien - Il faut au moins trois ans pour se doter d'une comptabilité nationale Maral Tutélian veut redonner sa place à l'Administration centrale de la statistique (photo)

Le Liban donne l’impression de ne pas savoir compter. Pas de chiffre du PIB, pas de taux de chômage, pas d’indice des prix, etc. aucun indicateur fiable n’est disponible dans le pays. Un responsable est invariablement montré du doigt : l’Administration centrale de la statistique (ACS). Nommée directrice il y a six mois, Maral Tutélian Guidanian a décidé de prendre le taureau par les cornes pour permettre à cette institution, qui dépend directement de la présidence du Conseil, de remplir pleinement son rôle. Créée dans les années 1970, l’ACS est selon la loi le seul organisme officiel habilité à fournir les statistiques indispensables à la définition de toute politique économique ou sociale. Or force est de constater qu’elle ne produit pas les chiffres voulus et, selon les observateurs, nombre d’études sont contradictoires. La guerre et ses vicissitudes, les lacunes innombrables de l’administration libanaise... les raisons qui ont conduit à cet échec sont nombreuses. Diplomate, Mme Tutélian, préfère ne pas s’y attarder et se tourner résolument vers l’avenir, avec une ambition affichée d’emblée : «Je veux que l’administration devienne une référence». Le travail à accomplir est titanesque, avec peu de moyens. La formule est désormais connue dans la fonction publique libanaise. La détermination n’en est pas moins grande. Recruter par concours La première étape consiste à recruter, explique Mme Tutélian, qui dirige à peine 88 personnes, alors que les statuts de l’ACS prévoient des effectifs de 256 fonctionnaires. Et la moitié du personnel est affectée à des tâches administratives, ce qui laisse peu de monde pour les études proprement dites. L’administration ne compte pas plus de quatre statisticiens. «Heureusement, les quelques personnes en place sont de qualité, c’est ce qui nous donne du souffle, et nous permet de garder espoir». Mais il en faut plus pour mener des recherches scientifiques, c’est pourquoi des concours administratifs sont en cours de préparation. S’il y a peu de chances de remplir dès la première fois tous les postes vacants, Mme Tutélian, cherche au moins à renforcer les différents départements et en particulier celui de l’informatique qui est la clé de voûte de l’organigramme puisqu’il est chargé de traiter tous les résultats. Les universités libanaises ne manquent pas d’étudiants qualifiés, mais la difficulté provient du niveau des salaires. «Un statisticien dont le diplôme a nécessité sept à huit ans d’études est payé un peu plus d’un million de livres par mois». Un problème qui n’est pas directement du ressort de la directrice, bien qu’elle promette de s’y atteler plus tard. Comptabilité nationale En six mois, le travail accompli est déjà grand, souligne-t-elle. «Nous avons restructuré les différents services et attaqué la remise à plat de la routine avant de lancer de nouveaux projets ambitieux». Le premier résultat tangible apparaîtra d’ici à un mois avec la publication d’un indice des prix à la consommation qui sera trimestriel jusqu’à la fin de l’année. Cet outil indispensable de l’analyse économique prendra un rythme mensuel dès 2001, affirme Mme Tutélian. Octobre prochain verra aussi la publication dans le rapport annuel de l’Unicef d’une étude sur l’enfant libanais réalisée par l’ACS avec, «pour la première fois, l’utilisation de méthodes et de techniques répondant à des normes internationales. Nos chiffres vont être comparables à ceux d’autres pays». Mais le grand chantier de l’administration de la statistique, c’est avant tout la mise en place d’une comptabilité nationale. Tous les efforts vont converger vers cet objectif, explique Mme Tutélian. «Chaque étude que nous allons entreprendre s’inscrira dans le cadre d’un plan destiné à élaborer cette comptabilité nationale. Il s’agit d’un travail de longue haleine qui durera au moins trois ans à partir du lancement du programme». L’ACS prépare le projet en collaboration avec diverses organisations internationales, dont l’Escwa, et déjà, les statisticiens de l’administration ont entamé des formations pour s’initier aux nouvelles méthodes pratiquées dans les pays occidentaux. «La comptabilité nationale est la priorité. Car elle constitue la base de la planification économique». L’Union européenne, comme la plupart des partenaires du Liban, en sont conscients. Dans le cadre de son don pour la réforme administrative, Bruxelles va ainsi consacrer une assistance technique spécifique à l’ACS.
Le Liban donne l’impression de ne pas savoir compter. Pas de chiffre du PIB, pas de taux de chômage, pas d’indice des prix, etc. aucun indicateur fiable n’est disponible dans le pays. Un responsable est invariablement montré du doigt : l’Administration centrale de la statistique (ACS). Nommée directrice il y a six mois, Maral Tutélian Guidanian a décidé de prendre le taureau par les...