Livres - Hussein Aoueini et son époque, un ouvrage de Roger Gehchan Un demi-siècle de convulsions politiques

La littérature politique libanaise et arabe vient de s’enrichir d’un ouvrage dû à la plume de Roger Gehchan, rédacteur en chef adjoint de L’Orient-Le Jour. Le livre, paru aux Éditions FMA (Fiches du Monde Arabe), est préfacé par l’un des meilleurs spécialistes de la politique internationale, André Fontaine, ancien directeur du journal Le Monde. Il est intitulé : Hussein Aoueini, un demi-siècle d’histoire du Liban et du Moyen-Orient : 1920-1970. 1920 : un ordre international prend fin, un autre tente de s’instaurer, dans un tumulte planétaire et des convulsions dont les ondes de choc sont encore perceptibles de nos jours. Ce bouleversement est le résultat de la Première Guerre mondiale. Dans le Hedjaz, le chérif Hussein donne le signal de la révolte arabe contre les Ottomans. En Mésopotamie, en Syrie, au Liban et en Palestine, la débâcle dans laquelle est entraînée la Sublime porte et la défaite des empires centraux en Europe permettent à la Grande-Bretagne et à la France de se partager les dépouilles des vaincus et de dessiner une nouvelle carte politique du Proche-Orient. Il faudra le lent travail de fermentation du nationalisme et des années de combats avant que les États nouvellement créés n’accèdent à l’indépendance. Une indépendance bientôt compromise par la lutte d’hégémonie et la guerre froide auxquelles le monde occidental et le bloc soviétique se livrent et dont le Proche-Orient, région stratégique entre toutes, est l’un des enjeux. Mais le choc déstabilisateur le plus grave qu’il subira découlera de la création de l’État d’Israël et des multiples guerres qu’elle entraînera. Un homme a vécu toutes ces péripéties. Quatre fois président du Conseil, souvent aux heures les plus critiques, ministre des Affaires étrangères ou de la Défense dans de nombreux gouvernements, Hussein Aoueini – Hajj Hussein –, cet homme à la figure sereine et tranquille, a pourtant connu la prison et l’exil. Nationaliste arabe, il s’est dressé contre la puissance mandataire, a été arrêté et banni. Au Hedjaz, où il s’établit alors, il devient l’ami et le conseiller d’Abdel-Aziz Ibn Séoud. Pionnier des affaires en Arabie, ayant bâti une fortune, il rentre au Liban et participe, dans les plus hautes instances du pouvoir, aux principaux événements de l’histoire du pays et de la région. Du conflit opposant Hussein, le chérif de La Mecque, et ses fils à Abdel-Aziz Ibn Séoud, à l’agression israélienne de 1968 contre l’aéroport de Beyrouth, en passant par les accords Sykes-Picot, la Déclaration Balfour, le Mandat, l’indépendance du Liban, les élections truquées de 1947, l’accord monétaire avec la France, la bataille de la couverture or de la livre libanaise, le divorce économique avec la Syrie, la «révolution blanche» et le départ forcé du président Béchara el-Khoury en 1952, les luttes contre les projets occidentaux de défense collective au Moyen-Orient élaborés dans le cadre de la guerre froide, l’insurrection et la contre-insurrection de 1958, l’extraordinaire lame de fond que fut le nassérisme, les réalisations du «chéhabisme», et l’avènement de la révolution palestinienne, la trajectoire de Hussein Aoueini survole cinquante années d’histoire qui ont remodelé le Proche-Orient. C’est ce demi-siècle que met en scène l’ouvrage qui vient de paraître et qui s’appuie largement sur des documents diplomatiques, dont plusieurs inédits ou difficilement accessibles, comportant des révélations de première importance. «Hussein Aoueini, un demi-siècle d’histoire du Liban et du Moyen-Orient», par Roger Gehchan, Éditions FMA, 536 p., 25 000 L.L.