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Actualités - REPORTAGES

Solidarité - Don des organes de la seconde victime du drame de Mar Roukoz Le coeur d'Alain Khalifé continuera de battre(photo)

Alain Khalifé, 19 ans, blessé à la tête par l’explosion de la grenade à main la semaine dernière, à l’École supérieure des ingénieurs de Beyrouth (Esib), a quitté sa famille et ses amis vendredi, à l’aube. Arrivé inconscient mardi dernier à l’hôpital de l’Hôtel-Dieu, Alain ne s’est pas réveillé de son profond coma. Le cerveau du jeune étudiant n’a pas résisté aux éclats, mais son cœur ne s’est pas arrêté de battre, après la mort cérébrale. Et pour cause : la famille de la victime a décidé de faire don de ses organes, dont le cœur pour sauver d’autres vies. C’était aussi le souhait profond d’Alain qui répétait à ses amis les plus proches : «Si je suis victime d’un accident, je veux que ce qui reste intact de mes organes soit donné à ceux qui en ont besoin». Mortellement touché par des éclats qui se sont logés dans son cerveau, Alain sauvera plus d’une personne. Son cœur, ses yeux, ses reins, son pancréas, et son foie transformeront la vie de plusieurs personnes qui souffrent. «Jeudi soir, quand j’ai été informé de la mort cérébrale de mon fils, j’ai pris la décision la plus difficile de ma vie», dit Michel le père d’Alain. Les yeux noyés de larmes, il explique : «J’ai réalisé qu’Alain était effectivement mort, qu’il ne revivra plus, je suis resté seul, j’ai été envahi par un sentiment très fort : «Mon fils est mort pour que d’autres vivent». Après avoir pris sa décison, le père d’Alain retrouve sa femme, Marie, et son autre fils Dany, 16 ans, pour les informer. «Avant que je n’achève ma phrase, Dany debout derrière sa mère, a pris Marie par l’épaule en lui disant : «Maman s’il te plaît, dis oui», indique Michel. Rentré dans la nuit de jeudi à vendredi à Rachana, son village d’origine, le père reçoit la visite de Marwan, l’un des amis les plus proches de son fils. Le jeune homme lui rapporte les propos d’Alain sur le don de ses organes à ceux qui souffrent. Marwan, qui avait vu les parents du jeune étudiant attendre en vain, au service des soins intensifs de l’Hôtel-Dieu, n’avait pas osé leur transmettre le souhait de son ami. Michel, le père d’Alain, explique par une phrase toute courte, simple pour certains, la décision qu’il a prise, ainsi que la mort de son fils : «C’est la volonté du Seigneur». Mardi dernier, Alain ne s’était pas attardé dans la salle de classe. Il est sorti juste à la fin du cours. Ses camarades l’ont rappelé. Ils voulaient qu’il leur explique, comme c’était souvent le cas, les parties difficiles du cours. Brillant, calme et serviable, le jeune étudiant est revenu dans la salle quelques instants avant l’explosion de la grenade. Ancien des pères maristes de Champville, Alain était toujours le premier de sa promotion. Il n’a pas changé ses habitudes quand il est entré à la faculté d’ingénierie relevant de l’Université Saint-Joseph. «Il avait réussi les concours de diverses institutions du pays, mais il a tenu à suivre les cours de l’Esib», racontent ses proches. Les dimanches à Kfifane Pour perpétuer le souvenir du jeune étudiant, son père a présenté une demande auprès des responsables de l’Esib. Michel souhaite que la salle où s’est produit le drame, mardi dernier, au campus de Mar Roukoz, porte le nom d’Alain Khalifé. Alain habitait Jounieh durant la semaine. Il passait ses week-ends dans son village de Rachana. Tous les dimanches, il se rendait à Kfifane pour retrouver sa grand-mère maternelle et ses amis, et pour participer à la messe célébrée au couvent de la localité, sanctuaire du bienheureux père Néemtallah Hardini. Il aimait le camping, les feux de camp, la chasse, la natation et le basket-ball. «Une fois, en hiver, alors qu’il jouait en plein air au ballon, l’un de ses camarades a eu froid, il a enlevé son pull-over pour le lui donner», raconte un proche. «Ce n’est qu’un exemple parmi tant d’autres», renchérissent ses amis. Alain était serviable, généreux, convivial. Il ne se plaignait jamais. «Il possédait le don d’être présent auprès de tous», disent ses camarades. «Dimanche dernier, deux jours avant le drame, je devais déjeuner avec lui chez sa grand-mère à Kfifane», dit Walid, son ami et cousin. «Je suis arrivé en retard, toute la famille a mangé sans moi. Il était le seul à m’avoir attendu», indique-t-il. Dany, le frère du jeune étudiant, raconte que «même quand Alain avait des examens, il arrêtait d’étudier pour m’aider à faire mes devoirs». «Il m’emmenait partout avec lui», poursuit-il. Dany, qui a refusé de voir son frère blessé sur son lit d’hôpital, aimerait «remercier toutes les personnes qui ont prié avec nous pour que mon frère se rétablisse». Lui qui a encouragé sa mère à faire don des organes d’Alain indique : «Mon frère était compréhensif avec tout le monde… maintenant, grâce à lui, d’autres personnes pourront vivre». «C’est comme s’il était lui-même toujours vivant», ajoute-t-il. Alain était aussi très proche de Pamela, 6 ans, la benjamine de la famille. Il se promenait avec elle quand il avait du temps libre et il lui faisait beaucoup de cadeaux. Le jour du drame, il la taquinait. Le matin avant qu’elle parte à l’école, il lui avait dit sur un ton moqueur : «Aujourd’hui j’arriverai avant toi à la maison». Depuis ce jour-là, Alain n’est plus rentré chez lui.
Alain Khalifé, 19 ans, blessé à la tête par l’explosion de la grenade à main la semaine dernière, à l’École supérieure des ingénieurs de Beyrouth (Esib), a quitté sa famille et ses amis vendredi, à l’aube. Arrivé inconscient mardi dernier à l’hôpital de l’Hôtel-Dieu, Alain ne s’est pas réveillé de son profond coma. Le cerveau du jeune étudiant n’a pas...