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Actualités - OPINION

Un morceau de nostalgie

La nostalgie, du moins à Beyrouth aujourd’hui, n’a pas bonne presse. À preuve, l’architecture contemporaine, de construction et de reconstruction, qui parsème la ville par blocs décalés, les peintures multicolores qui recouvrent d’anciennes bâtisses intactes – pour faire neuf et propre, pourquoi pas ? –, bref oublier et créer semble être la nouvelle règle d’action, la mentalité diffuse de la République depuis dix ans. Et pourtant, comment éviter la mélancolie devant ce qui n’est ni tout à fait mort, qui n’est vivant que par évocation du passé ? Ainsi de ce qui reste des décombres de l’ancien Institut français d’archéologie, ce mur à claire-voie, qu’on ose à peine appeler «façade», puisqu’il ne couvre plus rien. On dit le lieu sauvé par l’achat du milliardaire-collectionneur Tannouri. Nostalgie de toute une génération envers ce qui fut une demeure privilégiée, appréhension de ce que l’acquéreur va en faire, de ce qui remplacera la sobriété de la collection personnelle d’Henri Seyrig qui dirigea quarante ans le bâtiment de la rue Georges-Picot. Mais on ne va pas se battre à coup de Picasso et de Degas, et M. Tannouri, venu à la fortune par des voies moins académiques que celles de l’école d’Athènes, fera sans doute de la grande maison, une fois restaurée, quelque chose de plus voyant que celle qui abritait, entre autres, autrefois, Calder et Picasso. Voilà, c’était pour pleurer un peu sur cette vision hideuse, seulement identifiable par la pancarte exhibant le nom du nouveau propriétaire. Et ne s’attarder ni sur les larmes des pierres, ni sur les changements d’époque...
La nostalgie, du moins à Beyrouth aujourd’hui, n’a pas bonne presse. À preuve, l’architecture contemporaine, de construction et de reconstruction, qui parsème la ville par blocs décalés, les peintures multicolores qui recouvrent d’anciennes bâtisses intactes – pour faire neuf et propre, pourquoi pas ? –, bref oublier et créer semble être la nouvelle règle...